« Je vis ça plus mal que l’agression » : roué de coups, un chauffeur de bus convoqué par sa direction et menacé de sanctions

Par Emmanuelle Bourdy
5 juin 2025 16:14 Mis à jour: 13 juin 2025 18:52

Jean-Christophe Colombo, conducteur de bus pour le réseau TBM à Bordeaux et dans les environs, a été agressé le 7 mai dernier. Comme si cette agression ne suffisait pas, son employeur lui reproche un manquement aux consignes de sécurité et l’a convoqué à un entretien préalable en vue d’une éventuelle sanction.

Pour Jean-Christophe Colombo, qui travaille sur le réseau bordelais depuis 28 ans, la pilule a du mal à passer. Excédé par les incivilités d’un usager fraudeur début mai, le chauffeur avait demandé à ce dernier de descendre du bus. Pour toute réponse, l’usager clandestin l’avait roué de coups. Mais peu de temps après, son employeur lui a envoyé par courrier recommandée une convocation à un entretien préalable avant sanction, comme le rapporte Le Figaro.

La direction lui reproche d’avoir quitté son poste de conduite

Pierrick Poirier, le directeur général de Kéolis Bordeaux – qui est le réseau d’exploitation des transports en commun bordelais – reproche à son salarié d’avoir quitté son poste de conduite. Or les consignes de sécurité exigent des chauffeurs de bus de Keolis de rester à leur poste et de ne rien dire lorsqu’ils sont insultés ou invectivés par des passagers.

« On nous explique que ce n’est pas nous qui sommes agressés, mais l’image que nous représentons », a expliqué à nos confrères le conducteur de bus agressé avant d’ajouter : « En interne, une insulte n’est pas considérée comme une agression par la direction : elle n’entraîne pas de dépôt de plainte alors même que nous sommes dépositaire d’une mission de service public. »

Ce 7 mai, irrité par le comportement de l’usager fraudeur qui refusait de le saluer et l’insultait, le conducteur a en effet quitté brièvement son poste de conduite afin de lui demander de descendre du bus. Le passager du bus l’a alors roué de coups, le blessant au visage et à l’épaule.

« Je suis choqué »

À peine sorti de la clinique – où il a dû subir une double opération de l’épaule à la suite de cette agression – le chauffeur a découvert dans sa boîte aux lettres la convocation de son employeur. S’il reconnaît son imprudence le jour des faits, il se dit « choqué » par la réaction de Kéolis Bordeaux.

« Je vis ça plus mal que l’agression elle-même », a déclaré Jean-Christophe Colombo, soulignant : « C’est un coup de poignard, même à mon ennemi je ne ferai pas ça. » « Je ne comprends pas. S’il s’agit juste de discuter, un entretien managérial suffirait », a poursuivi le quinquagénaire, qui est depuis suivi psychologiquement et semble inquiet des conséquences de cette convocation, prévue pour le 17 juin prochain, car celle-ci pourrait entraîner son licenciement.

« Monsieur Colombo s’est mis en danger en allant voir ce passager »

Pour le directeur général de Keolis, la mission d’un conducteur n’est pas « d’éduquer les gens » et il estime que son employé « s’est mis en danger en allant voir ce passager ». « Je sais que j’ai le mauvais rôle dans cette affaire. Tout le monde peut avoir une mauvaise journée, mais il est important d’entendre ses explications et de s’assurer qu’il ne reproduise pas ce type de comportement », a-t-il encore martelé, déclarant chercher, derrière son apparente « sévérité », à « protéger » Jean-Christophe Colombo. Selon Pierrick Poirier, ce dernier aurait dû, conformément aux consignes, rester à son poste et signaler l’incident en contactant le PC sécurité.

Blessé par l’attitude de sa direction, le conducteur agressé s’est interrogé sur la réaction de son employeur « bien à l’aise dans son bureau climatisé avec sa machine à café », s’il venait à se présenter face à lui en le couvrant d’insultes. « On n’est ni des bêtes ni des machines. Un être humain est aussi amené à réagir », a-t-il conclu.

Auprès de France 3 Nouvelle-Aquitaine, Jean-Christophe Colombo a confié : « On attend un soutien indéfectible, et je ne l’ai pas eu. » Affirmant que ses collègues ont été choqués et stupéfaits par la tournure des événements, celui qui est également délégué syndical a remercié sa supérieure hiérarchique directe, qui a officiellement refusé d’assister à l’entretien le 17 juin.

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