Opinion
La baisse fantôme de l’immigration clandestine en Espagne : du triomphalisme gouvernemental à la propagande médiatique
Au cours des derniers mois, le gouvernement espagnol et les médias qui lui sont favorables n'ont pas tari d'éloges à leur propre égard pour leur prétendu « succès » dans la lutte contre l'immigration clandestine.

Les équipes de premiers secours et les membres de la Croix-Rouge viennent en aide aux migrants qui débarquent d'un bateau sur le quai de La Restinga, dans la municipalité d'El Pinar, sur l'île canarienne d'El Hierro, le 21 octobre 2023.
Photo: STRINGER/AFP via Getty Images
Des médias tels que eldiario.es se réjouissent que les arrivées illégales aux Canaries aient diminué de 43,3 % depuis le début de l’année 2025 par rapport à 2024, passant de 11.672 à 6.622 immigrants jusqu’à la mi-février, et présentent cela comme une « tendance à la baisse » qui reflète les changements dans les flux migratoires.
De son côté, la télévision publique RTVE a annoncé en grande pompe le mois dernier une baisse de 50 % des arrivées aux îles Canaries, l’attribuant directement au « succès des politiques espagnoles » qui comprennent des mesures préventives dans les pays d’origine tels que la Mauritanie, le Sénégal et la Gambie.
Le lieutenant général Manuel Navarrete, chef du commandement des frontières, l’a résumé avec fierté lors d’un cours à Jaca : « En encourageant l’aide et l’action dans ces pays, qui sont ceux qui souffrent véritablement du problème », et il assure que ces initiatives ont permis d’empêcher 40 % des départs, grâce à des patrouilles conjointes et à l’arrestation de trafiquants qui démontrent « l’efficacité de ces actions ».
C’est un refrain d’autosatisfaction qui dépeint un tableau idyllique, comme si le problème se dissolvait comme par magie.
Mais quelle solution est-ce là ? Tout citoyen doté de bon sens devrait se poser la question. La baisse des chiffres après la débâcle historique de 2024 n’est en aucun cas un motif de réjouissance. Il s’agit plutôt d’un embellissement statistique, une manœuvre classique de la gauche et de ses communicants pour masquer une réalité qui reste accablante et alarmante.
Nous ne sommes pas face à une oasis dans le désert migratoire, mais à un mirage qui cache des routes en pleine expansion et une pression sans précédent que ce gouvernement semble incapable – ou pire, réticent – à contrôler véritablement.
Les chiffres de l’immigration illégale
Examinons les données avec rigueur et sans détours. Depuis le début de l’année 2025, jusqu’en septembre, l’Espagne a enregistré l’arrivée de 27.476 immigrants par des voies illégales. Cela représente une baisse de 35 % par rapport aux 42.327 entrées enregistrées au cours de la même période en 2024.
À première vue, cela pourrait sembler encourageant, et c’est ainsi que cela a été présenté dans les plateaux de télévision et les couvertures de magazines, en ignorant que ces 27.476 arrivées sont pratiquement identiques aux 28.729 de 2021 – qui représentaient déjà une augmentation de 51 % par rapport à 2020 – ou aux 26.540 de 2023, qui marquaient une augmentation de 14 % par rapport à 2022.
En substance, les chiffres oscillent autour de 27.000 entrées par an, sans baisse réelle et soutenue. Si l’on compare avec les cinq dernières années, nous sommes face à des chiffres disproportionnés, bien supérieurs à ce qui était considéré comme « normal » il y a à peine une décennie.
De quoi pouvons-nous nous réjouir ? Sortir d’une débâcle ne résout rien ; cela ne fait que perpétuer une crise chronique que ce gouvernement, cynique et pernicieux, semble encourager par ses politiques d’appel.
Un exemple paradigmatique de ce triomphalisme sélectif se trouve chez des journalistes comme Javier Ruiz, qui, lors d’une récente apparition à la télévision espagnole, a utilisé un graphique comparatif entre 2024 et 2025 pour affirmer que « l’arrivée d’immigrants diminue ».
À l’écran, on pouvait voir un titre sans équivoque : « L’arrivée des immigrants par voie maritime et aérienne en 2024 et 2025 », avec un graphique montrant une courbe descendante jusqu’à 17.990 arrivées en 2025, contrastant avec les chiffres en hausse de l’année précédente. M. Ruiz, avec son cynisme habituel, a présenté cela comme une bonne nouvelle, ignorant délibérément le contexte historique.
Bien sûr, il y a une baisse par rapport à la catastrophe de 2024, mais qu’en est-il si l’on élargit le champ ? Si l’on compare avec les données des dernières années, la baisse est illusoire.
Ce type de manipulations – car on ne peut les appeler autrement – non seulement désinforment, mais contribuent également à un discours qui minimise un problème structurel. M. Ruiz et ses collègues ne font pas de reportage, ils font de la propagande, servant le discours officiel qui qualifie toute critique de « xénophobie », comme le disait le titre de cette même émission : « Premiers transferts en pleine vague xénophobe ».
Accuser de haine ceux qui réclament des contrôles
C’est le comble du cynisme que d’accuser de haine ceux qui réclament des contrôles, tout en se réjouissant d’une « baisse » qui n’existe pas dans la réalité.
Examinons maintenant les routes spécifiques, où le tableau est encore plus préoccupant. La route atlantique vers les Canaries a connu une baisse de 58 %, passant de 30.850 à 12.878 arrivées jusqu’en septembre 2025. Une raison de se réjouir ? Loin de là. Ces chiffres restent alarmants si on les replace dans leur contexte historique. En 2018, les Canaries n’ont enregistré que 659 entrées illégales au cours de la même période ; en 2019, à peine 975.
Aujourd’hui, nous parlons d’une augmentation de plus de 1800 % par rapport à 2018, et l’archipel accueille 13 fois plus d’immigrants clandestins qu’au cours de l’année précédant la crise d’Arguineguín. C’est comme si, après un incendie de forêt dévastateur, nous nous réjouissions que cette année « seulement » la moitié des hectares aient brûlé, en ignorant que toute la forêt est toujours en flammes.
De plus, comme c’est souvent le cas dans ce genre de situation, le problème ne disparaît pas, il se déplace simplement. Lorsqu’une route « hiberne », d’autres explosent, révélant l’échec total des stratégies de confinement.
Regardons vers les îles Baléares, où la situation est franchement explosive. Jusqu’en septembre, 5827 arrivées ont été enregistrées, soit une augmentation de 84 % par rapport aux 3166 de 2024. Mais les données actualisées au 15 octobre portent ce chiffre à 6104, dépassant déjà le total annuel de 2024 (5936). Avec plus de deux mois devant nous et un rythme mensuel de plus de 600 arrivées, les projections indiquent plus de 7700 arrivées d’ici la fin de l’année.
Ce flux incontrôlé témoigne de manière éloquente de l’échec des politiques actuelles qui, loin de dissuader les arrivées, les encouragent. Si l’on remonte aux cinq dernières années, l’augmentation est astronomique : 3165 % par rapport aux 187 entrées enregistrées en 2018.
Les Baléares, qui constituaient traditionnellement une route secondaire, sont devenues une passoire, avec une croissance exponentielle qui met à mal les ressources locales et la sécurité. Avec la péninsule, le nombre total d’entrées illégales dans ces zones a augmenté de 26 %, atteignant 11.680 jusqu’en septembre. Où est donc la « baisse » tant vantée ?
Comme si cela ne suffisait pas, les frontières terrestres à Ceuta et Melilla brossent un tableau encore plus sombre. Au total, on constate une augmentation de 34 % des entrées illégales. Melilla a connu une hausse vertigineuse de 286 %, passant de 63 à 243 entrées, tandis que Ceuta enregistre une augmentation de 26 %, avec 2644 entrées à ce jour.
Ces chiffres sont le symptôme d’une pression migratoire sans précédent dans l’histoire, où le contrôle des frontières brille par son absence.
Alors que certaines routes connaissent une baisse temporaire, d’autres explosent et le total national reste en zone de crise. Il n’y a rien à célébrer ; il y a beaucoup à regretter et, surtout, beaucoup à faire. Le gouvernement actuel, avec son approche permissive, non seulement ne résout pas le problème, mais l’aggrave, en encourageant un effet d’appel qui attire des milliers de personnes dans des conditions précaires, avec des risques humains inacceptables.
En résumé, la prétendue « baisse » de l’immigration clandestine en 2025 est une supercherie statistique, un tour de passe-passe médiatique orchestré par la gauche et ses porte-parole.
Les articles publiés dans eldiario.es et RTVE, avec leurs pourcentages sélectifs et leurs citations triomphalistes, contribuent à cette mascarade, en ne comparant que le pic de 2024 et en ignorant le contexte des cinq dernières années.
Les chiffres réels — 27.476 arrivées jusqu’en septembre, similaires aux années précédentes de crise — révèlent une réalité accablante : des routes en explosion comme les Baléares ou Ceuta-Melilla, des augmentations exponentielles par rapport à 2018-2019 et une pression migratoire qui ne faiblit pas.
Ce n’est ni une bonne nouvelle, ni une oasis ; c’est une situation d’urgence persistante qui exige des politiques fermes, et non édulcorées. Si nous continuons à nous réjouir de baisses fantômes, le problème ne fera que s’enraciner, avec des conséquences sociales, économiques et humaines que nous paierons tous. Il est temps d’abandonner la propagande et d’affronter la vérité : l’immigration clandestine en Espagne ne diminue pas, elle se transforme, et il est urgent de la contrôler avec rigueur et détermination.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Rubén Pulido a servi pendant onze ans dans l'armée de l'air, où il a obtenu un master en relations internationales à l'UCAM. En dehors du domaine militaire, il a conseillé des organismes en matière d'immigration, a été directeur de la communication d'un groupe parlementaire en Andalousie et collabore actuellement avec plusieurs médias et organismes publics.
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