La violente persécution des chrétiens au Nicaragua s’inscrit dans le cadre des « transformations » régionales, selon un analyste

Par Autumn Spredemann
31 mars 2023 18:22 Mis à jour: 31 mars 2023 18:22

L’Église catholique est un symbole durable de la résistance du Nicaragua au régime du président Daniel Ortega depuis 2018. En conséquence, la résistance pacifique de l’institution a fermement placé les dirigeants de l’Église et les fidèles dans la ligne de mire d’Ortega.

Les tensions se sont intensifiées entre l’Église catholique et Ortega le 18 mars, lorsque le Vatican a fermé son ambassade à Managua. Plus tôt dans la semaine, M. Ortega s’était emporté contre le pape François, qui avait comparé l’administration du président à une dictature nazie lors d’une interview accordée à l’agence de presse argentine Infobae.

Ortega a dénoncé les leaders catholiques favorables à l’opposition comme étant des « terroristes » et a qualifié l’Église catholique de « mafia. »

Les remarques du pape ont été faites en réponse à plus de 400 attaques au cours des cinq dernières années contre l’Église catholique, ses prêtres, ses évêques et ses paroissiens. Les attaques incessantes de la police et d’autres intervenants du régime d’Ortega ont poussé des dizaines de responsables ecclésiastiques à fuir le pays, de peur d’être emprisonnés.

Des fidèles catholiques participent à une messe en plein air, pour demander la fin de la violence dans le pays, devant la cathédrale métropolitaine de Managua, le 28 avril 2018. (RODRIGO ARANGUA/AFP via Getty Images)

Parmi ces derniers, l’évêque Rolando Alvarez a été condamné à 26 ans de prison en février pour « trahison » et diffusion de « fausses nouvelles » sur l’administration d’Ortega.

« L’Église catholique est la dernière voix et la plus forte à s’élever contre ce régime », a déclaré la députée Maria Elvira Salazar (Parti républicain-Floride) lors d’une audition de la sous-commission le 22 mars.

Parmi les attaques contre les fidèles, on peut citer le siège de l’église de la Divine Miséricorde en 2018.

La police nicaraguayenne et des paramilitaires ont criblé l’église de balles pendant 15 heures alors que 200 étudiants, bénévoles, chefs religieux et journalistes se blottissaient à l’intérieur sous des tirs qui ont tué au moins deux personnes.

L’attaque a été déclenchée suite à des mois de manifestations d’étudiants d’universités contre le régime d’Ortega. Au total, les manifestations de 2018 ont fait plus de 300 morts parmi les civils.

En 2020, l’un des agents d’Ortega a lancé une bombe dans une cathédrale de Managua, détruisant une icône sacrée du Christ vieille de 400 ans.

L’année dernière, M. Ortega a dissous des centaines d’organisations non-gouvernementales et expulsé 18 religieuses catholiques de leurs missions dans les quartiers pauvres de la capitale. Son administration a également fermé 19 stations de télévision et de radio catholiques en 2022.

Le mois dernier, M. Ortega a expulsé 222 prisonniers politiques vers les États-Unis. Parmi eux, se trouvaient des prêtres, des dirigeants de l’opposition et d’anciens candidats à la présidence.

« Depuis Managua, le message est clair. Ortega a fait du Nicaragua une prison pour tous ceux qui s’agenouillent devant Dieu le père », a affirmé M. Salazar.

Lever le voile

« Je pense qu’Ortega a renforcé son autoritarisme depuis 2018. Malheureusement, je pense que cela va continuer », a déclaré Joseph Humire, directeur exécutif du groupe de réflexion Center for a Secure Free Society, à Washington, à Epoch Times.

Selon lui, le comportement d’Ortega au Nicaragua suit une trajectoire prévisible des dirigeants autoritaires dans la région, qu’il appelle le « repère de 14 ans. »

Historiquement, les dirigeants latino-américains disposent d’un laps de temps pendant lequel ils maintiennent l’apparence d’une démocratie. Selon M. Humire, cette période est généralement d’environ 14 ans. Passé ce délai, les véritables intentions d’un dirigeant se révèlent.

« Soit on change de gouvernement, soit on lève le voile », a-t-il ajouté.

M. Humire note que M. Ortega vend l’utopie socialiste aux Nicaraguayens depuis son retour au pouvoir en 2007, même si les données économiques ne soutiennent pas sa vision.

Le Nicaragua est resté un pays désespérément pauvre, en proie à une crise économique qui a débuté en 2018 et à des investissements étrangers minimes en dehors des alliés radicaux tels que la Russie, la Chine et l’Iran.

Sanctions contre le Nicaragua

Avec le deuxième taux de pauvreté le plus élevé de la région, les discours passionnés de M. Ortega sur la force et le nationalisme sont de moins en moins entendus ces jours-ci.

Certains Nicaraguayens pensent que c’est la raison pour laquelle Ortega a pris des mesures répressives à l’encontre de l’Église catholique, car le maintien d’une mainmise sur le pouvoir implique de faire taire toute dissidence, quelle qu’en soit la source.

« L’évêque Alvarez est en prison simplement parce que, du haut de la chaire, il a exprimé les convictions suivantes : ‘ Un chrétien ne peut pas avoir de fausses neutralités. Celui qui reste silencieux face aux violations des droits de l’homme a déjà pris sa décision ’ », a déclaré Felix Maradiaga, ancien candidat à la présidence du Nicaragua et prisonnier politique, devant le Congrès américain le 22 mars.

Mais la persécution des chrétiens par Ortega ne se limite pas à ceux qui s’opposent à son autorité. Au cours des derniers mois, M. Maradiaga a déclaré qu’il y avait eu des incidents au cours desquels la police sandiniste avait interdit aux chrétiens de recevoir la communion à l’église.

M. Maradiaga a qualifié M. Ortega de « relique de la guerre froide. » « Il incarne un héritage d’oppression contre la dignité humaine. »

De grandes transformations

M. Ortega est un ancien révolutionnaire sandiniste qui a contribué à mettre fin au règne de 44 ans de la famille Somoza en 1979. Il a ensuite inauguré une nouvelle ère de gouvernement d’extrême gauche par l’intermédiaire du Front sandiniste de libération nationale (FSLN), avec le soutien de Cuba et de la Russie.

« Le FSLN a en fait été fondé et organisé à Cuba », a déclaré Orlando Gutierrez-Boronat, analyste régional et auteur, à Epoch Times. « Ces régimes totalitaires considèrent les catholiques comme la véritable opposition spirituelle et philosophique à leurs projets. »

Si le FSLN d’Ortega a des racines cubaines, il a toujours été davantage une « secte marxiste violente et ésotérique » qu’un parti communiste traditionnel, explique Boronat, même si tous deux semblent partager le même désir d’éradiquer la religion et la foi.

« Le FSLN d’Ortega a un plan à long terme pour un régime totalitaire basé sur la dynastie Castro de Cuba et sur le Parti communiste chinois. »

M. Humire partage ce sentiment, affirmant que la persécution politique et religieuse d’Ortega deviendra la « norme » au Nicaragua et dans d’autres pays où les dirigeants autoritaires sont enracinés.

« C’est la leçon à tirer de la Russie et de la Chine », dit-il. « Nous vivons une période de l’histoire où de grandes transformations sont en cours. »

Plus encore, il estime que les actions d’Ortega sont symptomatiques des grands changements régionaux. Parmi ceux-ci, on peut citer l’élargissement des relations avec la Chine, la Russie et l’Iran. Selon M. Humire, les États-Unis ne peuvent se permettre d’ignorer cette situation.

Le représentant américain Chris Smith (Parti républicain – New Jersey) a également exprimé son inquiétude à l’égard du régime Ortega après la série d’attaques violentes contre les chrétiens du Nicaragua.

« Sous la présidence d’Ortega, le Nicaragua est devenu une dictature paria aux côtés d’autres auteurs de violations des droits de l’homme comme Cuba, le Venezuela, la Russie, l’Iran, la Corée du Nord et la République populaire de Chine. »

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