Le « non » de Michelle Obama à la présidence américaine n’est pas un « non » absolu et définitif

L’image de Mme Obama, renforcée par la récente déclaration de son bureau, la positionne parfaitement pour jouer le rôle du « sauveur réticent » de l’Amérique

Par Thomas McArdle
8 mars 2024 16:46 Mis à jour: 9 mars 2024 17:49

Michelle Obama, l’épouse de l’ex-président américain Barack Obama, vient de déclarer, par l’intermédiaire de la directrice de la communication de son bureau, qu’elle n’accepterait pas l’investiture du Parti démocrate pour l’élection présidentielle de cette année.

Ou, au contraire, a-t-elle laissé comprendre qu’elle l’accepterait ?

« Comme l’ancienne Première dame Michelle Obama l’a exprimé à plusieurs reprises au fil des ans, elle ne se présentera pas à l’élection présidentielle », indique le communiqué de son bureau. « Mme Obama soutient la campagne de réélection du président Joe Biden et de la vice-présidente Kamala Harris. »

Cependant, l’ex-Première dame n’a pas même fait cette déclaration elle-même. En effet, son image, renforcée par cette récente déclaration, la positionne parfaitement pour jouer le rôle du « sauveur réticent » de l’Amérique – un rôle qui pourrait être soigneusement scénarisé par les équipes de relations publiques du Parti démocrate.

Un dilemme pour les démocrates

Actuellement, le Parti démocrate américain fait face à un dilemme. Il devient de plus en plus évident, à chaque nouvelle apparition publique du président démocrate Joe Biden, qu’il est en plein déclin cognitif et que le pouvoir exécutif américain est sous la direction de ses substituts en coulisses. Il n’y a pas de doute que si Biden obtient un second mandat présidentiel de quatre ans, cela permettrait à l’octogénaire d’accomplir certaines des cérémonies de la présidence, tandis que les choses sérieuses seraient entièrement gérées par ses « collaborateurs ». Jusqu’au jour où sa vice-présidente Kamala Harris, encore moins populaire et moins performante, prendra la place du président – une éventualité qui ne devrait pas tarder à se produire.

À cela s’ajoute le fait que les politiques du président Biden accumulent les signaux négatifs dans les sondages. L’immigration illégale et la sécurité des frontières sont devenues les principales préoccupations des Américains en cette année électorale – et ce, en grande partie du fait que Biden a inversé les politiques d’expulsion des migrants illégaux appliquées non seulement par Donald Trump, mais aussi par Bill Clinton, George W. Bush et Barack Obama. Ce dernier a expulsé des millions d’immigrés illégaux. La désapprobation des politiques d’immigration de Joe Biden éclipse celle de sa gestion de l’économie et d’autres questions.

Pour le Parti démocrate, il s’agit d’un risque inacceptable. Il est fort probable que l’ex-président républicain Donald Trump revienne à la Maison-Blanche l’année prochaine. Un nouveau sondage du New York Times, qui fait l’effet d’une bombe, montre que les politiques de Trump sont fortement préférées à celles de Biden dans tous les groupes démographiques. Il est impossible d’imaginer que les hauts responsables démocrates et les éminences grises de leur parti restent les bras croisés face à une telle situation « cauchemardesque ».

Mais est-il légalement possible de retirer l’investiture à Joe Biden, un président en exercice qui n’a pas de sérieux rivaux dans la course à la nomination du candidat démocrate pour la présidentielle de 2024 ? La réponse est certainement non.

Cela ne signifie pas pour autant que des pressions, tant publiques que privées, ne peuvent être exercées avec tact et efficacité sur l’actuel président. Par exemple, une visite des chefs de Parti pourrait se faire à la première dame Jill Biden.

On pourrait imaginer Chuck Schumer, le leader de la majorité démocrate au Sénat, et Hakeem Jeffries, le leader de la minorité démocrate à la Chambre des représentants, se rendre secrètement à la Maison-Blanche pour implorer Mme Biden – bien connue pour son influence et sa protection du président – de les aider à empêcher son humiliation et le ternissement de son héritage. Ils lui mentionneront probablement qu’ils estiment qu’il est de leur devoir envers la nation d’empêcher une nouvelle présidence de Trump et qu’ils envisagent sérieusement d’annoncer publiquement leurs doutes dans la capacité de Joe Biden à gagner les élections présidentielles générales en novembre, et même leurs inquiétudes quant à son âge pour accomplir les fonctions présidentielles.

Pour que MM. Schumer et Jeffries réussissent dans cette mission délicate, il serait toutefois préférable qu’ils disposent d’un atout. Et ils ont déjà celle qui est bien populaire et qui s’est imposée comme le premier choix pour remplacer possiblement Joe Biden selon un récent sondage de Rasmussen Reports : il s’agit de Michelle Obama.

Une éventuelle candidature de Michelle Obama

Oubliez la nouvelle déclaration de sa porte-parole, ainsi que les accusations stupides selon lesquelles le simple fait d’évoquer la candidature de Michelle Obama revient à se laisser duper par une théorie du complot de droite. Oubliez aussi les affirmations qu’elle déteste la politique et préfère rester dans l’anonymat auprès de son mari, l’ex-président Barack Obama. On n’accepte par hasard d’accorder une interview sur un podcast qui touche des millions de personnes – comme Mme Obama l’a fait en janvier – et, si l’on a renoncé à l’arène politique, on n’affirme pas dans cette interview d’avoir passé des nuits blanches en étant « terrifiée par ce qui pourrait arriver, parce que nos dirigeants sont importants » ni que « nous ne pouvons pas considérer cette démocratie comme acquise, et parfois je crains que nous le fassions ».

La réputation de timidité et de dédain pour la politique de Michelle Obama, soigneusement entretenue, ne fait que renforcer sa popularité, et l’enthousiasme qui s’emparera d’elle lorsqu’elle deviendra le lapin que le Parti démocrate pourrait sortir de son chapeau, par exemple, lors de la convention démocrate qui se tiendra à Chicago, la ville natale de Michelle, au mois d’août. Son image bien réfléchie et étudiée est la plus intelligente des stratégies.

Outre le fait qu’elle est perçue comme étant au-dessus et éloignée des passions politiques qui divisent aujourd’hui l’Amérique – le mouvement MAGA (Rendre à l’Amérique sa grandeur) du Parti républicain contre l’aile de la gauche radicale du Parti démocrate – la nomination de Mme Obama comme, en particulier, vice-présidente de Joe Biden dans sa course présidentielle de 2024, améliorera les chances de ce dernier à la réélection. Cela permettra aussi de résoudre en douceur le problème de l’éventuel remplacement de Biden par l’actuelle et très impopulaire vice-présidente Kamala Harris qui s’est avérée être un vrai handicap pour les démocrates.

De plus, Michelle est appuyée par son mari Barack Obama qui a effectué le maximum possible de deux mandats présidentiels et qui apparaît comme un modéré dans la version 2024 du Parti démocrate radicalisé. Il jouerait simultanément les rôles de conseiller avisé et d’homme au foyer, et les électrices des banlieues qui pourraient bien décider de l’élection présidentielle de cette année vont se régaler de tout cela.

Une autre surprise ?

Un autre lapin sorti d’un autre chapeau vaut également la peine qu’on parie sur lui, étant donné les faits en sa faveur. On a entendu Donald Trump mentionner les noms de ses rivaux défaits lors des primaires républicaines qu’il pourrait choisir en tant que candidats à la vice-présidence dans sa course présidentielle : le sénateur Tim Scott de Caroline du Sud, le gouverneur Ron DeSantis de Floride, l’entrepreneur populiste Vivek Ramaswamy, ainsi que le gouverneur Kristi Noem du Dakota du Sud. Pourtant, Trump a également déclaré qu’il avait déjà choisi son vice-président – et c’est dans sa nature impétueuse et espiègle de garder pour lui le nom de son véritable choix. De plus, s’il a vraiment déjà choisi, il s’agit probablement d’une personne qu’il connaît très bien.

Sarah Huckabee Sanders qui est, à ses 41 ans, le plus jeune gouverneur du pays et qui, ayant émis des décrets interdisant la théorie critique de la race dans les écoles publiques et abrogeant les restrictions et les confinements du Covid-19, est peut-être aussi le gouverneur le plus conservateur. Lorsqu’elle occupait le poste de secrétaire de presse à la Maison-Blanche lors de la présidence de Trump, elle essuyait quotidiennement les foudres de la part de ceux que Trump aime appeler les « faux médias » (fake media). Et elle lui a été d’une loyauté sans faille depuis, le soutenant formellement en novembre dernier. La fonction traditionnelle du vice-président, qui consiste avant tout à défendre son chef, semble parfaitement convenir à Mme Sanders.

La réponse combative de Mme Sanders au discours sur l’état de l’Union prononcé par le président Biden l’année dernière commençait par une phrase qui s’adressait à ces mêmes femmes des banlieues que Michelle Obama chercherait à charmer : « Le fait d’être mère de trois jeunes enfants m’a appris à ne pas croire toutes les histoires que j’entends. Alors pardonnez-moi de ne pas croire grand-chose de ce que j’ai entendu ce soir de la part du président Biden. » Elle a récemment survécu à un cancer, ce qui ne manquera pas de susciter une certaine admiration même de ses critiques.

De plus, comme Mme Obama, Mme Sanders peut être épaulée par un sage politique – son père et prédécesseur au poste de gouverneur de l’Arkansas, l’ancien candidat à la présidence Mike Huckabee.

Si ce scénario à la fois logique et étrange se concrétise en confrontation entre Michelle et Sarah, cela signifiera que les deux grands partis américains reconnaissent que les femmes des banlieues sont la clé de la victoire en 2024 et qu’ils utilisent deux mères accomplies afin de séduire ce segment de l’électorat. Toutefois, si l’état de santé de Joe Biden et les déboires juridiques de Donald Trump (qui fait face à 4 inculpations pour un total de 91 chefs d’accusation) peuvent être neutralisés en permettant de concentrer l’attention des électeurs sur le bilan de la politique des démocrates au cours des quatre dernières années, les sondages indiquent que les républicains seront avantagés.

Mais pour cela il faudra démystifier l’idée que Michelle Obama est une version plus attrayante que celle donnée à Trump par ses partisans – un non-politicien qui a répondu à l’appel de son pays même s’il n’était pas obligé de le faire, et peut-être même qu’il n’en avait pas vraiment envie. Dans l’excitation d’un événement aussi inédit et bouleversant que l’entrée de Michelle dans la course présidentielle, il ne sera pas facile de faire éclater sa bulle.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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