Opinion
L’économie chinoise au ralenti devrait encore décélérer en 2026
Malgré les mesures de relance de Pékin, la dynamique chinoise s’est essoufflée ces derniers mois et tout indique qu’elle devrait encore s’affaiblir à l’orée de la nouvelle année.

Une ouvrière surveille une chaîne de production de soie haut de gamme au sein de l’entreprise Anhui Jingjiu Silk, à Fuyang, dans la province de l’Anhui, en Chine, le 20 octobre 2025
Photo: STR / AFP via Getty Images.
Alors que l’année 2025 touche à sa fin, le moment est peut-être venu de faire le point sur l’économie chinoise en difficulté et d’évaluer ses perspectives pour la nouvelle année. Le tableau est mitigé, comme c’est toujours le cas pour la Chine et d’autres économies.
Certains signaux sont encourageants, mais nombre de problèmes qui minent le pays depuis des années demeurent irrésolus, au premier rang desquels la crise immobilière persistante. Le diagnostic qui s’impose est que le ralentissement si manifeste ces derniers mois devrait largement dominer en 2026.
Un élément favorable au crédit de l’économie chinoise réside dans le fait que les grands promoteurs immobiliers, après un long délai, ont enfin entrepris de remettre un peu d’ordre dans des finances jusque‑là chaotiques. La restructuration de la dette est désormais engagée de manière résolue et constitue une première étape importante sur le chemin qui mène du déclin au redressement. Il ne s’agit toutefois que d’un début : il faudra au moins deux ans avant que ce secteur clé puisse de nouveau contribuer réellement au soutien de l’économie chinoise.
Un autre appui conjoncturel devrait venir de l’accord conclu récemment entre le dirigeant chinois Xi Jinping et le président américain Donald Trump, qui permet à Pékin d’échapper à la pire des surtaxes douanières et autres restrictions commerciales brandies par Washington.
Toujours au rang des facteurs positifs figure la décision de Pékin d’investir des milliards dans ce qu’il présente comme les « industries du futur » : semi‑conducteurs, produits biomédicaux, intelligence artificielle (IA), véhicules électriques (VE), batteries, informatique quantique et autres technologies de pointe. Si cette stratégie connaît déjà des écueils, elle ne peut qu’apporter une contribution à la croissance. Signe d’une autre source potentielle d’élan, le dernier plan quinquennal fait de la relance du consommateur chinois une priorité affichée.
Les interrogations demeurent toutefois lourdes sur les perspectives économiques et financières du pays. En tête de liste persiste la crise immobilière : la récente remise en état des comptes des grands promoteurs leur rend une flexibilité qui leur faisait défaut depuis l’éclatement de la crise en 2021. Mais avant de pouvoir transformer la contraction en moteur de croissance, ils devront solder, vraisemblablement à perte, les ensembles résidentiels mal conçus et aujourd’hui largement vides qu’ils ont édifiés durant les années d’euphorie précédant la pandémie de Covid‑19.
Les grands groupes immobiliers devront aussi terminer les logements qu’ils avaient prévendus sans jamais les achever, faute de moyens financiers. Ce n’est qu’une fois ces chantiers menés à bien – ce qui, selon une analyse de S&P Global, pourrait prendre jusqu’en 2027 – que la promotion immobilière pourra de nouveau apporter une contribution positive à l’activité.
L’ardeur mise par Pékin dans l’investissement technologique, qui stimule la croissance depuis 2023 et devrait continuer d’y contribuer en 2026, n’est pas sans limites. D’une part, le secteur technologique ne pèse qu’environ 10 % de l’économie et ne peut donc compenser à lui seul les pertes d’un immobilier qui, à son apogée, représentait près de 25 % du produit intérieur brut (PIB) chinois.
Plus préoccupant encore, cette vague d’investissements reste très déséquilibrée. L’essor des capacités de production dans les segments de haute technologie a largement dépassé les besoins du marché intérieur, générant une pression déflationniste qui a fait reculer les prix à la production de plus de 5 % au cours des deux dernières années. Or la déflation pèse elle‑même sur les perspectives de croissance, en incitant ménages et entreprises à différer leurs achats dans l’espoir de prix plus bas demain.
Les choix d’investissement de Pékin ont créé un autre déséquilibre. La poussée donnée à l’informatique quantique et à l’IA a surpassé la capacité du pays à produire les puces avancées indispensables à ces technologies. La situation est aggravée par les restrictions américaines à l’exportation, qui privent la Chine de la possibilité de compléter sa production nationale avec des composants sophistiqués importés, notamment auprès du groupe américain Nvidia.
La pénurie de semi‑conducteurs en Chine a imposé des bricolages industriels et conduit Pékin à s’immiscer dans l’allocation de la production du champion national, Semiconductor Manufacturing International Corporation. Ces contournements et cet arbitrage politique ralentissent l’effort technologique, le rendent moins efficace et plus vulnérable aux erreurs.
Dans le même temps, la surcapacité productive accumulée dans d’autres segments technologiques que les semi‑conducteurs – en particulier les véhicules électriques et les batteries – a renforcé la dépendance de la Chine à l’égard des marchés extérieurs. Par le passé, une telle évolution n’aurait pas forcément posé de problème majeur. Mais aujourd’hui, ce besoin accru d’exporter se heurte à une franche hostilité, aux États‑Unis comme en Europe, et jusque dans plusieurs grands pays émergents, au premier rang desquels l’Indonésie, la Malaisie et le Mexique. Et si Xi Jinping et Donald Trump se sont entendus sur une réduction partielle des droits de douane américains visant les importations chinoises, ces taxes demeurent élevées, supérieures à 40 %, soit bien davantage qu’en 2024.
Bien que le dernier plan quinquennal souligne la nécessité de soutenir le consommateur chinois, il ne prévoit pas le dispositif d’appui large que l’économie requerrait. Pékin s’est pour l’heure contenté de subventionner l’achat de véhicules et d’électroménager, une mesure qui fait bien pâle figure au regard de l’ampleur de la pression exercée sur les budgets des ménages.
Le principal frein vient de l’effet de la crise immobilière sur l’ensemble du marché résidentiel. Sous l’effet de la suroffre accumulée et de la raréfaction du financement depuis 2021, les prix de l’immobilier résidentiel ont reculé d’environ 20 % depuis le début de la crise. Dans un pays où l’essentiel du patrimoine des ménages est concentré dans la résidence principale, ce recul a durement entamé la richesse nette des familles et bridé leur consommation. Le consommateur chinois ne reviendra pas en force tant que cette tendance ne se sera pas inversée ; des subventions ponctuelles à l’équipement électroménager ne sauraient y suffire.
Cet enchaînement de facteurs défavorables n’a guère apporté de réconfort à l’économie chinoise au second semestre 2025. Le rythme de progression de la production industrielle a ralenti de près d’un tiers depuis le printemps. Selon le Bureau national des statistiques de Pékin, l’indice des directeurs d’achats (PMI) du secteur manufacturier est tombé à 49,0 en octobre, dernier mois disposant de données complètes, un niveau inférieur au seuil 50 qui marque la frontière entre expansion et contraction. L’indice jumeau des services signale, lui, une progression, mais le rythme de 4,6 % de croissance des ventes de services apparaît nettement plus lent qu’en début d’année ou qu’en 2024.
Les ventes au détail en octobre n’ont affiché qu’une hausse modeste de 2,7 % sur un an. Fait notable, les immatriculations automobiles sont, elles, reparties à la baisse, ce qui montre que le programme de subventions de Pékin – déjà trop limité pour régler le problème de fond – perd de son efficacité, y compris sur le périmètre restreint qu’il cible.
Les ventes en ligne ont, elles, vivement progressé, moins par signe d’un consommateur euphorique que parce qu’elles ont capté une part croissante de la clientèle au détriment des points de vente physiques. Sans surprise, les exportations ont reculé dans le même temps : les ventes vers les États‑Unis se sont établies 25 % en deçà de leur niveau d’il y a un an. Les flux commerciaux dans le cadre de l’initiative des « Nouvelles routes de la soie » ont partiellement compensé ce manque à gagner, mais, au total, les exportations ont tout de même reculé de 7,0 % sur un an.
L’ensemble de ces indicateurs récents et des déséquilibres qui les sous‑tendent imprime une nette inflexion baissière aux perspectives de croissance pour 2026. Ce biais pourrait être corrigé si Pékin acceptait de reconnaître la nécessité d’un plan de relance plus vaste, centré en priorité sur le consommateur chinois. Mais les orientations du dernier plan quinquennal laissent peu espérer un tel virage. L’économie chinoise est suffisamment vaste et diversifiée pour qu’un effondrement pur et simple demeure improbable, mais le scénario d’une croissance durablement ralentie paraît plus que jamais s’imposer.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Milton Ezrati, auteur, est collaborateur de la rédaction de The National Interest, une filiale du Centre d'études sur le capital humain de l'université de Buffalo (SUNY), et économiste en chef de Vested, une société de communication basée à New York. Avant de rejoindre Vested, il a été chef de la stratégie de marché et économiste pour Lord, Abbett & Co. Il écrit également fréquemment pour le City Journal et blogue régulièrement pour Forbes.
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