La récente menace de Donald Trump d’imposer des droits de douane de 50 % à l’Union européenne (UE) à partir du 9 juillet a poussé Bruxelles à agir. Les responsables européens s’empressent d’organiser des réunions avec leurs homologues américains avant la date butoir qui approche à grands pas.
Bien qu’il soit encore incertain que les négociations aboutissent à des progrès importants dans la réduction du déficit commercial américain ou dans l’allégement des obstacles de longue date aux exportations américaines, certains observateurs estiment que l’UE négocie en position de faiblesse et pourrait être plus disposée à faire des concessions cette fois-ci.
Donald Trump avait initialement annoncé que des droits de douane de 50 % sur les produits de l’UE entreraient en vigueur le 1er juin, accusant le bloc des 27 pays de ralentir les négociations. Cependant, après un entretien téléphonique avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, il a accepté de repousser la date limite au 9 juillet.
L’UE est actuellement soumise à des droits de douane américains de 10 % sur la plupart des marchandises, et de 25 % sur les automobiles, l’acier et l’aluminium. Le président américain a annoncé la semaine dernière que les tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium passeraient à 50 % à compter du 4 juin.
Dans une récente interview accordée à Epoch Times, Wilbur Ross, qui a occupé le poste de secrétaire américain au Commerce pendant le premier mandat présidentiel de Trump, a parlé des difficultés de négociations entre les États-Unis et l’UE.
« Ce n’est pas vraiment comme négocier avec un seul pays », a-t-il expliqué. « Il y a 27 États membres et chacun d’entre eux a des priorités commerciales différentes. »
M. Ross a ajouté qu’il était « très difficile » pour Bruxelles de parler d’une seule voix, ce qui rendait particulièrement difficile toute avancée significative dans les négociations commerciales.
Il a également averti qu’aucun pays ne pouvait supporter des droits de douane supérieurs à 40 % sans subir de conséquences économiques importantes. Imposer des tarifs aussi élevés à l’UE, a-t-il précisé, reviendrait à signaler que les États-Unis n’ont pas l’intention de maintenir des relations commerciales normales avec le bloc des 27.
Les inquiétudes concernant une éventuelle guerre commerciale s’intensifient en Europe. Une récente enquête menée par le Financial Times auprès d’économistes européens a révélé que 68 % d’entre eux considèrent qu’un conflit commercial avec les États-Unis est la plus grande menace pour la région.
Daniel Lacalle, économiste en chef chez Tressis, une société de gestion de patrimoine basée en Espagne, a fait écho à ces inquiétudes. Il a déclaré que les tarifs douaniers américains aussi élevés seraient « dévastateurs » pour l’économie européenne et les marchés boursiers.
« Si vous imposez des droits de douane de 50 % à l’Union européenne pendant les dix prochaines années, vous devrez vendre les actions européennes comme s’il n’y avait pas de lendemain », a-t-il confié à Epoch Times.
Barrières commerciales de l’UE
Les États-Unis et l’UE entretiennent les relations économiques bilatérales les plus importantes au monde.
Dans un long rapport détaillant les barrières au commerce extérieur, le représentant américain au Commerce (RAAC) a tracé les barrières tarifaires et non tarifaires auxquelles sont confrontés les exportateurs américains sur le marché européen.
Selon le dernier rapport annuel publié en mars, certains produits sont soumis à des taxes disproportionnées dans l’UE, tels que le poisson et les fruits de mer (jusqu’à 26 %), les camions (22 %), les vélos (14 %), les voitures de tourisme (10 %) et les engrais et plastiques (6,5 %).
En outre, de nombreux produits alimentaires transformés, tels que les confiseries et les produits de boulangerie, sont également soumis à des droits de douane complexes dans le cadre du « tableau de Meursing » de l’UE qui calcule les tarifs en fonction de la composition des produits.
Dans le cadre de ce système, l’UE applique un droit de douane à chaque produit importé en fonction de sa teneur en matière grasse laitière, en protéines laitières, en amidon et en sucre. Selon le rapport du RAAC, ce système alourdit non seulement la charge administrative, mais crée également une incertitude pour les exportateurs américains de produits alimentaires.
De plus, l’UE n’applique pas ses lois par le biais d’une administration douanière unique, ce qui complique davantage la tâche des exportateurs américains. Chaque État membre de l’UE applique la législation douanière de manière indépendante, ce qui entraîne des incohérences dans l’interprétation et l’application des lois au sein du bloc.
Les obstacles techniques au commerce de l’UE restent également un point de friction. Par exemple, l’adoption par l’Europe de normes régionales en matière de sécurité, de qualité, de protection de l’environnement, d’étiquetage et d’emballage entrave l’accès au marché des produits américains, même s’ils répondent aux normes internationales, selon le rapport du RAAC.
M. Lacalle a noté que la bureaucratie interne de l’UE ralentit non seulement l’accès au marché, mais impose également des barrières cachées sous le couvert de règles environnementales ou législatives.
« C’est une union très bureaucratique et politisée, où de nombreux fonctionnaires craignent le libre-échange », a-t-il expliqué. « Ils ne veulent pas que les entreprises américaines viennent en Europe et vendent des voitures de General Motors. Ils n’en veulent pas. »
Cependant, les responsables de l’UE sont également conscients qu’ils n’ont que peu de poids en cas de guerre commerciale avec les États-Unis, a souligné M. Lacalle.
« De toute évidence, ils ne sont pas stupides et savent qu’ils n’ont aucune arme à leur disposition. »
Un autre sujet de discorde est la taxe sur les services numériques adoptée par plusieurs pays de l’UE, ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que Donald Trump considère comme « bien plus punitive qu’un droit de douane ».
En 2024, les États-Unis ont enregistré un déficit en commerce de biens de 235,6 milliards de dollars avec l’UE, soit une augmentation de 12,9 % par rapport à 2023.
Dans un post publié le 27 mai sur Truth Social, Donald Trump a accusé les négociateurs de l’UE de faire délibérément traîner les négociations.
« J’étais extrêmement satisfait de l’attribution des droits de douane de 50 % à l’Union européenne, d’autant plus qu’ils ‘ralentissaient’ (en employant un euphémisme !) nos négociations avec eux », a-t-il écrit.
Cependant, le locataire de la Maison-Blanche s’est également montré optimiste quant à la volonté de l’UE de « fixer rapidement des dates de réunion » pour entamer les négociations avec ses responsables commerciaux.
« C’est un élément positif », a-t-il indiqué.
Pays fortement exposés
Il y a de grandes différences dans l’exposition aux droits de douane élevés entre les pays membres et les secteurs économiques de l’UE.
Daniel Lacalle a fait remarquer que les secteurs de l’automobile, de l’agriculture, des produits chimiques, du luxe et du commerce de détail en Europe dépendent fortement du marché américain et manquent d’acheteurs alternatifs.
L’Irlande est de loin le pays le plus exposé, selon un récent rapport de Bruegel, un groupe de réflexion économique basé à Bruxelles. L’économie irlandaise dépend fortement des exportations vers les États-Unis, en particulier dans les secteurs pharmaceutique, chimique, des équipements de transport et de l’alimentation et des boissons.
L’Italie est le deuxième pays le plus exposé, selon le rapport, avec des exportations importantes dans les domaines des équipements de transport, de la mode, de l’automobile et des produits pharmaceutiques.
Scott Bessent, secrétaire au Trésor et principal négociateur américain, a souligné le manque de communication et de coordination entre les 27 pays membres de l’UE.
« J’espère que cela mettra le feu aux poudres au sein de l’UE », a déclaré M. Bessent dans une récente interview accordée à Fox News, en référence aux tarifs douaniers américains de 50 % proposés par le président américain.
« L’UE a un problème d’action collective », a-t-il poursuivi. « Elle compte 27 pays, mais ceux-ci sont représentés par un seul groupe basé à Bruxelles. Ainsi, certains des commentaires que j’ai reçus indiquent que les pays concernés ne savent même pas ce que l’UE négocie en leur nom. »
Les droits de douane mondiaux annoncés par Donald Trump le 2 avril ont récemment rencontré des obstacles juridiques, étant initialement annulés par un tribunal fédéral du commerce avant d’être rétablis par une cour d’appel. Le secrétaire américain au Commerce, Howard Lutnick, a annoncé que les contestations judiciaires n’avaient pas perturbé les négociations entre les États-Unis et l’UE.
« Tous les pays qui négocient avec nous se rendent compte du pouvoir de Donald Trump et de sa capacité à protéger les travailleurs américains », a laissé entendre M. Lutnick lors d’une interview accordée à Fox News le 1er juin.
En réponse aux droits de douane américains annoncés le 2 avril, la Commission européenne, principal organe exécutif de l’UE, a approuvé des droits de douane sur 21 milliards d’euros de produits américains. Cette mesure a ensuite été suspendue après que Donald Trump a suspendu pour 90 jours ses droits de douane réciproques – une pause qui doit prendre fin le 9 juillet.
L’ancien secrétaire au Commerce Wilbur Ross estime qu’il y a peu de chances que les deux parties parviennent à un accord avant la date limite du 9 juillet. Toutefois, si les parties parviennent à une « compréhension » mutuelle, cela pourrait suffire à retarder la mise en œuvre des droits de douane américains, a-t-il souligné.
« Je pense qu’il est bon de donner un peu plus de temps à l’UE », a fait remarquer M. Ross. « J’espère simplement que ce temps sera bien utilisé. »
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