Les premières législatives syriennes de l’ère post-Assad : ce que l’on sait

Le Parlement syrien à Damas, le 1er octobre 2025.
Photo: Louai Beshara/AFP via Getty Images
La Syrie organise le 5 octobre ses premières élections législatives depuis la chute abrupte du régime de l’ancien dirigeant Bachar el-Assad, renversé par une offensive rebelle fin de l’année dernière.
La future Assemblée du peuple, qui compte 210 sièges, devrait être appelée à adopter des textes refondant des décennies de pilotage étatique de l’économie et à ratifier des traités susceptibles de redessiner les relations extérieures du pays.
Voici l’état des lieux avant le scrutin.
Le processus électoral
Le dispositif est supervisé par une commission électorale de 11 membres, nommée en juin par Ahmed al-Charaa, président intérimaire de la Syrie.
Après consultation des communautés locales, la commission a désigné des sous-commissions régionales, lesquelles ont à leur tour sélectionné les membres des collèges électoraux régionaux.
La commission a ensuite publié une liste d’environ 6000 grands électeurs, dont un cinquième devrait être des femmes, conformément aux critères retenus.
Aucune exigence minimale de représentation féminine n’est prévue au Parlement, et aucun quota n’a été défini pour les minorités ethniques ou religieuses.
Pour se présenter à un siège parlementaire, il faut d’abord avoir été sélectionné comme membre d’un collège électoral.
Selon la commission principale, une procédure d’appel a été mise en place afin de permettre aux aspirants candidats de contester les sélections opérées par les électeurs.
Toute personne soupçonnée de soutenir l’ancien régime — ou d’avoir appelé à « la sécession, la division ou … l’intervention étrangère » — se voit interdire de se présenter.
Une fois les résultats proclamés, ils seront entérinés par décret présidentiel, après quoi la nouvelle assemblée tiendra sa première séance législative.
Qui votera
De manière controversée, tous les citoyens syriens en âge de voter ne déposeront pas de bulletin le 5 octobre.
En pratique, 140 des 210 sièges seront pourvus par les collèges électoraux, tandis que les 70 restants seront directement nommés par M. al-Charaa.
Les autorités expliquent ce choix par l’absence de données démographiques fiables et par l’ampleur des déplacements de population — internes comme externes — après plus d’une décennie de conflit.
Dans des déclarations antérieures, M. al-Charaa a souligné l’impossibilité d’organiser un vote populaire en raison de la « perte de documents », rappelant que de nombreux Syriens se trouvent encore hors du pays.
La mandature de la nouvelle assemblée sera de 30 mois, période durant laquelle le gouvernement s’est engagé à préparer les conditions d’un scrutin populaire pour les prochaines législatives.
Où le vote aura lieu
Le vote ne se tiendra pas non plus sur l’ensemble du territoire, du fait de problématiques politiques et sécuritaires persistantes.
Le scrutin est indéfiniment reporté dans le Nord-Est, largement contrôlé par une administration à dominante kurde plutôt que par le gouvernement central de Damas.
Il est également indéfiniment reporté dans la province méridionale de Soueïda, où des violences confessionnelles éclatent sporadiquement entre forces gouvernementales et communauté druze locale.
Conséquence : une douzaine de sièges réservés à ces deux régions resteront vacants jusqu’à nouvel ordre.

Le président syrien Ahmed al-Charaa rencontre le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres (hors champ) en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, au siège de l’ONU à New York, le 24 septembre 2025. (KENA BETANCUR/AFP via Getty Images)
Scepticisme
M. al-Charaa, qui a par le passé entretenu des liens avec al-Qaïda et l’État islamique, une organisation terroriste, a été nommé président intérimaire en janvier.
Il dirige également le groupe Hayat Tahrir al-Cham (HTS), faction islamiste sunnite qui a mené l’offensive rebelle ayant fait tomber le régime Assad l’an dernier. Les États-Unis ont révoqué en juillet la désignation de HTS comme organisation terroriste étrangère, dans l’optique de normaliser les relations avec la Syrie post-Assad.
Depuis son arrivée au pouvoir, M. al-Charaa a été reçu — et adoubé — par plusieurs États de la région, dont la Turquie, le Qatar, l’Arabie saoudite, Bahreïn et les Émirats arabes unis.
En mai, il a également reçu reconnaissance — et éloges — du président Donald Trump lors d’une rencontre à Riyad, capitale saoudienne.
En tant que chef de l’État, M. al-Charaa a répété sa volonté de protéger les minorités ethniques et religieuses de Syrie et de promouvoir une gouvernance démocratique et inclusive.
Parallèlement, des voix doutent de cet engagement, soulignant que le processus électoral — tel que conçu par son gouvernement — paraît très centralisé, tandis que les critères d’éligibilité demeurent flous.
Dans une déclaration conjointe publiée le mois dernier, quinze organisations de la société civile ont averti que la complexité du processus pourrait permettre à l’exécutif de « dominer une institution censée être indépendante et [censée] refléter la volonté populaire ».
Avec Reuters

Adam Morrow couvre la guerre entre la Russie et l'Ukraine pour Epoch Times.
Articles actuels de l’auteur









