Opinion
Les remaniements au sein de l’armée chinoise sont le signe que l’emprise de Xi Jinping s’affaiblit

Des officiers de l'armée et de la police chinoises arrivent pour la troisième session plénière du Congrès national du peuple à Pékin, le 12 mars 2019.
Photo: Kevin Frayer/Getty Images
Le récent changement de hauts dirigeants du complexe militaro-industriel chinois a alimenté les spéculations relatives à la lutte d’influence que se livrent des factions au sein du Parti communiste chinois (PCC) à l’approche de la quatrième session plénière et du 21e congrès, au cours desquels le chef du Parti, Xi Jinping, pourrait être contraint de démissionner.
En avril, trois des dix entreprises militaires d’État chinoises ont vu leur PDG ou leur président remplacé. Selon la publication financière chinoise Caixin, depuis 2024, toutes les entreprises militaires d’État ont subi un remaniement similaire.
Avant leur remplacement, trois cadres avaient été déchus de leur statut de consultants politiques du régime : Wu Yansheng, président et secrétaire du Parti de la société chinoise des sciences et technologies aérospatiales (CASC), Liu Shiquan, président et secrétaire du Parti de Norinco, et Wang Changqing, vice-président de la société chinoise des sciences et industries aérospatiales Limited (CASIC). Ils ont été exclus de la Conférence consultative politique du peuple chinois en mars 2024.
Certains n’avaient pas été vus en public depuis longtemps, notamment Chen Guoying, ancien PDG du Groupe des industries du Sud de Chine (CSGC), et Yuan Jie, ancien président et secrétaire du Parti de la Société des sciences et de l’industrie aérospatiales de Chine (CASIC). Tous deux ont été officiellement remplacés en avril 2024, mais avaient disparu pendant des mois avant l’annonce.
Gong Bo, ancien PDG de CASIC, qui a été remplacé en avril, a été vu en public pour la dernière fois en janvier. Selon Caixin, Zeng Yi, ancien président et secrétaire du Parti du groupe chinois d’électronique (CEC), n’avait pas assisté à des événements publics pendant plus de sept mois avant d’être remplacé en avril.
Shen Ming-Shih, chercheur à l’Institut taïwanais de recherche sur la défense et la sécurité nationales et directeur de la division de recherche sur la sécurité nationale de l’institut, a fait remarquer que certains hauts responsables du PCC, comme l’ancien ministre des Affaires étrangères Qin Gang, avaient également disparu de la scène publique bien avant l’annonce de leur licenciement ou de leur arrestation.
Le PCC avait l’habitude de « shuanggui » un responsable du Parti après avoir recueilli des preuves incriminantes, a-t-il indiqué à Epoch Times, faisant référence à une procédure interne du PCC où les suspects sont tenus de se conformer aux enquêtes internes du Parti avant d’être livrés au système judiciaire :
« Ce n’est que lorsqu’il y aura des preuves concrètes que ces personnes seront démises de leurs fonctions officielles au sein du Parti. »
« Toutefois, de plus en plus d’individus font l’objet d’un traitement en interne. Lorsque Qin Gang a été arrêté et a disparu, le public ne savait pas ce qui lui été reproché. Nous avons dû attendre longtemps avant que des accusations ne soient annoncées. »
En attendant, « ces personnes ont-elles été arrêtées, empoisonnées ou se sont-elles suicidées ? Personne ne le sait », a-t-il ajouté.
M. Qin, ancien ambassadeur de Chine à Washington, a disparu de la scène publique pendant des semaines avant l’annonce officielle, en juillet 2023, de son limogeage. Sa disparition a suscité des spéculations quant au fait qu’il avait suscité l’ire des autorités du PCC pour avoir engendré un fils illégitime avec une journaliste de Hong Kong aux États-Unis, mais le PCC n’a jamais fait connaître la raison de son licenciement abrupt.
L’ancien ministre de la défense, Li Shangfu, a été démis de ses fonctions en octobre 2023, deux mois après avoir disparu de la scène publique. Il a été exclu du Parti en juin 2024 et a été accusé d’avoir accepté des pots-de-vin massifs et d’avoir « gravement pollué » le secteur de l’équipement militaire et les entreprises.
Le général He Weidong, troisième commandant de l’Armée populaire de libération (APL) de la Chine communiste, a également disparu de la scène publique depuis deux mois – le régime n’a jamais commenté les rumeurs concernant l’arrestation présumée de M. He. Au moment de la rédaction de cet article, aucun rapport sur M. He n’a été trouvé sur le site web du ministère de la défense.
Certains des cadres militaires remplacés pourraient être impliqués dans des affaires de corruption, a estimé Wang He, commentateur des affaires chinoises et collaborateur pour Epoch Times.
Depuis l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping, les ingénieurs et les scientifiques issus du secteur militaro-industriel chinois ont été de plus en plus promus. Les nouveaux technocrates de l’industrie militaire « ne sont pas propres », a souligné M. Wang à Epoch Times.
« Le système est gravement corrompu et ces personnes ont également fait preuve d’arrogance politique, ce qui leur a valu d’être prises pour cible. »
« C’est un signe de l’intensification des luttes intestines au sein du PCC. »
Selon M. Shen, le remplacement des technocrates du secteur militaro-industriel pourrait s’inscrire dans le prolongement des enquêtes sur la corruption menées ces dernières années, mais il s’agit également d’un signe de l’affaiblissement du pouvoir de Xi jinping.
« Comme Xi Jinping est en train de perdre le pouvoir, ceux qu’il a promus peuvent être remplacés si des preuves de corruption ou d’autres infractions sont apportées », et ils ont probablement été ciblés afin d’être démis de leurs fonctions avant la quatrième session plénière et le 21e congrès, a-t-il poursuivi.
L’un des anciens cadres militaires, l’ancien président et secrétaire du Parti de l’Aviation Industry Corporation of China (AVIC), Tan Ruisong, a été arrêté en février pour corruption.
Cao Jianguo, qui a été discrètement démis de ses fonctions de président et de secrétaire du Parti de l’Aero Engine Corporation of China (AECC), a été vu en public pour la dernière fois en septembre 2024. Les raisons de son remplacement ne sont pas connues. Le régime n’a pas non plus fourni d’explications sur le remplacement de Zhang Zhongyang, ancien PDG de CASC, ou de Wen Gang, ancien président et secrétaire du Parti de la China State Shipbuilding Corporation (CSSC).
M. Shen estime qu’en raison de l’opacité des enquêtes du PCC, il est probable que des personnes soient accusées à tort.
Si c’est le cas, « il y aura probablement une résistance accrue, ce qui créera une pression sur M. Xi. Et d’autres factions pourraient s’unir pour forcer M. Xi à démissionner », a-t-il ajouté.
Pour M. Wang, la corruption omniprésente dans le complexe militaro-industriel pourrait également être utilisée par les détracteurs de M. Xi comme preuve de l’échec du leader du PCC. Il a également indiqué que le régime pourrait dissimuler les enquêtes compte tenu de l’ampleur de la corruption.
« Si l’étendue réelle de la corruption était révélée, ce serait trop choquant et le moral de l’armée chinoise en souffrirait gravement », a-t-il conclu.
Yi Ru a contribué à la rédaction de cet article.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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