L’Ukraine dans l’UE: il faut éviter les promesses « ambiguës », selon un historien

Par Epoch Times avec AFP
5 mars 2022 14:56 Mis à jour: 5 mars 2022 14:56

Face aux demandes d’adhésion à l’Union européenne de l’Ukraine, de la Moldavie et de la Géorgie, les Européens doivent éviter les promesses « ambiguës » faites sous le coup de l’émotion de l’invasion russe, estime l’historien néerlandais Luuk van Middelaar.

Cette crise permet à l’UE d’affirmer à une vitesse accélérée son rôle sur la scène internationale mais, construite « sur un projet de paix », elle doit encore apprendre à « maîtriser le langage de la puissance, ce qui prendra du temps », souligne l’auteur du « Réveil politique de l’Europe ».

Question: Bruxelles devait-elle ouvrir la porte à une adhésion future de l’Ukraine, un processus aussi long que complexe ?

Réponse: « C’est une idée mise sur la table bien trop légèrement. Ce n’est évidemment pas un problème de +salle d’attente+. C’est bien plus grave. Nous sommes en pleine guerre avec une puissance nucléaire, guerre dont l’un des enjeux dans l’esprit de l’agresseur est justement la place de l’Ukraine dans l’ordre continental, l’appartenance à l’UE, l’appartenance à l’Otan. Evitons de rendre une situation complexe encore plus complexe. Il y d’autres moyens de soutenir l’Ukraine dans ce moment tragique, d’autres formules de rapprochement à lui offrir. Abstenons-nous de faire des promesses aussi ambiguës ».

Question: l’Europe est-elle enfin l’acteur géopolitique qu’elle ambitionnait de devenir depuis des années ?

Réponse: « Cette invasion qui change tout marque une nouvelle ère, un vrai tournant, tout d’abord pour l’Allemagne et donc pour l’Union européenne. Il y a eu une prise de conscience à Berlin – réarmement, soutien militaire à l’Ukraine, reconnaissance de la naïveté de la politique commerciale vis-à-vis de Moscou -. Face à Poutine, le chancelier Olaf Scholz poursuit dans les actes ce qu’Angela Merkel avait commencé dans les paroles après Trump. Maintenant les actes accompagnent les paroles. L’UE prend des sanctions à une vitesse jamais vue, finance pour la première fois des armements, accorde une protection aux réfugiés. Elle accompagne la mobilisation des esprits et la volonté de toute la société civile d’aider les Ukrainiens ».

Question:  Quelles sont les conditions pour que ce changement majeur s’inscrive dans la durée au-delà de l’émotion suscitée par la guerre ?

Réponse: « Depuis l’invasion russe déclenchée le 24 février, il y a à peine dix jours, personne n’a plus prise sur le cours de l’Histoire. Les dirigeants improvisent dans un torrent événementiel en espérant éviter le pire. Il y a une émotion collective en Europe qui traduit la volonté de se défendre, en tant que démocraties, contre un agresseur autocrate violent. Mais cette même émotion rend aussi plus difficile de trouver une issue.

L’Union européenne a pris des décisions considérables mais elles ne changent pas en soit la façon dont elle envisage sa place dans le monde.

Elle s’est toujours construite comme projet de paix, comme espace neutre, ouvert, bienveillant. A Bruxelles, les notions de pouvoir ou de frontière relevaient longtemps du tabou. Maîtriser le langage de la puissance, se comporter comme acteur parmi les acteurs prendra du temps, tant sur les plans matériel que psychologique ».

 

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