«Je ne suis pas une victime, je suis une ambassadrice» : le programme «Acid Attack Survivor» aide des centaines de personnes

Par Louise Bevan
6 juillet 2020 17:09 Mis à jour: 6 juillet 2020 17:09

Pragya Singh, originaire d’Inde, victime d’une attaque à l’acide, n’avait que 23 ans lorsqu’elle a été sauvagement agressée dans un train de nuit pendant son sommeil.

Mais plutôt que de rester une victime parmi tant d’autres de ses blessures, c’est animée d’une détermination sans faille et d’un optimisme indéfectible qu’elle a désiré aider à transformer la vie de centaines d’autres victimes à travers l’Inde.

(avec l’aimable autorisation de Pragya Singh)

L’horrible agression

Pragya s’est mariée dans sa ville natale de Varanasi, dans le nord de l’Inde, le 18 avril 2006. Douze jours plus tard, elle a dû se rendre à Delhi, la capitale indienne, pour assister à un entretien d’embauche sur le campus universitaire. Le soir même, son grand-père bien-aimé est décédé et elle a longuement hésité à partir.

« Mes parents m’ont convaincue d’aller passer mon entretien », se souvient-elle, en s’adressant par courriel à Epoch Times. « Je n’aurais probablement pas dû les écouter et rester à l’écart, car personne n’aurait pu imaginer ce qui m’attendait cette nuit-là. »

Pragya a embarqué dans un train de nuit pour Delhi. À 2 heures du matin, elle a soudainement été réveillée par une douleur atroce ; un homme , dont les parents avaient refusé la demande en mariage lui a jeté de l’acide sur le visage et le corps.

Pragya Singh avec la star vétérane de Bollywood Waheeda Rehman. (avec l’aimable autorisation de Pragya Singh)

Pragya a perdu connaissance et a passé 17 jours en soins intensifs au service des brûlés de l’hôpital Safdarjung à Delhi, oscillant entre la vie et la mort. L’attaque a laissé des brûlures sur le dos et la poitrine de Pragya, lui a fait perdre la vue d’un œil, et a endommagé son oreille et son bras gauche.

Confinée dans son lit au milieu des pleurs des autres patients et de leurs proches, Pragya a réalisé à quel point la vie est tragique pour les brûlés. Certains des patients qui pourtant avaient des brûlures relativement mineures par rapport à celles de Pragya ont contracté des infections et sont décédés ; elle a déploré la médiocrité des infrastructures de traitement des brûlés en Inde.

« Je me suis dit que Dieu m’a fait affronter cette épreuve dans la vie pour en sortir plus forte afin que je puisse aider d’autres personnes moins chanceuses que moi », a-t-elle déclaré.

Reprendre sa vie

Peu de temps après, Pragya a dû reprendre une vie normale en se réintégrant dans la société indienne. Elle a subi au total 13 opérations de chirurgie réparatrice et, un an après son traitement, elle a déménagé à Bangalore, une ville du sud de l’Inde, avec son mari pour repartir à zéro.

Cependant, Pragya a rencontré des obstacles ; elle a perdu son emploi après l’attaque à l’acide et s’est mise à se cloîtrer chez elle, loin des jugements cruels du monde extérieur.

« L’apparence physique est une chose très importante dans la vie d’aujourd’hui », dit-elle. « Malgré mes qualifications, j’ai été rejetée de plusieurs emplois en raison de mon défigurement et de mon handicap. »

(avec l’aimable autorisation de Pragya Singh)

Pragya n’en a pas été moins vilipendée en public. « Une fois, une enfant de mon quartier a dit qu’elle me détestait, qu’elle n’aimait pas mon visage […] », se souvient-elle. « Je ne blâme pas l’enfant, après tout, sa mère ne l’a pas éduquée sur ce qu’est le handicap […] ; au sourire qu’elle aurait pu lui apprendre à faire en croisant ce genre de personnes, elle lui a appris l’ignorance, l’indifférence et le mépris. »

Une fondation pour apporter le changement

Si Pragya a su persévérer dans ses combats personnels, c’est grâce à son désir inébranlable d’aider tous ceux qui étaient dans une situation similaire à la sienne. En 2013, elle a fondé une ONG, appelée Fondation Atijeevan. Avec le soutien de bénévoles, de médecins et de mécènes, la fondation a aidé à ce jour plus de 300 victimes d’attaques à l’acide.

Environ 80 % des victimes sont des femmes.

La fondation Atijeevan apporte son aide pour financer des opérations de chirurgie réparatrice, des procédures cosmétiques non chirurgicales, des conseils et des formations éducatives et professionnelles. Pour ceux qui ne peuvent pas trouver d’emploi en dehors de leur domicile, la fondation organise des expositions pour la vente d’articles faits maison.

« La fondation Atijeevan a créé également des émules et ardents défenseurs qui encouragent les autres victimes dans le monde entier à avoir le même enthousiasme et la même joie de vivre en dépit de la malveillance dont ils ont été victimes dans leur passé », a partagé Pragya.

(avec l’aimable autorisation de Pragya Singh)

À la fondation Atijeevan, Pragya dit qu’elle promeut également le concept de don de peau : « La plupart des gens ne savent même pas que l’on peut donner de la peau prélevée sur la cuisse ou le bas du dos. Ce don peut donner un nouvel élan de vie à une personne brûlée ou victime d’une attaque à l’acide. »

Selon elle, cela permet de sauver jusqu’à 80 % des brûlés

En hommage à ses innombrables efforts, Pragya a reçu le prestigieux prix Nari Shakti Puraskar, littéralement, en français : prix du Pouvoir des femmes, de la part du président de l’Inde en 2019.

Un parcours personnel

Pragya a reconnu qu’être utile à la communauté et de se donner aux autres lui a été salutaire et l’a beaucoup aidée.

La naissance de ses deux filles, Aishi et Tishya, a été une autre étape dans sa propre vie qui lui a apporté une confiance renouvelée et un sens de l’objectif à atteindre. Pragya s’inquiétait de la façon dont ses enfants allaient répondre aux questions que leur posaient les autres sur l’apparence de leur mère.

« C’était très difficile pour eux au début », explique Pragya, « mais je me suis assurée de leur faire connaître mon histoire de persévérance […]. Je me suis assurée qu’ils aient en tête la véritable version de l’histoire de leur mère. »

Pragya travaille pour soutenir les survivants d’une attaque à l’acide. (avec l’aimable autorisation de Pragya Singh)

L’union fait la force

Les victimes du programme de Pragya n’ont pas à souffrir seules en silence. La fondation Atijeevan propose des ateliers où les membres sont encouragés à partager leurs problèmes et à surmonter leurs craintes, et le succès enregistré par ces ateliers motive beaucoup d’autres victimes à y participer.

Les avantages du programme pour ces personnes qui ont vécu un tel traumatisme sont multiples. Certaines victimes ont retrouvé confiance en elles, tandis que d’autres ont été encouragées à poursuivre leurs efforts pour trouver un emploi rémunéré.

Jusqu’à présent, certaines d’entre elles ont trouvé du travail dans l’industrie informatique, le secteur de l’hôtellerie et de la restauration et l’industrie du vêtement. Quelques-unes sont également devenus des entrepreneurs à succès, tandis que d’autres sont devenues elles-mêmes des conseillères, comme Pragya.

Deux victimes d’attaques à l’acide, Deepmala et Reshma, tiennent une place à part dans le coeur de Pragya. « Elles ont toutes deux perdu la vue après l’attaque », explique-t-elle, « pourtant, après de multiples opérations, elles ont finalement retrouvé une vision partielle et ont maintenant un vrai travail […] elles se sont épanouies et sont toujours une source d’inspiration pour moi. »

Pragya Singh, avec les membres de la Fondation Atijeevan. (avec l’aimable autorisation de Pragya Singh)

Quant à ce que l’avenir réserve à Atijeevan, Pragya a déclaré qu’elle espère étendre le programme de l’ONG pour y inclure l’autodéfense et des ateliers juridiques.

« Pour moi, je suis à ma place », à partagé Pragya. « Je veux continuer à trouver des moyens d’aider les filles autour de moi à se prendre en charge, et aussi aider mes propres filles à devenir de bonnes personnes. »

Un verre à moitié plein

« La vie ne se déroule pas toujours comme prévu », a déclaré Pragya, qui a maintenant 37 ans. « Il arrive qu’elle désorganise les choses, qu’elle vous fasse mordre la poussière et vous laisse brisé […] ce peut être aussi pour vous l’occasion de prendre un nouveau départ dans une nouvelle vie. Je crois que j’ai trouvé la mienne ! »

Cette mère de deux enfants a déclaré que sa propre devise est ce qui fait sa force motrice : « Je ne suis pas une victime, je suis une ambassadrice, je dois me battre avec tous ceux qui ont besoin de mon aide en ce moment. »

« Les gens ont deux attitudes opposées », a-t-elle ajouté, « il y a ceux qui se contentent de se plaindre et ceux qui se lèvent et avancent. J’ai appris à avoir le verre à moitié plein. »

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