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« Saint François dans le désert » : la lumière du divin selon Bellini
Chef-d’œuvre énigmatique de Giovanni Bellini, St. Francis dans le désert, conservé à la Frick Collection de New York, est souvent considéré comme la plus grande peinture de la Renaissance italienne visible aux États-Unis. Le tableau représente un moment crucial de la vie de saint François : celui où il reçoit les stigmates, marques des cinq plaies du Christ crucifié.

Détail de « Saint François au désert », vers 1475-1480, par Giovanni Bellini. Collection Frick, New York.
Photo: : domaine public
Si la tradition iconographique de cet épisode est ancienne et foisonnante, l’interprétation qu’en donne Giovanni Bellini n’a pas de précédent. Réalisée vers 1475-1478, cette œuvre témoigne du génie de l’artiste, qui exploite les possibilités naissantes de la peinture à l’huile pour faire dialoguer la couleur, la lumière, l’iconographie religieuse et le monde naturel avec une intensité et une délicatesse inégalées.
Célèbre pour ses retables et ses œuvres de dévotion privée, Giovanni Bellini s’est intéressé de plus en plus, au fil de sa carrière, à l’intégration de paysages topographiques baignés de lumière naturelle dans ses compositions religieuses. Sa peinture se distingue par une constante : la capacité de traduire en image la prière et la contemplation avec une poésie silencieuse.

« Saint François d’Assise recevant les stigmates », vers le début du XIVe siècle, par Giotto di Bondone. Tempera et or sur panneau de peuplier ; 310 cm x 163 cm. Musée du Louvre, Paris. (Photo : domaine public)
Giovanni Bellini, lui, choisit une approche singulière : il place François dans un paysage rocailleux et dépouillé, baigné d’une lumière mystique, mais sans y faire apparaître l’ange. Les analyses scientifiques récentes ont confirmé qu’une bande de toile a bien été rognée sur la partie supérieure du tableau, mais tout indique qu’elle ne comportait pas la figure du séraphin.

« Saint François dans le désert », vers 1475-1480, par Giovanni Bellini. Huile sur panneau ; 125 cm x 141 cm. The Frick Collection, New York. (Photo : domaine public)
Traditionnellement, saint François est représenté à genoux, recevant les cinq stigmates. Bellini, lui, choisit de le montrer debout, les bras ouverts. Aujourd’hui, seules deux plaies sont visibles, au creux des mains. Toutefois, une analyse technique a révélé la trace d’une blessure au pied gauche, effacée par l’usure du temps et perceptible seulement à fort grossissement.
Commandé par le noble vénitien Giovanni Michiel, le tableau est demeuré à Venise pendant plus de trois siècles, au sein de plusieurs collections patriciennes. Passé ensuite entre les mains de collectionneurs français puis britanniques, il a été acquis en 1915 par l’industriel américain Henry Clay Frick pour la somme de 145.000 euros — l’équivalent d’environ 4.67 millions d’euros actuels.
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