Sanctions US: Erdogan demande le gel des avoirs en Turquie de ministres américains

4 août 2018 14:36 Mis à jour: 4 août 2018 14:45

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a demandé samedi le gel en Turquie des avoirs de responsables américains, répliquant à des sanctions similaires prises par Washington en lien avec la détention d’un pasteur américain. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a toutefois semblé vouloir freiner l’escalade de tensions entre les deux pays, pourtant alliés au sein de l’Otan, à un moment où l’économie turque déjà fragile pourrait être lourdement affectée par davantage de sanctions économiques.

« Jusqu’à hier soir nous sommes restés patients. Aujourd’hui j’en donne l’instruction : nous gèlerons les avoirs en Turquie des ministres américains de la Justice et de l’Intérieur, s’ils en ont », a déclaré M. Erdogan lors d’un discours télévisé à Ankara. Cette déclaration est une réponse directe à la décision américaine de sanctionner mercredi les ministres turcs de l’Intérieur, Süleyman Soylu, et de la Justice, Abdülhamit Gül.

Tous deux sont visés pour leur rôle présumé dans le procès qui vise Andrew Brunson, un pasteur américain accusé en Turquie d’activités « terroristes » et d’espionnage.  M. Brunson, qui nie fermement ces accusations, a été placé en résidence surveillée la semaine dernière après un an et demi de détention.

Il était toutefois peu clair samedi à quels ministres américains le président turc faisait référence : aux Etats-Unis le ministre de l’Intérieur, Ryan Zinke, est essentiellement chargé des Parcs nationaux et des affaires indiennes. M. Erdogan pourrait donc également faire référence à la ministre de la Sécurité intérieure, Kirstjen Nielsen.

Les sanctions américaines consistent en la saisie des biens et avoirs

Interrogés par l’AFP, des responsables turcs n’ont pas donné davantage de détails. Les sanctions américaines consistent en la saisie des biens et avoirs de MM Soylu et Gül, et à l’interdiction pour tout ressortissant américain de faire affaire avec ces responsables turcs. Les deux ministres ont néanmoins assuré n’avoir aucun bien aux Etats-Unis, tout comme il est peu probable que les ministres américains visés par M. Erdogan en aient en Turquie, ce qui rend ces sanctions très symboliques.

Malgré cela, elles peuvent, selon des experts, avoir un impact sur une économie turque fragilisée par une forte inflation et une monnaie affaiblie.  La livre turque s’échange depuis mercredi soir à plus de 5 TRY contre un dollar, un plus bas historique.

« Il y a un risque de nouvelles sanctions à venir qui pourraient frapper plus directement au cœur les intérêts du gouvernement turc et qui auraient le potentiel de provoquer une fuite de la livre », estime Anthony Skinner, de chez Verisk Maplecroft. M. Erdogan a ainsi semblé samedi vouloir éviter que la situation ne s’envenime d’avantage.

« Nous ne voulons pas être partie de jeux perdant-perdant. Déplacer une dispute politique et judiciaire sur le terrain économique nuit aux deux pays », a-t-il tempéré samedi. Le chef de l’Etat a également assuré que les canaux diplomatiques travaillaient « très intensément », et qu’il pensait qu’une « partie significative des sujets de désaccord seront bientôt derrière » les alliés.

Mike Pompeo a déclaré dans une conférence de presse  « le pasteur Brunson doit, rentrer aux Etats-Unis »

S’exprimant au lendemain d’une rencontre avec son homologue turc, Mevlüt Cavusoglu, en marge d’un forum régional à Singapour, le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo s’était montré optimiste samedi matin. « Il est grand temps que le pasteur Brunson soit libre, autorisé à rentrer aux Etats-Unis », avait-il déclaré dans une conférence de presse, avant le discours de M. Erdogan. « J’ai bon espoir que cela va se réaliser dans les jours à venir ».

« Ceux qui pensent pouvoir faire reculer la Turquie avec un langage menaçant et des sanctions absurdes ne connaissent pas ce pays », a déclaré M. Erdogan samedi, estimant que les sanctions américaines ne « conviennent pas à une coopération stratégique » entre Ankara et Washington.D’autres sujets épineux contribuent à tendre les rapports entre les deux pays : Ankara reproche notamment à Washington son soutien à une milice kurde en Syrie et son refus d’extrader le prédicateur Fethullah Gülen, que M. Erdogan désigne comme le cerveau du putsch avorté de juillet 2016.

Installé aux Etats-Unis depuis 1999, l’intéressé dément toute implication. De leur côté, les Etats-Unis ont vivement protesté contre l’arrestation d’employés locaux des missions américaines en Turquie, accusés d’activités « terroristes »« Compte tenu des enjeux économiques élevés pour la Turquie, un accord est plus probable qu’improbable », affirme M. Skinner. « M. Erdogan a un bilan inégalé en matière de jeu avec le feu, mais il sait aussi lorsqu’il a avancé trop loin sur les charbons ».

DC avec AFP

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