Selon le procureur général de Chongqing, il n’y a « aucune loi contre le Falun Gong »

30 décembre 2016 18:33 Mis à jour: 30 décembre 2016 18:33

Lors d’une récente audience tenue dans le sud-ouest de la Chine, un procureur a laissé entendre qu’il ne trouvait aucune loi pour justifier la répression de la discipline spirituelle du Falun Gong. Cette déclaration est très surprenante dans un contexte de criminalisation systématique et d’attaques officielles brutales envers les pratiquants de cette école de méditation, depuis deux décennies déjà.

Nous n’avons aucun élément prouvant que le Falun Gong est une religion hérétique.

Le 23 décembre dernier, Zhang Jun, un pratiquant, et son avocat ont assisté à une audience au tribunal de Ba’nan, dans la ville chinoise de Chongqing, selon Minghui.org, un site d’information sur le Falun Gong. Zhang Jun avait été arrêté le 24 mai pour avoir renseigné d’autres personnes sur son école, et sa persécution.

Après le plaidoyer de l’avocat de Zhang Jun, un mandataire de Chongqing l’a vigoureusement soutenu en s’attaquant à la validité du dossier. Au procureur général de déclarer alors: « Nous n’avons aucun élément prouvant que le Falun Gong est une religion hérétique et nous n’avons pas trouvé de lois ou de règlements stipulant que le Falun Gong est une religion hérétique. »

« Religion hérétique », le procureur utilisait la désignation officiellement en usage depuis octobre 1999 (quatre mois après le lancement de la persécution nationale) pour cibler le mouvement spirituel.

Selon le site Minghui.org, sa déclaration a été enregistrée dans la procédure judiciaire, qu’il a signée conforme à la fin de l’audience. Pour des raisons de sécurité, Minghui.org n’a pas divulgué l’identité de l’avocat de Zhang Jun.

Cette déclaration du procureur marque une rupture car elle constitue la première reconnaissance, lors d’une audience, du fait que la campagne de répression contre les pratiquants de Falun Gong, qui dure depuis dix-sept ans, est illégale. L’appareil judiciaire chinois poursuit les pratiquants en vertu de l’article 300 du code pénal chinois: « Utiliser une religion hérétique pour saper l’application de la loi. »

Or ce sont les mesures attaquant la pratique qui ont généralement fonctionné en dehors de toute légalité : pertes d’emplois, vol des biens, enlèvements, classes de « rééducation » forcées, tortures extrêmes et, selon les observateurs, prélèvements d’organes.

Pour les avocats chinois qui défendent les pratiquants dans les tribunaux, l’article 300 est trop vague, voire anticonstitutionnel. Pendant des années, la remise en cause de sa valeur pénale fut le noyau de leur stratégie de défense.

Dans le cas du pratiquant Zhang Jun, par exemple, le procureur a consigné les cartes mémoire et les clés USB trouvées dans sa maison comme pièces à conviction.

Mais l’avocat de la défense a soutenu que les dispositifs de stockage numérique ne pouvaient pas être retenus contre son client, selon le droit chinois, car leur contenu était facilement altérable. D’autre part les documents du Falun Gong qui « encouragent les personnes à être bienveillantes et à clarifier les faits (relatifs à la persécution) », agissaient, selon lui,  pour le bien de la société. Par conséquent, les « dites preuves » montraient que son client n’était pas coupable.

Selon Yiyang Xia, Premier directeur à la recherche et à la politique de la Human Rights Law Foundation, un cabinet juridique de Washington (en charge de plaintes contre de nombreux responsables chinois pour crimes contre l’humanité) ; le fait que le procureur général ne trouve pas de base pénale pour étiqueter le Falun Gong comme une « religion hérétique » signifie qu’il ne peut plus recourir à l’article 300 contre Zhang Jun.

« Le procureur, en s’attachant aux faits, a montré que la persécution n’est pas conforme au droit, mais à une campagne politique, comme l’ont soutenu les pratiquants de Falun Gong depuis le début de la persécution », a-t-il ajouté.

Pour Yiyang Xia, le procureur s’est vraisemblablement exprimé à titre personnel ; il ne s’agit pas encore d’une preuve de transformation en profondeur de la politique officielle.

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Jiang Zemin, l’ancien dirigeant du Parti communiste chinois, a ordonné la persécution du Falun Gong le 20 juillet 1999 et s’est servi de l’appel pacifique de dix-mille pratiquants à Pékin, en avril, pour argumenter le fait que le mouvement spirituel menaçait la stabilité du Parti. Avant la persécution, 70 à 100 millions de Chinois pratiquaient le Falun Gong dans le pays (selon les sources à la fois du Parti communiste et du Falun Gong).

Selon Xie Weidong, un ancien juge de la Cour populaire suprême qui vit maintenant au Canada, le procureur de Chongqin a écouté sa conscience mais il s’est aussi protégé. En effet, l’administration de Xi Jinping a mis en place des réformes juridiques tenant les magistrats pour responsables en cas de mauvais arbitrages des dossiers.

La répression contre le Falun Gong a toujours représenté un enjeu politique élevé, soudain mise à l’index, chacun risquerait d’avoir à rendre compte de ses décisions.

Xie souligne qu’en Chine, une grande partie du parquet a commencé à recourir aux « preuves insuffisantes » dans les cas du Falun Gong. Il nous explique que les représentants de la sécurité publique n’ont aucune base légale pour engager des poursuites et les pratiquants sont finalement libérés.

Ce schéma a été identifié dans un récent rapport de Minghui.org, qui a noté plusieurs cas similaires en 2016.

Tant que durera le Parti communiste chinois, il n’y aura pas de véritable liberté de croyance.

Selon Yu Wensheng, un avocat des droits de l’homme, installé à Pékin et qui a traité de nombreux cas de pratiquants, les fonctionnaires chinois comprennent mieux à présent le Falun Gong et sa légalité en Chine, après avoir écouté les explications juridiques et les plaidoyers des avocats des droits chinois sur une longue période de temps. C’est pourquoi, explique-t-il, certains fonctionnaires, suivant leur conscience, ont rendu des décisions favorables dans les cas du Falun Gong.

Mais ces quelques exemples positifs ne prouvent en rien un assouplissement de la part du régime dans sa persécution du mouvement spirituel, a rappelé Yu Wengsheng, énumérant plusieurs arrestations massives ayant eu lieu ces dernières années. Encore très récemment, le 7 décembre, la police de la ville de Tianjin, dans l’est, a arrêté près de 20 pratiquants.

« Tant que durera le Parti communiste chinois, il n’y aura pas de véritable liberté de croyance », a-t-il précisé.

En effet, malgré les singuliers propos du procureur, le verdict dans l’affaire du pratiquant Zhang Jun n’est pas encore tombée.

Le juge a ajourné le procès du 23 décembre, c’était la deuxième audience depuis l’arrestation, mais il ne l’a pas acquitté pour autant.

Le pratiquant est actuellement retenu dans le centre de détention du district de Ba’nan et attend la décision qui le libérera ou le condamnera.

Version originale: Chinese Public Prosecutor Admits ‘No Laws Against Falun Gong’

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