Un nombre alarmant d’enfants et d’adolescents disparaissent en Chine

Des parents inquiets craignent des prélèvements d'organes forcés

Par Mary Hong
19 décembre 2022 12:19 Mis à jour: 19 décembre 2022 12:19

Il y a près de deux mois, Hu Xinyu, 15 ans, s’est volatilisé de son internat dans la province du Jiangxi, dans l’est de la Chine, alors qu’il se rendait à pied de son dortoir à une séance d’étude du soir. Il a peut-être disparu en traversant un court tronçon du campus qui n’était pas couvert par les caméras de sécurité. Cependant, les images des caméras de sécurité de l’école de la soirée ont mystérieusement disparu.

L’affaire du 14 octobre a captivé la nation alors que la police passait l’école au peigne fin à la recherche d’indices, vidant son lac et sa fosse septique.

Hu Xinyu n’était que le dernier d’une liste croissante de jeunes disparus ces derniers mois. Les parents inquiets craignent que leurs enfants ne soient victimes de prélèvements forcés d’organes, car le commerce de la transplantation d’organes en Chine prospère à une échelle ignorée dans le reste du monde.

De nombreuses rumeurs

Les rumeurs abondent concernant la disparition de Hu Xinyu. Il semblerait que le jeune homme de 15 ans ait passé un examen médical peu avant sa disparition. Un rapport affirme qu’il avait un groupe sanguin rare, correspondant à celui d’une personne ayant besoin d’une greffe d’organe.

Selon un autre rapport, un proche a trouvé dans ses affaires une note indiquant des sentiments suicidaires – mais la note n’était pas écrite de la main de l’adolescent, elle a donc pu être falsifiée.

Les médias chinois ont déclaré que six véhicules ont quitté l’école cette nuit-là.

De plus, bien que Hu Xinyu ait été porté disparu avant 18 heures, ses parents n’ont pas été informés de sa disparition avant 23h40 ce soir-là.

Ce qui est étrange, c’est que dans un pays doté du système de vidéosurveillance le plus avancé au monde, un étudiant ait pu disparaître sans laisser de trace.

Les dernières images de sécurité disponibles montrent Hu Xinyu marchant dans un couloir vers 17h50. Les autres images des caméras de sécurité de la soirée sont mystérieusement absentes. En outre, pour atteindre le bâtiment des classes, le garçon a dû traverser une distance d’environ 100 mètres qui n’était pas couverte par les caméras.

Une liste de cas qui s’allonge

Il ne s’agit pas de cas isolés. Le 19 novembre, le journaliste indépendant chinois Zhang Zhou a publié sur Weibo une liste partielle des jeunes qui ont disparu depuis juillet.

Zhang Zhou a enregistré un total de 21 disparitions entre le 15 juillet et le 11 novembre. Les jeunes disparus avaient entre 8 et 17 ans et comprenaient 12 filles et 9 garçons, originaires de 12 provinces. Onze de ces disparitions ont eu lieu au cours des deux premières semaines de novembre seulement.

Le message de Zhang Zhou a été supprimé depuis.

Une autre disparition récente est celle de Liu Aocheng, un garçon de 14 ans de Wuhan, qui a disparu le soir du 12 novembre alors qu’il sortait les poubelles.

Le 21 novembre, la police aurait retrouvé le corps du garçon dans la rivière, mais n’aurait pas laissé les parents voir le corps. Une rumeur a circulé sur Internet selon laquelle il manquerait des organes au corps.

Shen Hao, fondateur du site de recherche de personnes disparues XRQS.com, le 31 mars 2007. (China Photos/Getty Images)

Les transplantations d’organes pédiatriques se multiplient

Les parents chinois dont les enfants ont disparu craignent le pire : que leurs proches soient devenus une source d’organes pour le marché chinois des transplantations d’organes, en pleine expansion.

Au cours du dernier quart de siècle, la Chine est devenue un centre mondial de transplantation d’organes et se classe au premier rang en Asie pour le nombre de transplantations d’organes. Selon les données citées dans un témoignage devant la Chambre des représentants des États-Unis en 2021, il y a eu 19.454 transplantations d’organes en Chine en 2019 (pdf).

Ces greffes profitent aux Chinois fortunés, ainsi qu’aux étrangers qui ont fait du pays une destination pour le tourisme de transplantation.

En outre, ces dernières années, les transplantations d’organes pédiatriques en Chine ont explosé.

Triple transplantation cardiaque pédiatrique : une première mondiale

Le 7 novembre, un hôpital chinois a annoncé qu’il avait réalisé trois transplantations cardiaques pédiatriques en une journée. « C’est la première fois au monde », s’est flatté le Wuhan Union Hospital, qui a effectué les opérations.

Selon un article du média en ligne chinois Healthcare, une équipe médicale dirigée par les chirurgiens cardiovasculaires Dong Nianguo et Xia Jiahong a réussi à implanter des cœurs dans trois enfants, âgés respectivement de 3 ans, 11 ans et 12 ans. Les cœurs des donneurs provenaient de Beijing, Guangzhou et Nanning.

Selon l’article, l’hôpital a été informé le 6 novembre que trois cœurs compatibles étaient disponibles. L’hôpital a envoyé trois « équipes de protection du cœur » pour récupérer les organes donnés en vue des transplantations, qui ont été réalisées sur une période de sept heures le 7 novembre.

L’article ne précise pas comment les cœurs ont été obtenus ni comment les donneurs ont été appariés aux receveurs. On peut supposer que les trois enfants donneurs sont morts à peu près au même moment, compte tenu de la courte période pendant laquelle le cœur d’un donneur peut survivre à l’extérieur du corps.

Les progrès de la transplantation rénale

L’hôpital pour enfants de l’université médicale de Chongqing est un autre exemple des prouesses de la Chine dans le domaine des transplantations.

Selon la source d’information Internet chinoise Sohu.com, l’hôpital a récemment annoncé qu’il avait été agréé en tant que centre de transplantation rénale pour enfants. L’hôpital peut se vanter d’avoir le plus grand service de transplantation rénale dans un établissement pédiatrique en Chine, avec la capacité de réaliser six transplantations rénales en même temps.

En octobre dernier, l’hôpital a effectué sa première transplantation rénale sur trois enfants atteints de néphrite chronique. Le rapport chinois ne dit rien non plus de la source de l’organe.

Panneau à l’aéroport de Kashgar, indiquant « Passagers spéciaux, voie d’exportation d’organes humains », au Xinjiang, dans la région autonome ouïgoure de Chine. Photo d’Enver Tohti, qui a été contraint de prélever des organes en Chine. Cet ancien chirurgien dénonce aujourd’hui les méfaits du commerce de transplantation en Chine. (Avec l’aimable autorisation d’Enver Tohti)

Le premier hôpital affilié à l’université de Zhengzhou est également réputé pour son travail dans le domaine des transplantations rénales. Le nombre d’interventions chirurgicales réalisées à l’hôpital se classe au premier rang en Chine depuis plusieurs années consécutives ; rien qu’en 2021, 109 transplantations rénales pédiatriques ont été enregistrées, selon l’hôpital.

Les progrès de la transplantation hépatique

Outre les greffes de cœur et de rein, les greffes de foie pour enfants se sont développées à une vitesse étonnante en Chine.

L’hôpital Renji (Renji), affilié à la faculté de médecine de l’université Jiao Tong de Shanghai, a réalisé sa 3000e transplantation hépatique pédiatrique avec donneur vivant le 22 octobre.

Pour mettre cela en perspective, l’UCLA Health de Los Angeles, leader mondial, a réalisé plus de 900 transplantations hépatiques pédiatriques.

L’hôpital Renji a mis 11 ans – d’octobre 2006 à août 2017 – pour réaliser ses 1000 premières transplantations. D’août 2017 à octobre 2019, soit deux ans et deux mois, l’hôpital a réalisé son deuxième millier de transplantations, avec une moyenne de 1,24 opération par jour.

Prix fixé pour les organes

Le Parti communiste chinois (PCC) encourage la transplantation d’organes sur différents fronts.

En juillet 2021, le régime chinois a publié des directives concernant les frais encourus lors de l’obtention d’organes. Ces frais normalisés couvrent les coûts de la transplantation, depuis les dépenses liées au donneur jusqu’aux coûts d’acquisition, de conservation, de distribution, d’inspection, de transport et de système d’information.

Cette mesure a suscité des critiques, selon un article de Radio Free Asia, les commentateurs accusant le régime chinois d’encourager le meurtre pour l’obtention d’organes et le trafic d’enfants et de groupes vulnérables.

À la suite de la directive nationale, certaines autorités locales ont ensuite publié leurs propres normes. Fin 2021, la province du Henan a fait la une des journaux pour avoir publié une liste de ses « normes de prix des organes« , fixant le prix de 14 organes et parties d’organes, le foie d’un adulte étant le plus cher à 260.000 yuans (environ 35.000 euros), tandis que le foie d’un enfant était vendu 100.000 yuans (environ 13.500 euros).

Un aperçu des quelque 700 hôpitaux de transplantation que compte la Chine. Au centre : transport d’organes dans un hôpital de la province du Henan, le 16 août 2012. (Epoch Times)

Les travaux de recherche passés au crible

L’industrie chinoise de la transplantation d’organes attire l’attention depuis des années, car on craint que les prisonniers et les membres de groupes persécutés ne soient utilisés comme banques d’organes vivants. Ces préoccupations ont été exprimées par des défenseurs des droits de l’homme ainsi que par des membres de la communauté universitaire.

Sous le feu des projecteurs, le régime chinois a interdit en janvier 2015 la pratique du prélèvement d’organes sur les prisonniers et a mis en place un système de dons volontaires.

Cependant, les doutes ont persisté. En février 2017, Mario Mondelli, rédacteur en chef de la revue Liver International, a rétracté un article chinois sur la transplantation hépatique. L’article analysait 563 transplantations hépatiques consécutives réalisées par Shusen Zheng et Sheng Yan, du premier hôpital affilié de l’université de Zhejiang à Hangzhou, en Chine.

Les auteurs n’ont pas divulgué l’origine des organes, selon Mario Mondelli. Ils « feront l’objet d’un ’embargo à vie’ les empêchant de soumettre leurs travaux à Liver International », a rapporté Science magazine.

Banques de « donneurs » d’organes vivants

En 2014, l’Organisation mondiale pour enquêter sur la persécution du Falun Gong (WOIPFG), basée aux États-Unis, a publié une analyse des articles de recherche médicale en Chine. L’analyse a étudié plus de 300 articles de recherche médicale provenant de plus de 200 hôpitaux dans 31 provinces et municipalités de Chine.

Le WOIPFG a analysé des données telles que le sexe, l’âge, l’état de santé et la cause du décès du « donneur », la procédure utilisée pour le prélèvement d’organes, les données sur les temps d’ischémie chaude et froide, et le calendrier des transplantations d’organes.

L’organisation a conclu que la Chine utilisait de grandes banques de « donneurs » d’organes, composées de personnes vivantes.

En outre, son rapport indiquait que l’industrie « florissante » de la transplantation en Chine reposait principalement sur la persécution du Falun Gong.

Ce groupe spirituel, qui utilise des pratiques méditatives basées sur les traditions bouddhistes, est systématiquement persécuté par le PCC depuis 1999. De nombreux éléments montrent que le régime a ciblé les pratiquants du Falun Gong pour leurs organes.

De 2000 à 2008, en particulier, un nombre considérable de pratiquants du Falun Gong ont été détenus et « tués à la demande pour leurs organes », selon l’étude du WOIPFG.

China Tribunal : le Falun Gong, une cible privilégiée

Le China Tribunal, un tribunal indépendant créé pour examiner la question, a déclaré dans un jugement de 2020 qu’il disposait de preuves évidentes de prélèvements d’organes forcés sur au moins 20 ans, le Falun Gong étant une cible principale, ainsi que les Ouïghours musulmans.

Le jugement du Tribunal a conclu que « les prélèvements forcés d’organes ont été commis pendant des années dans toute la Chine à une échelle importante » et que « les pratiquants du Falun Gong ont été une – et probablement la principale – source d’approvisionnement en organes ».

Le rapport ajoute que « la persécution et les tests médicaux concertés » de la minorité ouïghoure sont également préoccupants et que « des preuves de prélèvements d’organes forcés sur ce groupe pourraient apparaître en temps voulu. »

Défilé pour commémorer le 23e anniversaire de la persécution du Falun Gong en Chine, dans le quartier chinois de New York, le 10 juillet 2022. (Larry Dye/Epoch Times)

La récolte d’organes motivée par le profit

Dans une interview accordée à NTD TV le 25 novembre, le commentateur des affaires chinoises Heng He a expliqué que le commerce des transplantations d’organes en Chine n’est pas une entreprise privée : il est rendu possible par le système politique et juridique du PCC. Les réalisations de la médecine chinoise dans le domaine de la transplantation d’organes sont rendues possibles par le soutien de l’appareil d’État chinois, a affirmé Heng He.

La demande d’organes motivée par le profit a élargi le cercle des personnes menacées par l’industrie chinoise de la transplantation. Elle inclut désormais non seulement les pratiquants de Falun Gong persécutés, mais aussi de nombreux autres groupes vulnérables, notamment des enfants et des adolescents.

Heng He a proposé une explication pour le nombre croissant de cas d’enfants disparus non résolus en Chine.

La police s’efforce de ne pas résoudre l’affaire, a-t-il déclaré, « car une fois l’affaire résolue, [un policier] ne peut pas s’expliquer devant son supérieur ». En d’autres termes, résoudre l’affaire exposera une énorme chaîne d’intérêts derrière le crime, y compris des fonctionnaires corrompus. La résolution d’une seule affaire révélera un énorme organisation de criminels.

Yi Fan, Zhang Zhongyuan, Xia Song et Luo Ya ont contribué à ce rapport.

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