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Constantino Brumidi : « le Michel-Ange du Capitole »

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« La Liberté » par Constantino Brumidi. Le portrait de M. Brumidi a été réalisé par Matthew Benjamin Brady. Archives nationales.

Photo: Domaine public

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Durée de lecture: 11 Min.

Constantino Brumidi est arrivé aux États-Unis en septembre 1852, fuyant les troubles en Europe. Il a connu la violence engendrée par d’insolubles différents politiques et la brutalité d’un régime oppressif. Il a été emprisonné en partie pour sa participation à une rébellion pour la liberté et la réforme.
Libéré par le pape Pie IX à la condition de quitter l’Italie, l’artiste de 47 ans a émigré vers une jeune nation pleine de promesses et de possibilités, à l’autre bout du monde. Très vite, le peintre gréco-italien est devenu un fervent défenseur des vertus de la démocratie américaine et un ardent et fier défenseur des libertés et des fondements qui en faisaient un contraste si prometteur avec le pays qui l’avait banni.
Dans les annales des artistes américains, son nom est, en grande partie, méconnu, mais ses œuvres les plus belles et les plus ambitieuses se trouvent au Capitole de Washington aux États-Unis. Il y a travaillé sur divers projets pendant 25 ans, sous six mandats présidentiels, de Franklin Pierce à Rutherford B. Hayes. Ses peintures continuent d’être admirées et appréciées chaque jour par des milliers de visiteurs.

Portrait de Constantino Brumidi, 1865, par Alexander Gardner. Département des collections d’images, Bibliothèque de la National Gallery of Art, Washington. (Domaine public)

Un peintre de fresques arrive en Amérique
Né en 1805 à Rome, Constantino Brumidi semblait destiné à devenir un artiste talentueux et un excellent fresquiste. Dès son enfance, il a étudié de longues heures et journées à Rome et a reçu l’enseignement de certaines des plus grandes écoles d’art d’Italie. Il a reçu une formation formelle en peinture et en sculpture auprès de maîtres renommés, notamment auprès du sculpteur dano-islandais Bertel Thorvaldsen, résident de longue date en Italie ; d’Antonio Canova, un sculpteur néoclassique réputé pour ses sculptures en marbre ; et du baron Vincenzo Camuccini, l’un des peintres les plus éminents de son époque.
De plus, M. Brumidi a appris à maîtriser les techniques picturales classiques et de la Renaissance, comme la véritable fresque, ou « buon fresco », peinture sur plâtre humide avec des pigments à base d’eau. Il a été fortement influencé par les plus grands peintres de la Renaissance italienne, dont Raphaël, un maître de la fresque.
Dans les années 1840, il a été chargé de réaliser des fresques et de décorer la villa et le palais du prince Torlonia à Rome. Ensuite, il a travaillé pour le Vatican pendant trois ans sous le pape Grégoire XVI, restaurant des fresques du palais du Vatican et décorant des églises et des palais romains.
Constantino Brumidi a été pris dans les activités tumultueuses qui ont assiégé l’Italie de 1848 à 1849, au cours desquelles il a rejoint la République romaine, un État transitoire et révolutionnaire s’opposant aux pouvoirs temporels du pape.
Après le retour au pouvoir du pape, M. Brumidi a été jugé pour son rôle dans le mouvement et poursuivi pour avoir retiré des œuvres d’art de valeur d’églises de divers endroits, ce qu’il a affirmé avoir fait pour les protéger du vandalisme. Il a été reconnu coupable et condamné à 18 ans de prison. Cependant, il n’a purgé que 14 mois avant d’être gracié sous condition par le pape Pie IX.
Artiste et citoyen américain
Constantino Brumidi a accepté de quitter l’Italie pour obtenir sa grâce et a ensuite émigré aux États-Unis. sa façon de penser était celle de l’Ancien Monde, mais il est venu avec une ouverture d’esprit au Nouveau Monde. Il est arrivé à New York avec un savoir considérable et des souvenirs vivaces des troubles qui avaient déchiré sa terre natale. Mais, plus important encore, il apportait avec lui les techniques traditionnelles de la fresque, une méthode pratiquement inconnue à l’époque dans cette nation de substitution.
Désireux d’adopter une nouvelle identité, il a demandé la nationalité américaine dès son arrivée et, impatient de mettre à profit ses anciennes compétences, il a reçu rapidement des commandes privées et religieuses à New York et dans le Massachusetts. Par la suite, l’artiste a peint des retables et des fresques murales dans des églises de Philadelphie et de Baltimore, et a décoré la salle d’entrée de Saleaudo, une maison située dans le comté de Frederick, dans le Maryland.
Le talent et les qualités personnelles de M. Brumidi lui ont permis de nouer des contacts et des relations avec des personnes influentes qui l’ont aidé à exploiter ses talents, à faire progresser sa carrière et à partager publiquement sa passion et son goût pour les beaux-arts. Par la suite, il a été chargé de missions importantes, mettant ses compétences à profit avec un engagement singulier pour sublimer l’esthétique de l’un des plus importants bâtiments publics américains.

La représentation de la Liberté, réalisée par Constantino Brumidi en 1869, est accrochée au plafond du hall d’entrée de la Maison-Blanche. Association historique de la Maison-Blanche. (Domaine public)

« Le Michel-Ange du Capitole »
En 1854, il a été engagé comme chef peintre de fresques du Capitole des États-Unis à Washington D.C. par le capitaine Montgomery C. Meigs (1816-1892), un éminent officier de l’armée américaine. Sa première œuvre au Capitole a été une peinture murale d’essai dans la salle du Comité de l’agriculture de la Chambre des représentants. Les travaux ont commencé en 1855, et il était initialement payé l’équivalent de 7 euros par jour. La fresque Calling of Cincinnatus From the Plow (Cincinnatus à la charrue appelé par le Sénat), qui représente des portraits de George Washington en « Cincinnatus américain » et fait allusion à l’importance de l’agriculture pour l’autodétermination, est reconnue comme le plus ancien exemple de véritable fresque en Amérique. La fresque se trouve aujourd’hui dans la salle H-144 du Capitole des États-Unis.
De cette première fresque du Capitole jusqu’à sa mort, M. Brumidi n’a cessé de peindre des fresques et des peintures murales au Capitole. Poussé par plus qu’un simple ensemble de désirs artistiques et professionnels, l’artiste a exprimé un désir ardent d’embellir le Capitole à partir d’une forte affiliation politique et nationale : « Ma seule ambition et ma prière quotidienne est que je puisse vivre assez longtemps pour embellir le Capitole du seul pays sur terre dans lequel il y a de la liberté. »
Au fil des ans, l’attachement de M. Brumidi à son pays d’adoption s’est renforcé. Cinq ans après sa demande, sa naturalisation américaine lui a été accordée en 1857, signant désormais couramment ses œuvres « C. Brumidi, artiste, citoyen des États-Unis ».
On lui a confié la décoration d’autres salles et couloirs du Capitole, notamment une série de cinq couloirs richement décorés au premier étage de l’aile du Sénat. On les appelle les « couloirs Brumidi ».
Ses plus grandes contributions sont cependant largement considérées comme L’Apothéose de Washington et La Frise de l’histoire américaine.

L’Apothéose de Washington, 1865, par Constantino Brumidi. Fresque (Crédit photo Architecte du Capitole)

Classique par son sujet et artistique par sa réalisation, L’Apothéose de Washington est un excellent exemple du talent nuancé de Constantino Brumidi. Située sur la verrière de la rotonde du Capitole, l’œuvre, achevée en 1865, représente Washington en uniforme militaire, s’élevant vers le ciel, entouré de 13 figures féminines symbolisant les Treize Colonies originelles.
En 1878, M. Brumidi a commencé à peindre La Frise de l’histoire américaine, qui dépeint chronologiquement les événements majeurs de l’histoire américaine, en commençant par le débarquement de Christophe Colomb en 1492. Cependant, il est mort avant d’avoir achevé la frise, et les artistes Filippo Costaggini (1839-1904) et Allyn Cox (1896-1982) l’ont réalisée d’après les dessins de M. Brumidi.

La Frise de l’histoire américaine, par Constantino Brumidi, dans la rotonde du Capitole (Ingfbruno/CC BY-SA 3.0)

En avril 1879, un journaliste du Washington Post a interviewé M. Brumidi alors qu’il travaillait sur La Frise de l’histoire américaine. Remarquant la fragilité physique de l’homme de 73 ans, le journaliste lui a demandé si un tel travail acharné était au-dessus de ses forces.
Soulignant son dévouement à son art, à son pays et au Capitole des États-Unis, M. Brumidi a répondu : « Oh non, je ne suis plus aussi fort qu’auparavant. Je ne peux ni marcher ni me tenir debout, mais mon bras n’a rien perdu ; ma main et mon œil sont aussi bons que jamais. C’est l’œuvre de toute une vie. »
Quelques mois plus tard, M. Brumidi est mort à Washington, le 19 février 1880. Sa tombe, anonyme, au cimetière de Glenwood, est restée ainsi pendant 72 ans, jusqu’à sa redécouverte. Une stèle y a été apposée le 19 février 1952.
À titre posthume, le Congrès lui a décerné la Médaille d’or du Congrès en 2008, en reconnaissance de ses contributions éminentes au Capitole des États-Unis. Le Capitole demeure un monument permanent à l’impressionnante maîtrise et à l’imagination de ce grand artiste et citoyen dévoué.
Brian D'Ambrosio est un auteur prolifique de livres et d'articles de non-fiction. Il est spécialisé dans les histoires, les biographies et les profils d'acteurs et de musiciens. L'un de ses précédents livres, « Warrior in the Ring », une biographie du champion du monde de boxe Marvin Camel, est actuellement en cours d'adaptation pour le grand écran.

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