La Chine en aurait-elle vraiment plus que pour dix ans?

Par John Mac Ghlionn
15 février 2023 06:00 Mis à jour: 15 février 2023 12:26

Lors d’une récente interview avec l’animateur Joe Rogan, l’analyste géopolitique Peter Zeihan a fait un commentaire qui a surpris plus d’un auditeur. Selon lui, la Chine n’aurait plus que 10 ans devant elle avant un grand tournant. Une décennie avant quel tournant, exactement ? Pour faire court, celui de l’effondrement et de la disparition.

En raison de la bombe à retardement démographique du pays, du gonflement de la bulle immobilière, des manifestations contre les confinements, et du taux de chômage élevé chez les jeunes Chinois, le Parti communiste chinois (PCC) devra dire adieu à ses rêves de domination mondiale. C’est du moins la thèse soutenue par Peter Zeihan.

Cependant, on ne peut s’empêcher de penser que M. Zeihan est, pour le moins, un peu trop optimiste. Il n’a pas nécessairement tort. Mais l’idée que la Chine sera une moindre menace en 2033 semble un peu trop optimiste. Comme l’a récemment noté le Pew Research Center, la population de la Chine passera de 1,4 milliard d’habitants actuellement à 1,313 milliard d’ici 2050. En 2100, ce nombre tombera à 800 millions. Le déclin démographique de la Chine est indiscutable. Cependant, l’année 2100 est encore loin. La Chine a encore quelques décennies devant elle pour semer le trouble.

D’ailleurs, lors d’une interview de Chris Williamson diffusée en janvier, le spécialiste en analyse de données Stephen J. Shaw a livré un certain nombre de dures vérités. En ce qui concerne le déclin démographique, a-t-il tempéré, tous nos pays sont logés à la même enseigne. Certes, des pays comme la Chine, le Japon et la Corée du Sud sont les premiers, mais l’Italie, l’Allemagne et les États-Unis se trouvent juste derrière. Nous allons tous dans la même direction, certains plus vite que d’autres.

Comme l’a démontré le récent épisode du ballon espion, la Chine reste aujourd’hui une force majeure avec laquelle il faut compter, et il y a très peu de raisons, voire aucune, de penser que sa puissance diminuera au cours de la prochaine décennie. Certains analystes estiment que l’économie chinoise, qui était dans le rouge pendant la majeure partie des années 2021 et 2022, est de nouveau en hausse. La croissance économique de la Chine est synonyme de ses progrès scientifiques. Au moment où j’écris ces lignes, un bouleversement se produit dans le monde de la recherche scientifique. Les États-Unis, autrefois la force dominante, sont en train d’être remplacés par la Chine. Les conséquences de ce transfert de connaissances pourraient s’avérer graves.

La relève de la garde

Dans un récent article publié dans Asia Times, Caroline Wagner, spécialiste des relations internationales à l’université d’État de l’Ohio, a évoqué la montée en puissance de la Chine dans le domaine scientifique. Ses recherches montrent que les chercheurs chinois publient désormais la majorité des 1 % d’articles scientifiques les plus cités. Contrairement à la croyance populaire, les citations sont importantes, car les recherches les plus citées représentent les résultats scientifiques les plus influents.

Comme l’a fait remarquer Mme Wagner, le récent changement dans la suprématie scientifique a laissé un certain nombre d’experts en politique plus qu’inquiets. Si la tendance se maintient, la Chine ayant une population de scientifiques bien plus importante et produisant bien plus de doctorats en STIM (Science, technologie, ingénierie et mathématiques) que les États-Unis, ce n’est qu’une question de temps avant que l’Occident ne fasse office de figurant.

Cela est important pour un certain nombre de raisons, notamment parce que les connaissances et les aptitudes scientifiques sont étroitement liées à la croissance économique et aux capacités militaires. Les guerres de demain ne seront pas remportées par les pays dotés des missiles les plus sophistiqués, mais par les pays dotés des esprits scientifiques les plus aiguisés – les meilleurs spécialistes dans les domaines de l’intelligence artificielle, des ordinateurs quantiques et du piratage informatique. La Chine possède les trois en abondance. La Chine a déjà devancé les pays occidentaux dans le domaine de l’informatique quantique ; elle les dépasse également dans la recherche sur l’intelligence artificielle. Pour compliquer les choses, en novembre de l’année dernière, une générale de haut rang de la Space Force a admis que la technologie militaire chinoise pourrait bientôt devenir plus avancée que la technologie américaine.

Un drone de reconnaissance à haute altitude de l’Armée populaire de libération chinoise (APL) un jour avant le 13e Salon international de l’aviation et de l’aérospatiale de Chine à Zhuhai, dans la province du Guangdong, le 27 septembre 2021. (Noel Celis/AFP via Getty Images)

Que pourrait-on faire pour enrayer cette tendance ? Que peut faire l’Occident pour rester scientifiquement compétitif par rapport à la Chine ? Mme Wagner estime que les États-Unis devraient arrêter leurs efforts de découplage et chercher plutôt à collaborer avec le régime chinois. Le même régime qui a volé des milliers de milliards de dollars de propriété intellectuelle ; un régime qui représente la menace la plus importante pour l’Occident.

Mme Wagner estime que les réponses politiques de l’administration actuelle sont « enracinées dans une vision nationaliste qui ne correspond pas entièrement à l’effort mondial de la science ». En effet, la recherche universitaire est une affaire de collaboration qui repose sur l’échange d’idées et d’informations. Selon lui, si les États-Unis et les autres pays occidentaux veulent « bénéficier de l’essor scientifique de la Chine », ils doivent coopérer avec elle.

Cependant, les scientifiques chinois ont l’habitude d’agir comme des agents du Parti communiste chinois. Et on le sait, ce régime vole littéralement la science. Bien sûr, cela ne veut pas dire que tous les scientifiques chinois travaillent pour Pékin. Ce n’est tout simplement pas le cas. Cependant, penser qu’un effort de collaboration à grande échelle entre l’Occident et la Chine est réalisable ou réaliste est une dangereuse illusion. Les collaborations bénéfiques reposent sur la confiance. Comment l’Occident pourrait-il jamais refaire confiance à la Chine communiste ? Il ne le peut pas. Il ne devrait pas (la vieille fable du « Scorpion et de la grenouille » me vient à l’esprit).

Non, pour concurrencer la Chine sur la scène scientifique, il faut un bien meilleur plan. Ce plan doit être conçu par les personnes au pouvoir, et il doit être conçu immédiatement. L’enseignement des STEM (Science, technologie, ingénierie et mathématiques) doit être amélioré dans nos écoles. Elles sont nécessaires au progrès scientifique.

Avec toutes ces discussions sur le fait que la Chine n’en a plus que pour 10 ans, la vraie question serait plutôt : et si c’était les États-Unis et les autres pays occidentaux qui n’en avaient plus que pour 10 ans ? Et si, au cours de la prochaine décennie, la Chine faisait tellement de progrès scientifiques que l’Occident se retrouvait, pour les années à venir, à tenter désespérément de rattraper son retard ?

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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