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Du big data aux caméras intelligentes : toujours plus de possibilités pour surveiller les citoyens

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Photo: Shutterstock

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Durée de lecture: 11 Min.

Des caméras intelligentes devraient bientôt scanner et analyser le comportement des citoyens à Berlin.
En comparaison internationale, l’Allemagne reste relativement peu surveillée.
Le Sénat berlinois a reçu un projet de loi visant à accorder à l’avenir des pouvoirs nettement plus étendus aux services de protection de la Constitution du Land. Ce projet du gouvernement régional date de mai 2025. Les défenseurs de la protection des données ont désormais émis des réserves d’ordre constitutionnel.

Extension de la vidéosurveillance à Berlin

Outre l’utilisation de « chevaux de Troie gouvernementaux » pour fouiller les ordinateurs et les smartphones, l’accès à la vidéosurveillance des lieux publics devrait également être étendu.
Les exploitants d’établissements tels que les centres commerciaux, les installations sportives ou les parkings pourraient ainsi être tenus de transmettre les images enregistrées aux autorités.
En outre, la surveillance des logements devrait être facilitée par la suppression des restrictions existantes. La restriction prévue du droit d’accès à l’information des citoyens est particulièrement controversée : toute personne souhaitant savoir si elle est surveillée par les services de protection de la Constitution devra désormais prouver qu’elle a un « intérêt légitime », ce qui réduit considérablement la transparence.
Les détracteurs de ce projet de loi y voient une atteinte massive aux droits fondamentaux. À la mi-septembre, le commissaire à la protection des données de Berlin et des organisations telles que la Gesellschaft für Freiheitsrechte (Société pour les droits fondamentaux) ont mis en garde, devant la commission de protection de la Constitution du parlement régional, contre une extension du pouvoir de l’État qui pourrait mettre en danger les principes démocratiques.
Ils réclament plutôt davantage de contrôle de la part des autorités chargées de la sécurité et plus de transparence dans le traitement des données.

Projets pilotes d’IA avec scanner comportemental

Mais le Sénat berlinois continue de promouvoir les possibilités de surveillance des habitants de la capitale. Un projet pilote prévoit ainsi la mise en place d’une IA de surveillance avec scanner comportemental qui analyse le comportement des passants. C’est ce qu’a confirmé le Sénat berlinois le 29 septembre, selon « netzpolitik.org ».
Des tests avec le logiciel de l’Institut Fraunhofer sont déjà en cours depuis sept ans à Mannheim. Il est également utilisé à Hambourg depuis début septembre.
Ces systèmes de caméras intelligentes ne se contentent pas d’enregistrer, ils analysent également les schémas de mouvement. L’objectif de ces systèmes est de détecter les comportements suspects tels que les coups, les coups de pied ou les chutes et de déclencher une alarme en temps réel, par exemple pour aider les services de sécurité ou pour réagir plus rapidement en cas d’urgence.
Cette forme de surveillance va donc bien au-delà de l’enregistrement vidéo classique. Les détracteurs et les défenseurs de la protection des données mettent en garde contre les risques liés à ces technologies : l’évaluation automatisée des comportements pourrait conduire à des soupçons prématurés, en particulier si les algorithmes sont défectueux ou discriminatoires.
Il existe un risque que des personnes soient classées à tort comme suspectes en raison de leur profil de déplacement ou de leur langage corporel, sans qu’un contrôle humain ou une évaluation du contexte n’ait lieu. Les défenseurs de la protection des données font également valoir que la base juridique de ces systèmes est souvent floue et que le contrôle par les autorités chargées de la protection des données n’est pas systématique.

1,3 million de caméras dans les lieux publics

Mais dans quelle mesure la surveillance des lieux publics est-elle déjà répandue en Allemagne ? Récemment, 69 caméras d’origine chinoise, capables de reconnaître les visages et d’effectuer des analyses biométriques, ont été mises en service à Hambourg (selon un article publié par Epoch Times).
Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Selon une analyse publiée en juillet 2024 par la société Weber Protect, spécialisée dans les technologies de sécurité et basée à Berlin, il y avait environ 1,3 million de caméras dans les espaces publics en Allemagne en 2021.
Selon cette analyse, les caméras sont principalement installées dans les communes allemandes où elles ont un objectif concret : surveillance du trafic aux carrefours, prévention de la criminalité dans les zones sensibles, sécurité dans les infrastructures de transport public et à certains endroits sélectionnés.
L’évaluation fait état de différences considérables entre les villes : les points névralgiques du trafic et des transports publics sont fortement équipés, tandis que la surveillance pure et simple des zones est rare.
Selon Weber Protect, plus de 2000 caméras sont utilisées rien qu’à Hambourg, exclusivement pour surveiller la circulation.
Dans le domaine privé également, leur utilisation continue d’augmenter, favorisée par des systèmes connectés moins coûteux et un besoin accru de sécurité.

Dubaï et Londres en tête en matière de surveillance

En comparaison internationale, les villes allemandes ont encore une densité de caméras relativement faible. Selon une analyse de heyData, Hambourg et Munich comptent chacune 7 caméras de surveillance pour 1000 habitants, Stuttgart, 5 et Berlin, 4.
C’est nettement moins que dans des métropoles comme Londres ou Dubaï, où la densité est mesurée par superficie plutôt que par habitant, ce qui donne une image très différente. Toutefois, si l’on considère le nombre de caméras par kilomètre carré, les grandes villes allemandes telles que Berlin et Munich comptent environ 32 caméras par kilomètre carré.
À Paris, on en compte environ 318, et à Londres, près de 600.
Dubaï est le leader incontesté en matière de surveillance par kilomètre carré. Plus de 8500 caméras y sont installées par kilomètre carré. Même la capitale chinoise Pékin ne peut rivaliser. Selon la comparaison entre les villes, environ 800.000 caméras y surveillent l’espace public. Cela correspond à 37 caméras pour mille habitants ou 49 caméras par kilomètre carré, soit bien moins qu’à Londres.

Surveillance permanente ou déclenchée par un événement

En Allemagne, on utilise aussi bien des systèmes de vidéosurveillance permanents que des systèmes déclenchés par un événement, en fonction des besoins en matière de sécurité, du cadre juridique et des équipements techniques disponibles.
La vidéosurveillance permanente est utilisée partout où il existe un risque permanent et où une documentation complète est nécessaire. C’est le cas notamment dans les gares de Berlin ou de Cologne, où des caméras enregistrent tout 24 heures sur 24 afin de prévenir les infractions et de conserver des preuves.
Les aéroports de Francfort et de Munich utilisent également une surveillance continue pour contrôler les zones de bagages et les zones de sécurité.
Dans les banques et les salles de jeux, la vidéosurveillance est obligatoire, en particulier dans les zones de caisse et les entrées.
Les centres-villes connus pour être des points chauds, comme Mannheim, misent également sur une surveillance permanente afin d’endiguer le trafic de drogue et la violence.
À l’opposé, on trouve la vidéosurveillance événementielle, qui n’est activée que par certains déclencheurs, tels que des mouvements ou des bruits. Cette méthode est privilégiée dans les domaines sensibles en matière de protection des données. Il s’agit notamment d’événements organisés dans des lieux publics où une surveillance permanente serait disproportionnée.
Un exemple est l’utilisation prévue à la gare routière de Tübingen, où les systèmes basés sur l’IA n’enregistrent que les événements pertinents. Sur les propriétés privées ou les bâtiments commerciaux, des caméras équipées de détecteurs de mouvement sont également souvent utilisées pour prévenir les cambriolages.
Celles-ci ne filment pas en permanence. Le guide du commissaire à la protection des données du Land de Rhénanie-Palatinat recommande expressément de tels systèmes économes en données afin de répondre aux exigences en matière de protection des données.

Un sentiment de surveillance permanente

La vidéosurveillance publique est un sujet controversé. Ses partisans soulignent qu’elle renforce le sentiment de sécurité et accélère les poursuites pénales. Ses détracteurs dénoncent en revanche une atteinte aux droits fondamentaux et à la vie privée.
L’un des principaux points critiqués est le sentiment d’être constamment observé. Les gens peuvent difficilement se déplacer dans les rues, sur les places ou dans les transports sans être observés.
Les défenseurs de la protection des données mettent en garde : les gens se comportent de manière plus prudente, évitent certains lieux ou certaines activités et perdent une partie de leur liberté.
Si la surveillance devient la norme, la volonté de faire preuve de courage civique et d’aider quelqu’un en détresse pourrait également diminuer. La surveillance donne ainsi l’impression que les autorités « ont déjà la situation bien en vue ».