Il y a 21 ans le 25 avril, l’appel pacifique qui a changé la Chine

Par Eva Fu
24 avril 2020 15:46 Mis à jour: 24 avril 2020 19:03

Pour environ 70 à 100 millions de Chinois, le 25 avril 1999 est une date qui a tout changé.

Il y a 21 ans, environ 10 000 pratiquants de la pratique spirituelle du Falun Gong se sont rassemblés devant le bureau d’appel près de Zhongnanhai, le siège du Parti communiste à Pékin. Ils se sont alignés en rangs serrés sur les trottoirs afin de prier les autorités de leur accorder un environnement où ils pourraient exercer leurs croyances en toute tranquillité. Ils n’ont pas brandi de bannières ou d’affiches, ni crié de slogans. La plupart faisaient des exercices de méditation en silence.

Un magazine national venait de publier un reportage diffamant cette pratique. Des dizaines de leurs compagnons de pratique avaient été arrêtés et emprisonnés deux jours plus tôt dans la ville voisine de Tianjin, après s’être rendus au bureau du gouvernement pour demander une rectification de l’article du magazine. Le gouvernement central venait également d’annoncer l’interdiction de publier ou de diffuser des livres sur le Falun Gong à travers tout le pays.

Kong Weijing, banquière à Pékin, âgée de 49 ans, s’était préparée au pire en marchant vers Zhongnanhai à 7 heures ce matin-là, par temps nuageux, pour se joindre à l’appel.

C’était la plus grande manifestation en Chine continentale depuis le massacre de la place Tiananmen en juin 1989.

Les souvenirs des chars roulant sur la place Tienanmen et des troupes ouvrant le feu sur les manifestants pro-démocratie, causant la mort de centaines ou de milliers de personnes désarmées, étaient encore présents dans l’esprit de la plupart des Chinois.

« Tout peut arriver, mais je me suis sentie personnellement obligée » de me joindre à l’appel, a-t-elle déclaré dans une interview. « Quand Dafa est souillé, pour avoir bénéficié de la pratique, vous devez juste faire quelque chose. » Se souvenant de l’accusation d’« émeute » portée contre des étudiants qui s’étaient assis paisiblement sur la place Tienanmen une décennie plus tôt, Kong Weijing a revêtu son uniforme de banquière et a apporté avec elle ses papiers d’identité.

« Je pensais que les autorités prendraient la bonne décision une fois informées des faits », a-t-elle déclaré.

Le Falun Gong, ou Falun Dafa, est une discipline spirituelle traditionnelle chinoise qui comprend des exercices lents et méditatifs et des enseignements spirituels centrés sur le principe Authenticité, Bienveillance et Tolérance. Présenté pour la première fois au public en 1992, il est devenu très populaire en Chine en 1999.

Kong Weijing, comme beaucoup d’autres pratiquants du Falun Gong, n’aurait pas pu imaginer qu’en juillet 1999, le régime chinois lancerait une vaste campagne de persécution, rassemblant des centaines de milliers de personnes et les jetant dans des centres de détention, des camps de travail forcé et des centres de lavage de cerveau, où elles ont été régulièrement torturées.

Kong Weijing a rappelé que l’appel du 25 avril avait été calme et tranquille. Le régime chinois le qualifiera plus tard de « siège » du gouvernement central, pour justifier une répression à l’échelle nationale.

Plus de 10 000 pratiquants de Falun Gong se sont réunis dans la rue Fuyou à Pékin le 25 avril 1999. (Avec l’aimable autorisation de Minghui.org)

Sur le trottoir de la rue Fuyou, la rue qui mène à l’enceinte, elle a vu des étudiants, des enseignants, des agriculteurs et des travailleurs alignés, apparemment sur des kilomètres. Une mère portait sa fille dans ses bras. Un père poussait une poussette. Ils formaient de longues rangées le long des murs, lisant des livres ou faisant les exercices méditatifs du Falun Gong. Des volontaires faisaient des rondes pour ramasser les ordures des gens. Il y avait beaucoup de place pour les vélos.

Zhu Rongji, alors premier ministre de la République populaire de Chine, qui prônait la réforme économique, est venu pour rencontrer les pratiquants. Kong Weijing est l’un des rares que Zhu Rongji avait choisi au hasard pour répondre aux demandes du groupe, notamment la libération des pratiquants de Tianjin et la levée de l’interdiction de publication. À l’intérieur, elle a transmis les demandes aux responsables du bureau national des pétitions et du bureau central du Parti, et leur a remis une version de poche de Zhuan Falun, le livre principal de la pratique.

En quelques heures, les pratiquants de Tianjin ont été libérés. À 21 heures, les pratiquants qui étaient dehors ont été informés que le régime avait accepté leurs demandes, et Zhu Rongji et tous les autres ont donc fait leurs bagages et sont partis.

Mais moins de trois mois plus tard, le 20 juillet 1999, le régime a entamé la persécution sanglante de cette pratique. Il a notamment lancé une campagne de propagande massive, la chaîne de télévision publique CCTV a diffusé pendant des mois des programmes anti-Falun Gong destinés à ses nombreux téléspectateurs.

Peu de temps après, le lieu de travail de Kong Weijing a bloqué son fonds de pension et a reçu l’ordre d’organiser des séances de lavage de cerveau, forçant Mme Kong et d’autres personnes à renoncer à leur foi.

Mme Kong a fui vers d’autres régions du pays, pendant près d’une décennie elle n’a pas pu rentrer chez elle. Elle a fait le ménage pour ses connaissances en échange d’un logement, restant quelques jours à chaque endroit.

En juin 2000, pour contrer les informations publiées dans les journaux selon lesquelles la pratique avait été éradiquée, Mme Kong est allée faire des exercices sur la place Tienanmen, espérant montrer à tous qu’ils ne se laisseraient pas ébranler par la répression. La police l’a arrêtée immédiatement et l’a mise en détention pendant plus de dix jours. Elle a refusé de donner son nom et a entamé une grève de la faim, si bien que les gardes lui ont enfoncé un tube dans la gorge pour la nourrir.

« Nous pouvons connaître votre nom », lui ont dit les gardes. « Nous pourrions vous mettre un papier sur votre nez et vous étouffer à mort », se rappelle Mme Kong.

Par crainte de répercussions pour leur fils, son mari a demandé le divorce en 2000, mais les années suivantes, le harcèlement exercé par la police sur sa famille n’a pas cessé et les fonctionnaires de police ont poursuivi leurs recherches pour retrouver la trace de la jeune femme.

« Il pensait que nous pourrions nous remarier après la fin de la persécution », a déclaré Mme Kong. « Lorsque je me suis excusée de ne pas avoir pu lui offrir une famille accueillante, il m’a dit de ne pas m’inquiéter pour lui […] et de continuer ma pratique. »

Vivant maintenant aux États-Unis, Mme Kong a expliqué que le PCC avait conservé sa nature trompeuse, comme en témoignent sa gestion des manifestations pro-démocratiques à Hong Kong l’année dernière et sa récente dissimulation de l’épidémie du virus du PCC*.

« Une amie d’université m’a affirmé que lorsque le régime désapprouve quelque chose, ce doit être une bonne chose », dit-elle.

Minghui.org, un centre d’information basé aux États-Unis qui se consacre à la chronique de la persécution, a enregistré la mort de 4 406 pratiquants au cours de cette persécution, qui se poursuit toujours. Il a noté que ces données ne représentent que la « partie émergée de l’iceberg », compte tenu de l’ampleur de la censure et des difficultés à obtenir des informations à l’intérieur de la Chine.

Au cours de l’année dernière, près de 10 000 pratiquants dans 291 villes chinoises ont été arrêtés ou harcelés, selon Minghui. Les amendes infligées ont dépassé un total de 0,93 million d’euros.

Après des années de dérive, Mme Kong est arrivée aux États-Unis en 2015 pour rendre visite à son fils, qui travaille à New York, et y a trouvé refuge.

« Ce n’est qu’alors que j’ai vraiment pu retrouver la dignité d’un être humain », a-t-elle déclaré.

* Epoch Times qualifie le nouveau coronavirus, à l’origine de la maladie covid-19, de « virus du PCC » parce que la dissimulation et la gestion déplorable du Parti communiste chinois ont permis au virus de se propager dans toute la Chine avant d’être transmis dans le monde entier.

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