Existe-t-il un principe mathématique de la connaissance ?

30 novembre 2016 07:58 Mis à jour: 1 décembre 2016 20:04
Des études conduites ces dernières années en informatique ont démontré que la véracité d’une information dépendait de son degré de simplicité. Au même moment, des recherches dans le domaine des neurosciences arrivaient aux mêmes conclusions.  De nombreux travaux scientifiques indiquent que le monde, objet de la science, suivrait des règles simples et qu’il en serait de même pour notre capacité à le comprendre. C’est dans les domaines de l’informatique et des neurosciences que cette nouvelle vision de la connaissance est apparue il y a quelques années.  Devant l’apparente complexité du monde qui nous entoure, est-il possible de distinguer les informations pertinentes et fiables, vraies ou fausses ? Dans cet article nous allons expliquer pourquoi et comment la notion élémentaire de simplicité se retrouve à la frontière des deux domaines scientifiques des sciences mathématiques – froides et pures – et des sciences expérimentales du vivant.

Un univers informatique simplifiable

C’est le philosophe et mathématicien allemand Leibniz qui formalisa au 17ième siècle la logique binaire à la base de l’informatique d’aujourd’hui.  Il reprit cette idée du « Yi Jing » traité philosophique de la Chine antique basé sur l’opposition du Ying et du Yang. Il émit alors l’hypothèse que l’Univers pouvait être défini par une suite de vérités et de non-vérités, c’est à dire des 0 et des 1. Récemment dans le domaine des sciences informatiques, le mathématicien Andreï Kolmogorov démontra que l’organisation de l’information suivait des règles simples qu’il était possible de déterminer par des degrés de vérité. Depuis sa mort en 1987, les travaux de ce savant russe n’ont cessé d’être étudiés en informatique,  en mathématique et en économie. La théorie de la complexité de Kolmogorov définit tout objet par la taille du plus petit programme informatique permettant de le reproduire. Ainsi, indépendamment du contexte, de deux objets, celui ayant le programme original le plus simple est celui qui porte le plus de vérité.

Guillaume d'Ockham (1285-1347) a défini le principe du rasoir d'Ockham : «Les entités essentielles ne doivent pas se multiplier sans nécessité. » (Domaine public)
Guillaume d’Ockham (1285-1347) a défini le principe du rasoir d’Ockham : «Les entités essentielles ne doivent pas se multiplier sans nécessité. » (Domaine public)

Dans The Miraculous Universal Distribution paru en 1997, son homologue Léonid Levin va plus loin en apportant les preuves théoriques d’un univers organisé selon des règles définies en fonction de leur degré de vérité et de simplicité. D’après ces travaux, les informations les plus simples correspondent aux informations ayant une plus grande probabilité d’être vraies, tandis que les informations les plus complexes sont celles qui possèdent une moindre probabilité d’existence. Ces informations complexes étant alors qualifiées d’«informations décomposées», c’est-à-dire ne contenant que des informations redondantes et imparfaites.

Dans l’histoire des sciences, ces résultats se retrouvent dans d’anciens principes philosophiques et épistémologiques tel qu’en occident le principe de parcimonie du rasoir d’Ockham , à la base de la méthodologie scientifique d’aujourd’hui. Guillaume d’Occam (1285-1348), théologien et logicien anglais, énonça le principe suivant : « Les entités essentielles ne doivent pas se multiplier sans nécessité », interprété plus tard par « L’explication la plus simple est souvent la plus probable ».

Le processus de simplification de notre activité cérébrale

Changement de pays et de discipline. Les travaux du neurobiologiste américain Walter Freeman, montrent que notre capacité biologique à comprendre le monde suivrait également un principe de simplicité. En effet, en appliquant des électrodes sur le bulbe olfactif du lapin, il a observé en 1999, le rapport entre le processus de simplification et la reconnaissance positive d’une information. Lorsque l’on présente à l’animal une nouvelle odeur, l’activité cérébrale enregistrée par un électroencéphalographe (EEG) correspond alors à celle d’un état chaotique et complexe : signe qu’il ne reconnaît pas la signification de cette odeur. Après une certain période de tests, en présentant une nouvelle fois la même odeur, l’activité cérébrale du lapin se dirige vers un état stable dit « circulaire », signe qu’il reconnaît cette odeur.

Walter Freeman démontre avec ce protocole expérimental que notre capacité de comprendre, notre compréhension, aboutit en même temps que nous simplifions notre manière de comprendre.  En d’autres termes, notre faculté d’apprentissage correspondrait à un processus systématique de simplification, améliorant en amont nos facultés cognitives et notre capacité à simplifier. D’autres travaux ultérieurs, cette fois ci sur la dynamique cérébrale de plusieurs patients atteints de dépression, démontrent la relation entre la stabilité de notre activité cérébrale et la bonne santé de notre cerveau à se renouveler.

Une nouvelle approche du monde et de la connaissance

Cet article est le fruit d’un travail en épistémologie, une ancienne discipline visant à étudier l’origine de nos connaissances grâce à la philosophie et l’histoire des sciences. Les conclusions de cette étude se sont appuyées sur les derniers travaux scientifiques dans le domaine de l’informatique et des mathématiques appliquées, et dans le domaine de la médecine et des neurosciences cognitives.  Elles montrent que notre manière actuelle d’étudier le corps humain par la science et la technologie, revient finalement à mettre en lumière d’anciens principes philosophiques simples de  l’histoire de notre civilisation. Franscico de Varela  Professeur de biologie de l’université de Harvard, ancien directeur de recherche au CNRS au laboratoire de Neurosciences Cognitives et Imagerie Cérébrale de l’hôpital de la Pitié-Salpétrière, a d’ailleurs fait le rapprochement dans ses derniers travaux, entre les résultats expérimentaux de la science occidentale moderne, les anciens principes de la science et de la philosophie et les enseignements du taoïsme et du bouddhisme existant en Chine depuis 5000 ans.

Notre cerveau est notre principal outil d’observation et d’appréhension du monde extérieur. Les résultats corrélés de Kolmogorov et Freeman démontrent le rôle de la simplicité et de la vérité dans notre fonctionnement ontologique et biologique. Ils permettent de remonter vers notre principe naturel d’acquisition et de construction des connaissances, vers notre capacité à distinguer le vrai du faux et donc vers notre conscience. C’est à cet endroit que se construit notre compréhension du monde, et peut être même que se construit le monde tout simplement.

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