Hong Kong est au bord de l’abysse

Par David Kilgour
20 août 2019 17:08 Mis à jour: 20 août 2019 17:08

Difficile de distinguer les faits de la propagande au cours des deux derniers mois de manifestations en faveur de la démocratie à Hong Kong. Cependant, des réalités importantes semblent maintenant claires.

La Chine a solennellement accepté d’accorder un statut spécial à Hong Kong dans la Déclaration conjointe sino-britannique de 1984. Elle promettait un « degré élevé d’autonomie » et déclarait que la démocratie, l’État de droit et les droits de l’homme fondamentaux seraient maintenus sous le modèle « un pays, deux systèmes » pendant 50 ans.

Pékin a systématiquement violé ces engagements depuis la rétrocession de 1997, en particulier ces dernières années. Le gouvernement nommé à Hong Kong a choisi de ne pas sauvegarder son autonomie. Cette situation nuit à la ville, y compris à ses quelque 300.000 résidents canadiens, ainsi qu’aux investissements considérables circulant vers la Chine par son entremise, en grande partie à cause du système juridique encore exemplaire.

Le Livre blanc de Pékin de 2014 sur Hong Kong a effectivement rejeté le prolongement de la Déclaration conjointe. Par ce biais, les autorités chinoises ont marqué leur refus d’honorer les réformes démocratiques promises de longue date en 2014-2015. Certains législateurs élus se sont vus interdire d’entrer en fonction au sein du Conseil législatif partiellement démocratique. Certains candidats n’ont pas pu se présenter aux élections. Les manifestants en faveur de la démocratie ont été condamnés à de lourdes peines et un parti politique s’est vu purement interdit d’exister.

Un projet de loi sur l’extradition proposé par Carrie Lam, directrice générale de Hong Kong, aurait permis l’expulsion de personnes en transit et de dissidents politiques de la ville vers la Chine continentale afin qu’ils soient confrontés à un système orwellien. Une justice sans procès équitable, sans indépendance judiciaire, appliquant la torture, l’obtention d’aveux forcés – et télévisés – ainsi que des exécutions généralisées.

Le 9 juin, le projet de loi a fait descendre un million de Hongkongais dans les rues. Trois jours plus tard, lors d’une nouvelle manifestation, les Hongkongais ont été accueillis par la police à coups de gaz lacrymogènes, de gaz poivré, de balles en caoutchouc et de matraques. Plus tard, Lam a annoncé qu’elle « suspendrait » la mesure, mais les manifestants ont exigé son retrait complet, inconditionnel et permanent. Une semaine plus tard, deux millions de personnes sont descendues dans la rue. Lam a depuis déclaré le projet de loi « mort », mais son refus de le retirer complètement a suscité d’autres protestations.

La brutalité policière et les poursuites politiques forment ensemble un mélange toxique qui ne manquera pas de susciter de plus grandes protestations. Les protestations qui s’opposent au projet de loi sur l’extradition ont surtout été alimentées par les violations continues des droits et libertés fondamentaux par la police de Hong Kong. Leur utilisation dangereuse et aveugle de moyens de dissuasion a entraîné des blessures graves.

On trouve également des preuves significatives que la police a collaboré avec de violents gangsters d’une triade pour dissuader les protestations et obtenir les faveurs de la garnison de l’Armée populaire de libération de Chine à Hong Kong, qui cherche à écraser le mouvement pour la démocratie.

Michelle Bachelet, haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, affirme qu’il existe des « preuves crédibles » que la police a agi d’une manière « interdite par les normes et standards internationaux » et a fermement appelé à la tenue d’une enquête indépendante.

Récemment, des manifestants ont occupé l’aéroport international de Hong Kong et l’ont fait fermer. Un policier s’est mis à protester pacifiquement contre une femme, provoquant un lynchage, alors qu’un autre manifestant attrapait le bâton de l’agent et commençait à le frapper avec. L’officier a sorti son arme, mais heureusement, personne n’a été tué.

Avec les troupes chinoises se massant à la frontière, le manque d’indépendance du chef de l’exécutif Lam par rapport au parti-État de Pékin et la crainte des manifestants de perdre le peu de contrôle qu’ils ont maintenant sur leur avenir, la situation est devenue très instable. Tout doit être mis en œuvre pour dissuader Pékin de prendre d’assaut Hong Kong.

Une grande partie du monde ayant des médias indépendants semble maintenant regarder Hong Kong de près. Il y a eu des violations de la liberté de la presse, car des journalistes ont été pris pour cible. Les accusations d' »émeutes » sont utilisées contre les manifestants comme moyen de dissuasion.

L’injustice, la violence et la haine ne produiront qu’une plus grande part de chacun. Les manifestants ont gagné les cœurs et les esprits à travers le monde, mais un tel soutien pourrait être rapidement perdu s’ils s’engagent dans la violence systématique. Les excuses publiques des manifestants de l’aéroport envers les voyageurs dérangés ont été une bonne première initiative.

L’administratrice de Hong Kong et d’autres responsables doivent également réfléchir aux actions qui ont conduit à cette situation. Le fait de ne pas écouter et de ne pas défendre la quête de la plupart des résidents pour des institutions démocratiques à Hong Kong est en fin de compte irresponsable. Plus important, les deux parties doivent maintenant prendre du recul et chercher un moyen immédiatement pacifique d’engager un dialogue sérieux sur les réformes politiques à tenir.

David Kilgour, avocat de profession, a siégé à la Chambre des communes du Canada pendant près de 27 ans. Dans le cabinet de Jean Chrétien, il a été secrétaire d’État (Afrique et Amérique latine) et secrétaire d’État (Asie-Pacifique). Il est l’auteur de plusieurs livres et co-auteur avec David Matas de « Bloody Harvest : Le meurtre du Falun Gong pour leurs organes. »

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles de The Epoch Times.

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