Ingérence et désinformation du PCC dans les élections fédérales canadiennes de 2021

Par Andrew Chen
11 décembre 2021 17:37 Mis à jour: 11 décembre 2021 17:37

Les médias d’État chinois et les acteurs pro-Pékin ont publié des récits de désinformation sur diverses plateformes dans ce qui semble être une « opération d’influence coordonnée » visant les électeurs canadiens d’origine chinoise lors des élections fédérales de 2021, selon un think tank spécialisé dans la désinformation.

DisinfoWatch, qui surveille et expose les activités de désinformation étrangères au Canada, a signalé en septembre que le Parti communiste chinois (PCC) et ses entités affiliées ont ciblé les électeurs sino-canadiens et les candidats fédéraux du Parti conservateur lors de l’élection fédérale de 2021.

« Après avoir analysé les données en open source disponibles et consulté les principales parties prenantes, nous pensons que le moment et le contenu des récits indiquent la probabilité d’une opération d’influence coordonnée ciblant les électeurs sino-canadiens », déclare le rapport du 1er décembre cosigné par Marcus Kolga, fondateur de DisinfoWatch et chercheur principal à l’Institut Macdonald-Laurier, et Ai-Men Lau, responsable des communications du think tank basé à Ottawa.

« L’objectif de ce narratif erroné était d’inciter la peur et la colère envers le Parti conservateur et ses candidats dans des communautés ciblées. L’impact final de ces opérations et d’autres opérations d’influence visant les conservateurs est difficile à mesurer, bien que l’influence et la conversion des électeurs restent l’objectif probable. »

Selon les auteurs, ces acteurs pro-Pékin ont diffusé un narratif désinformationnel sur diverses plateformes médiatiques, notamment le Global Times, le média qui s’exprime au nom PCC, l’application WeChat et des sites web locaux sino-canadiens.

Ils citent en exemple un article du Global Times publié le 9 septembre qui condamnait le programme du Parti conservateur, en particulier sa politique étrangère liée au PCC. L’article menaçait également de représailles un gouvernement constitué de conservateurs souhaitant appliquer cette politique : « La Chine ripostera par une forte contre-attaque, et c’est le Canada qui en souffrira. »

MM. Kolga et Lau notent que malgré la faible audience du Global Times au Canada, l’article a permis à Pékin de « donner l’initiative aux plateformes et acteurs canadiens » qui soutiendraient « l’absolutisme et l’autoritarisme de l’extrême gauche jusqu’à l’extrême droite » et diffuseraient la propagande et la désinformation du PCC au niveau national.

Selon le rapport, le but de cette campagne de désinformation chinoise est probablement de détourner les critiques concernant l’autoritarisme du régime chinois.

« Face aux critiques des gouvernements, des médias ou des militants à l’étranger, le gouvernement chinois déploie souvent des contre-narratifs tactiques visant à les discréditer et à les affaiblir », indique le rapport.

Le programme électoral du Parti conservateur comportait une section complète de propositions politiques visant à tenir le PCC pour responsable des violations des droits de l’homme en Chine. Il comprenait également des mesures visant à diversifier les échanges commerciaux pour prendre de la distance avec la Chine, à interdire que Huawei ait accès aux infrastructures de télécommunications nouvelle génération du Canada et à retirer les médias d’État chinois des réseaux câblés du Canada.

Le « mode d’attaque rose »

À la suite de l’article du Global Times, un post désinformationnel concernant le candidat conservateur Kenny Chiu est apparu sur l’application WeChat, ainsi que sur sa version chinoise, Weixin. Wechat est une application élaborée et contrôlée par la Chine.

« Alors que les médias d’État ont été utilisés pour attaquer directement la direction et le programme du Parti conservateur, certainement sur les ordres de la direction du gouvernement, les récits qui ciblaient des candidats spécifiques semblaient moins organisés, allant du bas vers le haut », ont écrit MM. Kolga et Lau.

Le message reprochait à M. Chiu d’avoir présenté un projet de loi d’initiative parlementaire, le projet de loi C-282, visant à établir un « registre des influences étrangères » qui obligerait les personnes ou les organisations agissant au nom d’un gouvernement étranger à s’enregistrer auprès du gouvernement fédéral canadien.

Bien que le projet de loi ne vise pas un pays ou une communauté ethnique en particulier, le post prétend que M. Chiu tente de « supprimer la communauté chinoise » et que le registre d’influence étrangère limiterait les échanges économiques, culturels et technologiques entre la Chine et le Canada. Il affirmait également que le projet de loi réprimerait la liberté d’expression de la communauté chinoise.

Dans une précédente interview accordée à Epoch Times, M. Chiu a déclaré qu’il avait signalé au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) avoir été ciblé par une campagne de désinformation. Mais l’agence n’a pas voulu préciser si elle menait une enquête à ce sujet.

Le message WeChat ciblant M. Chiu est un exemple d’une tactique de désinformation courante du PCC, appelée « mode d’attaque rose » par Doublethink Lab, une importante ONG d’analyse de la désinformation à Taïwan. Ce mode implique des internautes locaux pro-Pékin en Chine et au Canada qui aident à diffuser la propagande et la désinformation du PCC en ligne.

Selon le rapport de DisinfoWatch, on estime qu’un million de Canadiens utilisent l’application WeChat, ce qui signifie que le contenu partagé sur la plateforme « a le potentiel d’atteindre un large public. » Combinant une timeline comme sur Facebook, une messagerie privée et un système de paiement, WeChat est la troisième plateforme de médias sociaux la plus populaire au monde, avec près de 1,25 milliard d’utilisateurs.

Timing et impact

En examinant le moment de la parution de l’article du Global Times, MM. Kolga et Lau ont déclaré qu’il a probablement été publié en réponse à la montée du Parti conservateur dans les sondages à cette époque.

Lorsque le chef libéral Justin Trudeau a déclenché les élections fédérales le 15 août, le Parti libéral obtenait environ 35 % des voix et devait, selon les prévisions, remporter au moins une forte minorité. À la fin du mois d’août, le soutien aux libéraux avait chuté à environ 32 %, tandis que le soutien aux conservateurs avait augmenté.

Le narratif désinformationnel proliférant sur WeChat et visant M. Chiu correspond précisément à cette époque, selon le rapport.

Bien qu’il soit difficile de mesurer l’impact réel de la désinformation du PCC sur l’élection, MM. Kolga et Lau soulignent les données de sondage recueillies par 338canada.com, qui s’est trompé de près de 10 % dans sa projection de la victoire de M. Chiu dans la circonscription de Steveston-Richmond East.

« Il convient de noter que si ces résultats de sondage suggèrent un revirement spectaculaire, cela n’exclut pas que les sondages puissent simplement être inexacts », écrivent-ils. « Toutefois, l’écart entre les sondages et les résultats des élections est inhabituel en raison de la rapidité avec laquelle s’est produit le basculement d’un candidat conservateur à un candidat libéral. »

MM. Kolga et Lau ont déclaré que le gouvernement canadien devrait examiner les médias en langue tierce dans le pays pour comprendre comment ces plateformes ont été utilisées pour diffuser de la désinformation et des informations erronées.

« Le gouvernement chinois a démontré à plusieurs reprises qu’il était prêt à défendre ses intérêts au Canada en manipulant directement le débat politique et la politique canadienne par le biais de la désinformation, des menaces, de l’intimidation et des opérations d’influence visant les groupes de la diaspora canadienne », ont-ils déclaré.

« Cette ingérence menace de saper l’intégrité de la démocratie canadienne et d’éroder la confiance du public dans nos processus et institutions démocratiques. »


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