La crise immobilière en Chine s’aggrave, mais quelle en est l’ampleur ?

Par Indrajit Basu
22 août 2023 21:41 Mis à jour: 22 août 2023 21:41

Le marché immobilier chinois a de nouveau été perturbé ce vendredi, Soho China, promoteur immobilier, ayant annoncé une baisse significative de ses revenus. Cette annonce a été faite quelques heures seulement après le dépôt de bilan à New-York d’un autre acteur important du secteur, le China Evergrande Group.

Soho China, une société immobilière commerciale de taille moyenne cotée à la Bourse de Hong Kong, a déclaré un bénéfice net de 13,61 millions de yuans pour le premier semestre, soit une baisse impressionnante de 93 % par rapport à l’année précédente.

Ses recettes, qui proviennent principalement des locations à Pékin et Shanghai, n’ont diminué que de 8 %, à 821,50 milliards de yuans, mais son bénéfice brut a connu une importante baisse et l’évaluation de la valeur réelle de ses actifs s’est inversée, effaçant plus de 130 milliards de yuans du résultat net de l’entreprise.

Il a été rapporté qu’Evergrande, lourdement endettée, a demandé à bénéficier de la clause du « chapitre 15 » aux États-Unis, qui est une clause de protection que les entreprises non-américaines peuvent déclencher en cas d’insolvabilité. La société a indiqué dans sa demande qu’elle était engagée dans un processus de restructuration à la fois à Hong Kong et dans sa filiale aux îles Caïmans.

Tianji Holdings, sa filiale, s’est également placée sous la protection du chapitre 15 de la loi sur les faillites, jeudi, devant le tribunal des faillites du district sud des États-Unis, à Manhattan.

La semaine dernière, de nouvelles inquiétudes ont émergé quant à un risque de contagion en provenance de Country Garden. Le plus grand promoteur immobilier de Chine connaît une situation de crise en raison de l’importance de sa dette, alors que l’entreprise était auparavant toujours été considérée comme stable sur le plan financier.

Le dépôt de bilan d’Evergrande, ainsi que les mauvais résultats financiers de Soho, ont aggravé la crise immobilière chinoise, qui pourrait s’étendre à l’ensemble du pays à mesure que la croissance ralentit suite à la baisse de la consommation intérieure, de la hausse du chômage et de la faiblesse de l’économie.

Quelle est l’ampleur de la crise ?

D’ores et déjà, la « zombification » des promoteurs immobiliers chinois est en voie d’intensification. Avec la baisse des prix de vente des nouvelles résidences dans toute la Chine en juillet, les entreprises en difficulté financière abandonnent les projets de construction les uns après les autres. Le modèle économique des promoteurs immobiliers, qui tablent sur une augmentation constante des valeurs immobilières, semble avoir atteint ses limites.

Selon des enquêtes du Bureau national des statistiques en juillet, les prix ont baissé dans 70 % des 70 plus grandes villes par rapport au mois précédent.

Pour le deuxième mois consécutif, la moyenne des prix des logements neufs dans les villes a baissé de 0,2 % en juillet, après un recul d’un peu moins de 0,1 % en juin.

Mercredi, l’agence de statistiques a indiqué que les prix des logements neufs ont baissé d’un mois sur l’autre dans 49 villes, et que 11 villes de plus sont concernées par rapport au mois de juin. La baisse des prix dans les grandes villes comme Guangzhou et Shenzhen s’est poursuivie en juillet.

Les prix des appartements en copropriété diminuent en aison du fait qu’il y a moins d’acheteurs que de vendeurs et que l’incertitude de l’économie et du marché de l’emploi persiste. De nombreux propriétaires de condominiums vendent leurs biens de peur que la baisse des prix ne les y oblige un jour.

L’investissement total dans le développement immobilier pour la période janvier-juillet était de 6,77 trillions de yuans (870 milliards d’euros), soit 8,5 % de moins que l’année précédente.

La principale raison de ce recul tient à une réduction de 7,6 % des investissements dans les logements résidentiels, qui représentent environ les trois quarts de l’ensemble des investissements.

L’investissement immobilier a également chuté en raison du fait que de nombreux promoteurs ont du mal à obtenir des financements. Par exemple, au cours des sept premiers mois, le montant des fonds disponibles pour le développement immobilier était de 7,82 trillions de yuans, soit une baisse de 11,2 % par rapport à l’année précédente.

Un risque systémique

L’annonce par Zhongrong International Trust Co., qu’elle supprimait ses produits d’investissement a également mis en lumière la surexposition du secteur bancaire chinois au secteur de l’immobilier.

Prisonnière d’une grave crise immobilière, la société basée à Pékin a interrompu les paiements aux investisseurs de ses obligations alors qu’une restructuration de la dette est en cours.

Selon Shen Meng, directeur de la société d’investissement Chanson & Co, basée à Pékin, une crise de liquidité dans le secteur des fiducies pourrait avoir des répercussions considérables sur l’ensemble de l’économie. Les investisseurs individuels exposés aux obligations Zhongrong pourraient voir leur patrimoine diminuer, les sociétés cotées en bourse voir leur capital de croissance et d’investissement réduit, et les gouvernements locaux, qui croulent déjà sous les dettes, pourraient être confrontés à des difficultés supplémentaires lors de la mise en œuvre de mesures visant à soutenir l’économie chinoise en déclin.

Et ensuite ?

Le mois dernier, le Politburo du Parti communiste chinois a donné espoir aux investisseurs du secteur immobilier chinois en laissant entendre qu’il envisageait de soutenir les promoteurs en difficulté.

Bien qu’aucune mesure de relance audacieuse n’ait été annoncée jusqu’à présent, les analystes espèrent que Pékin pourra fournir une forme de soutien en liquidités pour la construction et la livraison de projets, mais qu’il s’abstiendra d’effectuer des sauvetages financés par l’État afin d’enrayer la spirale descendante.

Les autorités chinoises vont probablement éviter un tel scénario, de peur que des milliers d’acheteurs ne deviennent les victimes de projets inachevés et ne déclenchent une reprise des restrictions hypothécaires de l’année dernière », a déclaré un rapport de CrediSights mardi.

La demande de logements restant faible, une deuxième série d’arrêts de projets est susceptible d’affaiblir encore davantage le sentiment des acheteurs. Par conséquent, l’apport de liquidités pour le refinancement des obligations sera probablement relégué au second plan, ajoute le rapport.

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