Le plus mince vernis de civilisation

Par Victor Davis Hanson
5 octobre 2022 13:01 Mis à jour: 5 octobre 2022 13:01

La civilisation est fragile. Il faut garantir les éléments indispensables à la vie.

Pouvoir manger, se déplacer, avoir un abri, être libre de toute contrainte tribale ou nationale, être en sécurité à l’étranger et chez soi – tous ces éléments permettent aux différentes sociétés de se libérer des corvées quotidiennes inhérentes à la survie.

Seule la civilisation permet aux êtres humains de poursuivre des recherches scientifiques sophistiquées, de développer les arts et les aspects les plus raffinés de la culture.

Ainsi, la civilisation occidentale, caractérisée par un gouvernement fondé sur le consensus, la liberté individuelle, la raison associée à la croyance religieuse, l’économie de marché, l’autocritique et les vérifications permanentes, a réussi à libérer les gens de l’inquiétude quotidienne suscitée par la violence de l’État, la criminalité aléatoire, la famine et une nature souvent impitoyable.

Mais bien souvent, les loisirs et l’abondance qui en résultent ont fait croire aux sociétés occidentales arrogantes que l’homme moderne n’avait plus à se soucier des fruits de la civilisation qu’il considérait comme son droit fondamental de naissance.

En conséquence, la cité‑État grecque, l’Empire romain, les républiques de la Renaissance et les démocraties européennes des années 1930, autrefois prospères, ont implosé – la civilisation a fait un bond en arrière.

Le monde occidental moderne est aujourd’hui confronté à une telle crise.

Nous parlons avec grandiloquence du Great Reset de la planète. Nous acceptons aveuglément le Green New Deal à la mode. Nous dénonçons le désengagement de la police. Nous haussons simplement les épaules devant l’ouverture des frontières. Et nous nous flattons d’interdire les engrais et les pesticides, de mettre hors la loi le moteur à combustion et d’écarter l’Armageddon de l’ère nucléaire – comme si, en pilotage automatique, nous avions déjà atteint l’utopie.

Pendant ce temps, les Occidentaux détruisent systématiquement les éléments de notre civilisation qui ont permis de telles fantaisies.

Prenez le carburant. Non sans arrogance, les Européens ont moralisé le monde en affirmant qu’ils n’avaient plus besoin des combustibles traditionnels. Ils ont donc fermé les centrales nucléaires. Ils ont arrêté le forage du pétrole et du gaz. Et ils ont interdit le charbon.

Et ce qui en résulte est dystopique. Les Européens brûleront du bois sale cet hiver, leur civilisation passant de l’abondance postmoderne à la survie prémoderne.

L’administration Biden a bloqué les champs pétrolifères. Elle a annulé les nouvelles concessions fédérales de pétrole et de gaz. Elle a arrêté la construction de pipelines et incité les investisseurs à éviter les combustibles fossiles.

Lorsque la pénurie a naturellement suivi, les prix du carburant ont grimpé en flèche.

La classe moyenne a désormais hypothéqué sa mobilité pour s’assurer de pouvoir payer de l’essence, du mazout et de l’électricité dont le prix monte en flèche.

Le Pentagone a pour mission d’assurer la sécurité des États‑Unis en dissuadant les ennemis, en rassurant les alliés et en convainquant les pays neutres.

Ce n’est pas pour harceler les soldats en fonction de leur race. Il ne s’agit pas d’endoctriner les recrues selon l’agenda woke. Ce n’est pas pour devenir une force politique partisane.

Le résultat de ces détours suicidaires empruntés par le Pentagone est le fiasco en Afghanistan, l’agression de la Russie dirigée par Vladimir Poutine, la nouvelle agressivité de la Chine et les menaces bruyantes des régimes de voyous comme l’Iran.

Chez nous, l’administration Biden a inexplicablement détruit la frontière sud, comme si les nations civilisées du passé n’avaient jamais eu besoin de telles frontières.

Le chaos le plus total a suivi. Trois millions de migrants se sont précipités aux États‑Unis. Si certains traversent clandestinement, d’autres franchissent les postes‑frontières sans vérification adéquate et, pour la plupart, sans compétences, sans diplôme d’études secondaires ou sans capital.

Les rues de nos villes sont anarchiques – et ce, à dessein.

Le désengagement de la police, la mise en liberté des prisonniers et la destruction du système judiciaire ont libéré une multitude de criminels. C’est maintenant la saison ouverte sur les faibles et les innocents.

L’Amérique fait un retour en arrière vers le Far West du 19e siècle. Les prédateurs mutilent, tuent et volent en toute impunité. Les repris de justice concluent à juste titre que la « théorie critique de la loi », notion postmoderne d’un système judiciaire en faillite, leur garantira l’exemption de toute punition.

Peu d’Américains connaissent l’agriculture, ils s’attendent à disposer d’un approvisionnement illimité en aliments peu coûteux, sûrs et nutritifs.

Mais ce droit pour 330 millions de bouches affamées nécessite de gros projets de construction de barrages et de réservoirs. Les agriculteurs dépendent d’un approvisionnement régulier en engrais, carburants et produits chimiques. Si l’on supprime ce soutien – comme le font les nihilistes verts – des millions de personnes auront bientôt faim, comme c’est le cas depuis l’aube des temps.

Près d’un million de sans‑abri vivent aujourd’hui dans les rues des États‑Unis. Nos grandes villes sont redevenues médiévales avec leurs égouts à ciel ouvert, leurs trottoirs jonchés d’ordures et leurs vagabonds violents.

Nous vivons donc une grande expérience où le progrès régressif se débarrasse de toutes les institutions et méthodologies du passé qui ont garanti une Amérique sûre, riche, bien nourrie et protégée.

Nous sommes au contraire en train de revenir avec arrogance à un nouveau féodalisme, alors que les riches élites – terrifiées par ce qu’elles ont créé – se retirent égoïstement dans leurs domaines privés.

Mais les autres, qui subissent les conséquences de ce flirt des élites avec le nihilisme, n’ont pas les moyens de se nourrir, de se loger et de se chauffer. Et ils se sentent maintenant en danger, à la fois en tant qu’individus et en tant qu’Américains.

Alors que nous subissons des pillages de masse auto‑infligés, une violence de rue aveugle, une hyperinflation, une frontière inexistante, des carburants inabordables et une armée qui s’effondre, les Américains vont se rendre compte à quel point le vernis de la civilisation est mince.

Une fois dépouillés, nous réapprenons que ce qui se trouve juste en dessous est totalement terrifiant.

Divers historiens et hommes d’État ont attribué la chute de la République romaine au déclin des croyances religieuses et à la déchéance de la moralité qui l’accompagnait. « Rome : les ruines du Forum en regardant vers le Capitole » par Canaletto, 1742. (Domaine public)

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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