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Le remaniement de l’armée chinoise révèle un équilibre fragile des pouvoirs

Selon de nombreux observateurs, ces purges internes, qui surviennent dans un contexte de tensions entre factions profondément enracinées, sont les plus importantes au sein de l'armée depuis la Révolution culturelle.

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Le général Zhang Youxia, vice-président de la Commission militaire centrale, assiste à la séance d'ouverture de l'Assemblée populaire nationale (APN) au Grand Hall du Peuple, le 5 mars 2025 à Pékin, en Chine.

Photo: Kevin Frayer/Getty Images

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Durée de lecture: 6 Min.

Alors que la Chine remanie sa haute hiérarchie militaire, la nomination du général Zhang Shengmin au poste de vice‑président de la Commission militaire centrale (CMC) est largement perçue comme un compromis provisoire entre le dirigeant chinois Xi Jinping et le haut gradé Zhang Youxia.
Des analystes estiment que ce mouvement traduit un équilibre précaire des pouvoirs au sein de l’Armée populaire de libération (APL), même si des tensions factionnelles profondes persistent.

Compromis entre deux centres de pouvoir

Un interlocuteur en Chine, s’exprimant sous couvert d’anonymat, a indiqué à Epoch Times que la promotion de Zhang Shengmin résultait d’un compromis entre Xi et Zhang Youxia.
Bien que Zhang Shengmin soit originaire de la province du Shaanxi, fief de Xi, sa carrière s’enracine dans la Force des fusées de l’APL, où il a gravi les échelons sous le mentorat de Zhang Youxia.
« Zhang Shengmin est perçu comme une figure centriste, dans la mesure où il ne conteste directement aucun des deux camps », a expliqué cette source. « Cela fait de lui le choix le plus sûr dans l’actuel bras de fer entre Xi et Zhang Youxia. »
Des spécialistes mettent toutefois en garde : cette nomination ne signifie pas que le tiraillement entre Xi et l’institution militaire soit terminé. Les vastes purges et remaniements au sein de la Force des fusées traduisent, selon eux, la volonté continue de Xi de consolider son contrôle face à des résistances internes.

Technocrates et loyaux politiques

Un universitaire spécialiste des questions militaires chinoises estime que l’ascension de Zhang Shengmin illustre l’équilibre délicat entre les officiers techniciens de l’APL et les loyalistes politiques. La Force des fusées, qui supervise l’arsenal de missiles stratégiques, est devenue centrale tant pour la stratégie de dissuasion de la Chine que pour les dynamiques de pouvoir internes au Parti communiste chinois (PCC).
« La promotion de M. Zhang peut temporairement apaiser les tensions », note ce chercheur. « Mais la faille entre Xi et l’armée n’a pas disparu. La planification des successions restera structurée par cette ligne de fracture. »
Les archives publiques montrent que Zhang Shengmin a passé l’essentiel de sa carrière au sein de la Force des fusées, branche de plus en plus influente de l’APL. Des observateurs relèvent que, si sa nomination acte un compromis, elle ne résout guère le conflit structurel opposant la direction politique du PCC au commandement opérationnel de l’armée, lutte sourde pour le contrôle du récit et de l’autorité.

L’une des purges les plus profondes depuis la Révolution culturelle

De multiples observateurs en Chine décrivent la campagne en cours comme l’une des plus étendues menées dans l’armée depuis la Révolution culturelle. Certains estiment que ce qui a débuté comme une rivalité factionnelle a évolué en lutte pour la prééminence décisionnelle.
Bien que Zhang Youxia ne soit « que » vice‑président de la CMC, la « faction technocratique » qu’il incarne conserve de l’influence via son expertise et sa main sur la logistique et la technologie militaires. Mais, selon des sources internes, sa marge est désormais contrainte, Xi dominant l’appareil du Parti et de la propagande.
« Zhang Youxia conserve le respect des troupes, mais il manque d’appuis politiques et administratifs », confie un interlocuteur. « Xi a l’avantage sur le plan politique et au sein de la machine de propagande du PCC. »
Hors de Chine, des analystes s’interrogent sur la capacité du Parti à maintenir une chaîne de commandement stable en temps de guerre.
Un rapport de la RAND Corporation, publié plus tôt cette année, estime que la priorité donnée par l’armée chinoise à la préservation du pouvoir du PCC entrave la préparation opérationnelle et sape la crédibilité de la dissuasion militaire de Pékin.

Perspectives

Si la nomination de Zhang Shengmin a pu obtenir un assentiment provisoire des deux camps, un interlocuteur estime que le duel entre Xi et l’institution militaire est loin d’être clos. Son issue façonnera non seulement la hiérarchie interne de l’APL, mais aussi l’architecture du pouvoir au sommet de l’État dans les années à venir.
Interrogé pour savoir si Zhang Shengmin penchait davantage vers Xi ou vers Zhang Youxia, cet interlocuteur a répondu : « Il est plus proche de Zhang Youxia, car cela reflète le sentiment majoritaire au sein de l’armée. »
Le poste de vice‑président de la CMC compte parmi les plus élevés de l’appareil militaire chinois et sert souvent de baromètre politique pour la direction de Pékin. À ce stade, le PCC n’a pas fait d’autres commentaires sur la nomination de Zhang Shengmin ni sur le vaste remaniement au sein de l’APL.
Yue Li a contribué à la rédaction de cet article.