L’effondrement de l’immobilier en Chine va-t-il détruire l’économie mondiale ?

Le deuxième promoteur immobilier de Chine peine à rembourser les prêts nationaux

Par James Gorrie
3 octobre 2021 03:48 Mis à jour: 3 octobre 2021 07:15

Commentaire

L’économie chinoise basée sur l’immobilier est-elle au bord de l’effondrement ?

Une grande partie de cette économie pourrait l’être, si ce n’est la totalité.

Evergrande, le deuxième plus grand promoteur immobilier de Chine et le plus endetté au monde, risque de ne pas pouvoir rembourser ses prêts. Une grande partie de la dette est détenue par des banques chinoises, ce qui fait craindre un effondrement de l’énorme secteur financier chinois, lourdement endetté.

Mais ce n’est pas tout. Une part importante de la dette d’Evergrande (plus de 800 millions de dollars) est également détenue par des intérêts étrangers. Étant donné l’importance des liens économiques entre la Chine et l’ensemble du monde, il est à craindre que l’effondrement d’une entreprise aussi importante ait des conséquences économiques tant pour la Chine que pour ses détenteurs d’obligations étrangers.

Un scénario à la Lehman Brothers ?

Ces craintes ne sont pas déraisonnables. Des parallèles ont été établis entre la crise financière de 2008 déclenchée par l’effondrement de Lehman Brothers, une importante société d’investissement de Wall Street, dont on disait à l’époque qu’elle était « trop grosse pour faire faillite ». Mais lorsqu’elle a fait faillite, d’autres entreprises ont suivi, ce qui a nécessité des renflouements massifs de l’État à hauteur de milliers de milliards de dollars dans un contexte de profonde récession.

Cette même peur de la contagion économique pourrait  expliquer en partie ce qui a fait chuter les prix des actifs financiers la semaine dernière. Certains experts financiers pensent que les retombées de la défaillance d’Evergrande pourraient être bien pires que celles de Lehman Brothers.

Les observateurs savent que le marché immobilier chinois est dans une bulle depuis des décennies. Quant à Evergrande, c’est l’enfant-vedette d’une économie chinoise qui repose sur un secteur immobilier en surchauffe depuis longtemps. Il y a un an, les gros titres étaient très similaires à ceux d’aujourd’hui lorsque la société immobilière était confrontée à une crise de 120 milliards de dollars liée à la dette.

Mais d’une manière ou d’une autre, la Banque populaire de Chine (PBOC) a réussi à arranger les choses, du moins pendant un certain temps. Mais cette fois, le résultat pourrait être différent. En fait, Evergrande n’est pas le seul à connaître des difficultés financières ; d’autres promoteurs immobiliers chinois fortement endettés, tels que Sinic Holdings, sont également en difficulté. Le 20 septembre, Sinic s’est effondré de 87 % à Hong Kong.

Un marché faussé révèle les faiblesses, la vulnérabilité

Les problèmes d’Evergrande et d’autres sociétés immobilières à fort effet de levier découlent de la dépendance excessive de la Chine vis-à-vis des actifs immobiliers pour stimuler la croissance économique et l’emploi. Le Parti communiste chinois (PCC) revendique sa légitimité en mettant en avant la croissance économique et un taux d’emplois élevés. La plus grande crainte du Parti est de voir apparaitre des troubles civils, mais le développement immobilier est facile à créer et à réaliser.

C’est pourquoi, au cours des trois dernières décennies, le développement immobilier a été utilisé pour satisfaire ces trois objectifs. Le processus financier peut se résumer en une équation simple. Les banques d’État prêtent de l’argent aux entreprises d’État et/ou aux responsables locaux du Parti, qui construisent ensuite des appartements, des centres commerciaux et d’autres structures urbaines, puis les vendent à des groupes d’investissement privés chinois, qui les revendent ensuite à des particuliers, des fonds d’investissement et d’autres entités d’investissement privées. Souvent, le constructeur les vend directement au public.

La construction est au point mort à l’Oceanwide Plaza inachevé à Los Angeles, en Californie, le 25 janvier 2019. Il s’agit de l’un des plus grands projets de développement immobilier du centre-ville de LA, où le conglomérat Oceanwide Holdings, basé à Pékin, a déclaré que le blocage était dû à une recapitalisation du projet, les travaux devant reprendre à la mi-février. La Chine est un investisseur important dans les projets immobiliers du centre-ville de Los Angeles depuis plusieurs années. (Frederic J. Brown/AFP via Getty Images)

Le PCC s’est appuyé sur le développement immobilier, indépendamment de la demande du marché, comme moyen de maintenir l’emploi à un niveau élevé. Pour maintenir la demande et les prix élevés, les options d’investissement pour les citoyens privés ont été relativement limitées par rapport aux États-Unis ou à l’Europe. C’est l’une des raisons pour lesquelles les taux d’épargne à long terme des ménages chinois (plus de 40 %) sont beaucoup plus élevés qu’aux États-Unis (environ 8 %), mais aussi pourquoi les prix des logements par rapport au revenu des ménages sont également beaucoup plus élevés, 30 fois ou même plus.

Pour protéger les banques qui financent le terrain et la construction, la PBOC s’est contenté de refinancer les prêts existants et les intérêts dus en de nouveaux prêts plus importants. Des obligations ont également été émises pour financer les nouveaux développements, alimentant une bulle obligataire nationale de 52 000 milliards de dollars. Comme le PCC contrôle la PBOC et l’évaluation du yuan, les distorsions du marché et l’endettement massif peuvent se poursuivre et s’aggraver année après année, décennie après décennie.

Un symptôme, mais pas la maladie

Mais comme toutes les structures, physiques ou financières, les distorsions deviennent des faiblesses, les limites sont atteintes et l’effondrement s’ensuit. C’est ce qui se passe avec Evergrande et, comme indiqué ci-dessus, ce n’est pas un cas isolé, ni atypique. La plupart, sinon la totalité, du marché du développement immobilier en Chine ressemble à Evergrande. L’un des résultats est la multitude de villes vacantes qui ont été construites à titre d’« investissements ».

Le problème est que personne n’habite dans les milliers d’immeubles d’habitation vides qui ont été construits. Personne ne fait ses courses dans les centres commerciaux vides, ne se déplace dans les métros ou n’occupe les immeubles de bureaux des « villes fantômes ». Par conséquent, il n’y a pas de loyers, pas d’hypothèques, pas de retours sur la construction des villes fantômes qui ont été construites uniquement pour maintenir la revendication de légitimité creuse du PCC.

Le secteur financier, bien sûr, est directement lié aux sociétés de développement et n’est pas en meilleure forme. Des décennies de mauvais prêts faits et refaits, totalisant des dizaines de milliers de milliards de dollars de créances douteuses. La faillite d’une entreprise, d’une banque, peut en entraîner d’autres, comme nous l’avons vu lors de la crise financière mondiale de 2008-09.

La banque centrale chinoise fait tomber tout le monde ?

L’une des façons dont la PBOC a tenté d’atténuer, voire d’éviter, un défaut de paiement est de réduire les réserves obligatoires des banques. Cela libère de l’argent dans le système financier, qui peut ensuite être transféré à Evergrande pour qu’il puisse faire face à ses obligations. Mais ils l’ont déjà fait plusieurs fois auparavant. Il reste à voir dans quelle mesure cela sera efficace cette fois-ci. Il est particulièrement instructif de noter qu’à l’heure où nous écrivons ces lignes, la Chine a payé les détenteurs d’obligations nationales, mais que les détenteurs d’obligations étrangères n’ont pas encore été payés.

La raison en est peut-être que le PCC veut stabiliser la situation interne pour renforcer sa propre crédibilité en « s’en prenant aux étrangers ». Cette dernière partie pourrait affecter les marchés boursiers américains et européens. Elle pourrait également freiner le marché immobilier américain en plein essor, puisque les acheteurs chinois jouent un rôle important dans le secteur du logement de la côte ouest et d’autres marchés. Ou pire, l’éclatement de la bulle immobilière chinoise pourrait déclencher une avalanche de craintes sur les marchés mondiaux, entraînant une chute des prix des actifs dans le monde entier.

Cet effet domino est certainement possible. Nous verrons bien.


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