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Les exportations chinoises reculent de façon inattendue pour la première fois en huit mois
La demande venue de marchés hors États-Unis, comme l’Union européenne et l’Afrique, n’a pas permis de compenser l’effondrement des ventes aux consommateurs américains.

Des voitures en attente d’embarquement pour l’exportation dans le port de Nankin, province du Jiangsu, Chine, le 6 novembre 2025.
Photo: STR/AFP via Getty Images
Les exportations chinoises ont chuté en octobre, selon les données douanières, accentuant la pression sur la deuxième économie mondiale, déjà affectée par une demande intérieure atone.
Les ventes à l’étranger ont reculé de 1,1 % le mois dernier sur un an, selon les chiffres publiés le 7 novembre par l’Administration générale des douanes du régime chinois. Le chiffre est inférieur à la croissance de 3 % anticipée par les économistes sondés par Reuters et annule partiellement le rebond de 8,3 % observé en septembre, représentant la plus mauvaise performance depuis février, où les exportations avaient déjà chuté, affectées par la fête du Nouvel An chinois.
Si les droits de douane américains continuent de peser sur le commerce extérieur chinois, le dernier recul est surtout dû aux livraisons vers d’autres marchés, signe que l’appréciation récente du yuan, la monnaie chinoise, pénalise la compétitivité des exportations, indiquent Zichun Huang et Julian Evans‑Pritchard de Capital Economics.
« Un allégement partiel des droits de douane américains, consécutif au récent “accord” commercial, pourrait soutenir légèrement les exportations. Mais tout rebond s’annonce limité, l’apaisement des tensions sino-américaines alimentant notamment l’appréciation du renminbi », écrivent les économistes dans une note datée du 7 novembre.
À partir du 10 novembre, les États-Unis vont réduire de moitié les droits anti-fentanyl prélevés sur la Chine (abaissés à 10 %), dans le cadre d’une trêve d’un an conclue après le sommet entre Donald Trump et le dirigeant chinois Xi Jinping en Corée du Sud.
Grâce à cette trêve commerciale, Woei Chen Ho, économiste à la United Overseas Bank de Singapour, anticipe une stabilisation du commerce extérieur chinois à court terme.
« La réorganisation continue des chaînes d’approvisionnement devrait néanmoins se poursuivre, et chaque pays cherchera à réduire son interdépendance », affirme‑t‑elle, estimant que la part du commerce bilatéral sino-américain pourrait décliner davantage à l’avenir.
Les exportations vers les marchés hors États-Unis ralentissent
Les exportations vers les États-Unis ont chuté de 25,2 % sur un an : c’est le septième mois consécutif de repli à deux chiffres.
Contrairement à ce qui s’observait les mois précédents, le recul n’a pas été compensé par la demande émanant d’autres marchés, comme l’Union européenne ou l’Afrique.
Les exportations à destination de l’ASEAN (principal partenaire commercial de la Chine) affichent une progression de 11 % sur un an en octobre, contre +15,6 % en septembre.
Les livraisons vers l’Union européenne (deuxième partenaire de la Chine) progressent de 0,9 %, très en deçà du bond de 14,2 % constaté en septembre.
Les expéditions vers l’Afrique du Sud ralentissent aussi fortement, à +10,5 % en octobre, après un envol de 56,4 % le mois précédent.

Demande intérieure en berne
D’après les douanes chinoises, les importations ont progressé de 1 % en octobre sur un an, là encore bien en‑deçà du bond de 7,4 % observé en septembre, et inférieures aux prévisions des économistes.
Ainsi, l’excédent commercial chinois atteint 964 milliards de dollars pour les dix premiers mois de l’année, en hausse de 22,9 % par rapport à la même période l’an passé. Si cette dynamique se poursuit, le pays pourrait battre un nouveau record à la fin de l’exercice.
Selon les analystes, ce ralentissement inattendu du commerce extérieur accroît la pression sur Pékin pour relancer la demande intérieure d’ici la fin de l’année.
« Face à une succession de chocs négatifs qui pèsent sur la croissance — notamment sur les ventes au détail et les exportations — nous pensons que Pékin recentrera sa politique sur la stabilité à court terme », écrivaient récemment les analystes de la banque japonaise Nomura dans une note.
Le mois dernier, les autorités chinoises ont affirmé vouloir nettement augmenter la part de la consommation des ménages dans la croissance sur les cinq prochaines années, conformément aux objectifs définis lors du conclave du Comité central du Parti communiste pour la période 2026‑2030.
Mais cette ambition rencontre le scepticisme des économistes. Kenneth Rogoff, professeur d’économie internationale à Harvard, juge que bâtir un solide marché intérieur relève du « véritable défi », rappelant la chute persistante du marché immobilier, qui représente environ 80 % du patrimoine moyen des ménages chinois.
Autre difficulté : l’absence de système complet de retraite et de santé. « Les familles doivent épargner pour se soigner, il est donc très difficile de stimuler la consommation », explique M. Rogoff, ancien chef économiste du FMI.
Il prévoit un ralentissement supplémentaire de la croissance chinoise, autour de 2 à 3 %. Mais il doute que les statistiques officielles donnent l’image réelle de l’économie : « La Chine ne progressera pas à 5 ou 6 % l’an. Les chiffres officiels l’affirmeront peut-être, mais un vrai bilan indiquerait une croissance en net repli. »
Avec Reuters

Dorothy Li est journaliste pour Epoch Times.
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