Mumbai, une fascinante métropole éclectique

Par Christiane Goor et Charles Mahaux
8 septembre 2019 19:12 Mis à jour: 2 avril 2021 13:53

Il est 1h du matin quand enfin nous prenons un taxi qui va nous mener au cœur de la vieille ville dans le quartier du Fort où nous avons réservé nos 3 nuits d’hôtel. Malgré l’heure tardive, la circulation est incroyablement dense et bruyante, rythmée par l’utilisation abusive mais pacifique du klaxon. Même à cette heure indue, il faudra un peu plus d’une heure pour parcourir une vingtaine de kilomètres ! Le voyage a déjà commencé entre les masures de tôle ondulée installées au bord de la grand-route et les hautes silhouettes des immeubles qui bordent la côte. Avant de franchir la porte de notre hôtel installé au coin d’une rue tranquille et d’un boulevard, j’ai déjà aperçu un homme endormi dans son véhicule et une dame abritée sous son sari, étendue sur un lit de fortune tiré le long du trottoir, visiblement pas dérangée par la vie qui continue autour d’elle.

Il y a les marchés où la foule se presse entre les étals et les coolies qui transportent sur la tête leurs marchandises puis il y a tous ceux qui se contentent des trottoirs pour étaler leurs humbles paniers de légumes ou de fruits qu’ils écouleront avant la nuit. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Ambiance victorienne

C’est au cours de la seconde moitié du 17ème siècle que Bom Bahia la portugaise est cédée à la Compagnie des Indes britanniques. Mais il faudra attendre un siècle pour que des travaux importants d’assèchement des terres et de constructions de digues permettent de créer au départ de ces îlots une ville enfin accessible par la route et plus tard par chemin de fer. Pour marquer son influence sur les Indes, la Grande-Bretagne a tenu à développer le pays tout en créant à Bombay un style qui marie le style moghol local (comme le mausolée du Taj Mahal) et le style néo-gothique victorien. Bombay devient au 19ème siècle le visage tropical de Londres, avec d’imposants édifices victoriens qui étonnent encore aujourd’hui. A l’époque le port de Bombay est le plus influent sur le marché mondial, profitant entre autres de la guerre de Sécession américaine et de l’ouverture du canal de Suez.

Un édifice colonial qui raconte le développement urbain de la ville au 19ème siècle quand se sont élevés de nombreux bâtiments publics dans le style néo-gothique victorien. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

La balade le long de l’esplanade de l’Oval Maiden déploie un ensemble spectaculaire de bâtiments néo-gothiques victoriens construits en basalte igné, disponible localement dans l’arrière-pays, tandis que les sculptures décoratives sont en calcaire. Tourelles, flèches, arcs brisés, quadrilobes, gargouilles et plafonds voûtés, autant de caractéristiques néo-gothiques qui épousent des toits pentus de tuiles en terre cuite, des balcons sculptés et des vérandas linéaires adaptés au climat indien.

La Porte de l’Inde est un lieu de promenade classique pour les habitants de Mumbai, une belle occasion de se plonger dans la vie de la ville. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Icône de l’ère coloniale, la Porte de l’Inde, un imposant arc de triomphe en basalte dressé face au port intègre cependant des éléments d’architecture gujarati du 16ème siècle. Même style extravagant pour l’ancienne gare Victoria qui mêle les styles victorien, hindou et islamique avec des arcs-boutants, des dômes, des tourelles, des flèches, des colonnes corinthiennes et des gargouilles à tête de chiens. Un décor de château de contes de fée pourtant emprunté par 6 millions d’usagers quotidiens.

A l’horizon le quartier résidentiel chic de Malabar Hill où vit entre autres Mukesh Ambani, première fortune d’Inde, dans une tour de 173 m de haut où travaillent 600 employés au service d’une seule famille… (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Retour vers la promenade de Marine Drive le long de la mer d’Arabie, surnommée le « collier de la Reine (Victoria) » à la fois pour la richesse des immeubles Art Déco qui la composent et aussi pour les lumières qui scintillent à la nuit tombée en soulignant sa forme en arc de cercle. Un des rares endroits où se retrouvent les jeunes en couples ou en bandes, les familles aussi qui aiment à bavarder assises sur la digue en observant sur la presqu’île d’en face la colline nettement plus urbanisée de Malabar Hill où poussent des résidences plus luxueuses les unes que les autres.

Ville de bazars

Tout autour de la gare Victoria et bien au-delà vers le Nord, les marchés abrités dans de vastes bâtiments de style colonial ne manquent pas et chacun a sa spécialité. Les halles de Crawford Market alignent des montagnes de fruits et de légumes de saison mais aussi des douceurs sucrées, des épices parfumés, des étals de boucherie et même des oiseaux tropicaux piaillant dans leurs cages.

Les boutiques ne sont jamais bien grandes ni profondes mais elles offrent une incroyable quantité de produits divers bien répertoriés. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Les ruelles étroites du Zaveri Bazar permettent de trouver son bonheur entre pierres précieuses et bijoux en or. Dans les halles sombres du Null Bazar, ce sont les femmes drapées de saris colorés qui vendent à la criée leurs lots de poissons et de fruits de mer. Le Chor Bazar occupe tout un quartier dont chaque rue est dédiée à une activité particulière qui évoque un peu nos brocanteurs avec leurs collections d’antiquités, d’articles en bois, de maroquinerie, de statues indiennes, de masques, etc… Mais encore faut-il s’y rendre et apprendre à marcher dans cette ville pétaradante en cherchant à traverser au milieu des motos et des voitures qui se faufilent sans un regard pour les piétons. Le plus simple est encore de suivre le mouvement des autochtones habitués à zigzaguer entre les véhicules.

L’effervescence est souvent intense dans les rues envahies par les marchands et les motos. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Dès que l’on s’enfonce dans des ruelles, on est happé par les premiers marchands installés à même le sol ou assis sur une charrette, le plus souvent pour vendre des fruits, quelques légumes ou un verre de jus de canne à sucre fraîchement pressé. Des petits resto trottoirs s’improvisent au coin des rues, des morceaux de viande grésillent sur un grill, un curry d’aubergines se propose avec sa chapati ou encore des beignets farcis de légumes.

Les comptoirs de rue ou de marché sont autant de stands improvisés à partir de chariots équipés de poêles et autres ustensiles de cuisine. Un kaléidoscope d’odeurs épicées qui ne conviennent pas toujours à nos estomacs. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Cireurs de chaussures et marchands de journaux et de pacotilles occupent aussi des bouts de trottoir. On lève le nez sur les façades décrépies des maisons dont les balcons se garnissent de linge qui sèche ; au rez-de-chaussée, les portes s’ouvrent sur des boutiques peu profondes encombrées d’objets divers. Les enfants nous regardent avec curiosité, les adultes aussi, il n’y a jamais d’hostilité dans l’air. Bien au contraire.

Le spectacle est dans la rue

Mumbai est aussi une ville spirituelle où les temples soigneusement entretenus et fleuris accueillent les passants, leur offrant une oasis de quiétude au milieu du chaos de la rue. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Une façade dorée, des sandales abandonnées sur les marches de l’entrée, sans aucun doute un temple dédié à Ganesh, le dieu à tête d’éléphant dont l’effigie s’accroche aussi sur les troncs des arbres, prétexte à recevoir son lot d’offrandes fleuries. On s’étonne de la multitude de personnes, hommes ou femmes, qui pénètrent ces lieux saints pour y déposer une soucoupe garnie d’œillets d’Inde odorants autour d’une bougie. Plus loin, une vache broute la luzerne que lui offrent les passants. Un métier improbable pour la gardienne de la bête.

La vache indienne est sacrée car elle est vue comme « mère nourricière » puisqu’elle offre à tous son lait. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

C’est que les vaches errantes ne sont plus autorisées en ville depuis la multiplication du trafic. Elles sont regroupées dans de vastes fermes où elles sont choyées. Toutefois rien n’interdit d’en louer une pour quelques jours et c’est ainsi qu’elles occupent impassibles les coins de rues, dans l’attente d’une poignée de luzerne vendue quelques roupies. Plus loin, sur une placette, ce sont les pigeons qui sont à l’honneur. Ils coiffent complètement le seul arbre qui trône au cœur de l’espace, dans l’attente d’enfants qui viennent leur jeter des grains de maïs. Même les chiens errants sont heureux à Mumbai, entre les poubelles abandonnées et les déchets que leur donnent les habitants, très soucieux du bien-être des animaux.

Il y a ceux qui passent d’une rue à l’autre en tirant leur charrette portant d’énormes futs remplis d’eau puis il y a ceux qui attendent tranquillement leurs clients. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Les ruelles déjà sillonnées par les motos sont aussi encombrées par les livreurs d’eau qui tirent leur lourde citerne posée sur une charrette à deux roues. C’est que la plupart des maisons n’ont aucun accès à l’eau courante.

Mumbay, la capitale économique de l’Inde, lave son linge en plein air à deux pas de centres commerciaux branchés. (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Un autre métier insolite, ce sont les blanchisseurs organisés en confréries. Pieds nus dans des bassins en ciment, ils trempent les vêtements par couleurs, les nettoient, les rincent et les sèchent ensuite le long de fils torsadés qu’ils atteignent en baissant les troncs de bambou qui les supportent. Tout un univers où seuls les hommes travaillent pour un service rapide, à peine 24h.

Ce sont les hommes aussi qui repassent encore avec des fers chauffés au charbon de bois. Paradoxe de la modernité à Mumbai… (Christiane Goor et Charles Mahaux)

Un spectacle haut en couleurs et on se demande toujours par quel miracle ils parviennent à diriger ensuite le linge auprès de leur propriétaire. Assourdis par l’activité incessante de ces rues remplies de couleurs, d’odeurs et d’Indiens radiants d’énergie, quel bonheur de se poser ensuite devant une table toujours savoureuse. Manger en Inde est un autre voyage, un art de vivre !

 

Infos pratiques :

Un visa est obligatoire et il faut faire les démarches avant l’arrivée dans le pays. On peut le demander en ligne, l’e-Tourist Visa est valable 60 jours.

Le plus simple est de changer de l’argent à l’aéroport. 1 euro donne en gros 75 roupies. Les cartes de crédit sont acceptées dans les hôtels et restaurants un peu chics mais la vie n’est pas chère pour un Occidental.

Se loger :

Dans le quartier du Fort, non loin de la gare Victoria et proche du centre, le Residency Hotel situé dans un quartier tranquille offre un excellent rapport qualité prix incluant un petit déjeuner de qualité. www.residencyhotel.com

Inauguré en 1903, le Taj Mahal Palace est un modèle du mélange d’architecture moghol et victorienne.  (Christiane Goor et Charles Mahaux)

A moins que vous ne puissiez vous offrir le prestigieux Taj Mahal Palace construit par Jamsetji Tata, père de l’industrie indienne qui s’était vu refuser l’accès dans un hôtel britannique. Il est devenu le symbole du rayonnement international de l’Inde et de son goût en matière de luxe. www.tajhotels.fr 

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