« On va transformer notre dépendance aux énergies fossiles en une dépendance aux métaux » pour la transition énergétique

Par Nathalie Dieul
12 octobre 2023 05:47 Mis à jour: 12 octobre 2023 05:47

Avec la transition énergétique, la demande en métaux est « énorme », selon Benjamin Louvet, coauteur de Métaux, le nouvel or noir. Demain la pénurie ? Par exemple, pour construire une seule éolienne, il faut entre 950 kg et cinq tonnes de cuivre. La dépendance de la France envers la Chine est totale.

« Le vent souffle partout, le soleil brille partout, mais on ne fait pas d’électricité avec du vent ou du soleil », explique Benjamin Louvet dans une entrevue au Figaro. Considéré comme l’un des meilleurs experts français en énergies fossiles et en métaux, il rappelle que pour obtenir de l’électricité avec une éolienne ou un panneau solaire, il faut fabriquer un transformateur et pour cela, il faut des métaux. Beaucoup de métaux. La fabrication de voitures électriques aussi a de gros besoins en métaux.

Le spécialiste détaille : « dans une éolienne, vous avez entre 950 kg et 5 tonnes de cuivre en fonction de la taille de l’éolienne ». Pour ce qui est d’une voiture électrique, elle contient quatre fois plus de cuivre et six fois plus de métaux critiques qu’une voiture thermique.

« Les besoins sont énormes »

« La transition énergétique veut dire qu’on va transformer notre dépendance aux énergies fossiles en une dépendance aux métaux », prévient Benjamin Louvet. Le problème n’est pas simplement de passer d’une dépendance à une autre, c’est surtout que nous ne sommes pas prêts à faire face aux multiples défis que cela engendre.

« Est-ce qu’on peut sortir ce métal de sous la terre au rythme qui est nécessaire pour pouvoir soutenir l’objectif qu’on s’est fixé d’arriver à zéro émission nette en 2050 grâce notamment aux énergies renouvelables ? » interroge celui qui est par ailleurs gérant d’actifs chez Ofi Invest AM.

« Les besoins sont énormes », assure Benjamin Louvet à Sud-Ouest. « Le CNRS explique que dans les trente ans qui viennent, il va falloir extraire de la croûte terrestre autant de métaux que depuis le début de l’histoire de l’humanité. »

De son côté, Robert Cohen, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Fonds Dynamique, estime que nous allons manquer de certains métaux. Il a déclaré à nos confrères de Finance et investissement : « de gigantesques déficits se profilent d’ici les sept prochaines années ; de quelque façon qu’on retourne le problème, nous allons être à court face à la demande ».

Par exemple, il faudra 300% plus d’aluminium, de cuivre, d’indium, de nickel, d’argent et de zinc pour construire les panneaux solaires nécessaires à la transition énergétique. Quant aux batteries de stockage d’électricité, elles vont nécessiter 1200% plus d’aluminium, de cobalt, de plomb, de lithium et de manganèse.

Une cinquantaine de métaux critiques

Dans son livre de Benjamin Louvet coécrit avec Emmanuel Hache, un autre spécialiste des terres rares et des métaux critiques, on peut lire que dans l’état actuel de nos connaissances, il nous resterait 42 années de cuivre, 35 années de nickel, 44 années de cobalt. Au total, une trentaine de métaux sont sur la liste des métaux considérés critiques par l’Europe. En y ajoutant les terres rares, on arrive plutôt à un total d’une cinquantaine de métaux critiques.

Selon l’Agence internationale de l’énergie (AEI), il y aurait 250 mines de cuivre dans le monde, ce qui n’est pas suffisant pour les prochaines années. « Si on veut répondre à nos besoins, il faut rajouter 80 mines d’une taille équivalente à la taille de ces 250 mines », explique Benjamin Louvet.

Seulement, il y a un problème de taille : le délai pour ouvrir une mine est de 17 ans. Or, pour répondre à la demande future, il faudrait que la création de ces 80 nouvelles mines de cuivre soit décidée avant 2025. Pourtant, il n’y a que moins d’une dizaine de projets de mines de cuivre à l’étude actuellement.

Une dépendance absolue à la Chine

La Chine a pris beaucoup d’avance dans le domaine, sécurisant son approvisionnement en métaux depuis le début des années 2000. « Ils [les chinois, ndlr] y ont été aidés chez eux par l’émergence, à la même période, d’une classe moyenne d’à peu près 350 millions de personnes, ce qui a généré une demande gigantesque en infrastructures, en immobilier et en biens de consommation. »

La Chine est devenue « incontournable sur la quasi-totalité des métaux nécessaires à la transition énergétique, soit parce qu’elle les produit, comme les terres rares, soit parce qu’elle les raffine, comme le lithium, le cobalt ou le nickel », précise le spécialiste.

« Notre dépendance est absolue », ajoute-t’il. Vu les délais avant qu’une nouvelle mine soit opérationnelle, « il faut être très clair, on va être dépendant de la Chine pour encore un bon moment. »

Des mines en France ?

Le secteur minier étant le secteur industriel qui a la plus mauvaise image, même derrière le secteur pétrolier, « on a abandonné l’idée d’avoir une exploitation minière en France », remarque Benjamin Louvet. L’activité minière a en effet un grand impact environnemental, un grand impact sur la biodiversité.

Le président Emmanuel Macron a toutefois annoncé le 25 septembre le lancement d’un grand inventaire des ressources minières de la France : « on doit disposer d’une carte précise des ressources en matière de lithium, de cobalt qui se trouvent sur notre territoire », a-t’il déclaré. Le média Les Echos prévient : « Qui dit inventaire, dit à terme exploitation et ouverture de mines sur le territoire ».

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