Selon un rapport, Pékin est responsable de la « plus grande répression transnationale au monde » visant à faire taire la diaspora

Par Eva Fu
30 septembre 2021 16:57 Mis à jour: 14 octobre 2021 12:07

Selon un récent rapport, le régime chinois a mis en place la « plus grande campagne de répression transnationale au monde » pour s’assurer que les communautés chinoises dans le monde suivent la ligne du Parti.

Cette vaste campagne vise les dissidents qui ont fui la Chine et ceux qui ont un point de vue différent de celui du régime. Les tactiques de Pékin comprennent l’espionnage, les menaces, le harcèlement, les agressions physiques et la pression sur les familles ou les proches restés en Chine, selon le rapport de près de 650 pages de l’Institut d’études stratégiques des écoles militaires (IRSEM), un organisme indépendant affilié au ministère français des Armées.

Le rapport présente un aperçu complet des opérations d’influence chinoises dans le monde.

Le régime exerce également des pressions directes sur au moins 9 États étrangers, exigeant de ces pays l’arrestation des individus recherchés par les autorités chinoises.

Environ 60 millions de Chinois de souche vivent en dehors de la Chine. Les États-Unis connaissent la croissance la plus rapide de la population chinoise, selon le Bureau des affaires chinoises d’outre-mer, un organe administratif relevant du Conseil des affaires d’État chinois, qui assure la liaison avec les Chinois d’outre-mer.

Pour le régime, cette population est la « cible prioritaire » de ses opérations d’influence, car elle a facilement accès à des opinions non censurées critiques envers le Parti communiste chinois (PCC). Les Chinois à l’étranger sont susceptibles de transmettre des informations qui déplaisent au régime à leurs proches en Chine continentale, selon le rapport.

Bien que la grande majorité d’entre eux aient une nationalité étrangère et ne soient donc pas considérés comme des ressortissants chinois, Pékin considère les Chinois de souche à l’étranger comme les membres d’une « grande famille chinoise » à laquelle ils sont rattachés par les liens du sang. Ceux qui sortent du rang sont qualifiés de « traîtres ».

Le 23 août 2019, à Vilnius, l’ambassadeur de Chine en Lituanie et des fonctionnaires de l’ambassade de Chine décident d’initier une contre-manifestation pour perturber un rassemblement de soutien au mouvement pro-démocratique de Hong Kong. La police intervient et arrête deux fonctionnaires. Plusieurs diplomates s’approchent des agents avec leurs badges de l’ambassade pour ordonner qu’on les relâche. Finalement, la Lituanie, qui n’apprécie pas « les actions des représentants de l’ambassade de Chine contre les libertés démocratiques inscrites dans la Constitution », convoque l’ambassadeur chinois et lui fait savoir que son personnel a « violé de l’ordre public ».

En Suède, deux hommes d’affaires au compte du régime chinois essayent de faire taire la militante Angela Gui, fille du libraire et éditeur suédois d’origine chinoise Gui Minhai, condamnée par Pékin à 10 ans de prison en 2020. Lors d’une rencontre en février 2019 à Stockholm, les hommes d’affaires lui promettent d’obtenir la libération de son père si elle arrête de s’exprimer dans les médias, selon le rapport.

Sur une pancarte (centre gauche) on voit la photo de l’éditeur suédois d’origine chinoise Gui Minhai.  (Photo ANTHONY WALLACE/AFP/Getty Images).

L’un des hommes lui fait entendre qu’en cas de non-coopération, il est possible qu’elle ne revoie jamais son père.

Selon son témoignage, il la menace en ses termes : « Qu’est-ce qui est le plus important pour toi, tes valeurs ou ton père ? »

La rencontre entre Angela Gui et ses deux hommes est organisée par l’ambassadrice de Suède en Chine, Anna Lindstedt. Après un tollé général en Suède, le pays rappelle Anna Lindstedt et la place sous enquête.

Angela Gui n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de Chinois vivant à l’étranger menacés par des agents du PCC.

Miss Monde Canada Anastasia Lin s’adresse à son public lors d’un événement en son honneur au Spoke Club dans le centre-ville de Toronto, le 15 décembre 2015. (Matthew Little/Epoch Times)

L’actrice canadienne Anastasia Lin s’est attiré la colère de Pékin en raison de son statut de pratiquante de Falun Gong, un groupe spirituel persécuté, et pour son franc-parler en matière de droits de l’homme. Déclarée « persona non grata » par Pékin, elle s’est vu refuser un visa chinois.

Après avoir été couronnée Miss Monde Canada en 2015, elle reçoit un appel de son père, qui dirige une importante entreprise dans la province du Hunan, dans le sud de la Chine. Il lui annonce qu’il vient de recevoir la visite des forces de sécurité chinoises. Sous la pression des autorités, il la supplie d’arrêter de militer.

« Cela peut arriver à n’importe qui »

L’intimidation est une autre tactique utilisée par le PCC, indique le rapport. Certaines personnes ciblées reçoivent des appels abusifs à minuit. Des militants et des hommes politiques qui adoptent une position critique à l’égard de la Chine font également l’objet de chantage.

Le régime essaye également de discréditer les dissidents. Se faisant passer pour eux, il envoie des courriels insultant  à des responsables étrangers en leur nom, selon le rapport.

En 2015, l’homme politique canadien d’origine chinoise Richard Lee, vice-président de l’Assemblée législative de la Colombie-Britannique, est détenu pendant 8 heures à son arrivée dans un aéroport de Shanghai, du fait de ses activités « mettant en danger la sécurité nationale ». La police passe au crible ses téléphones personnels et gouvernementaux avant de l’expulser du territoire chinois.

En 2019, alors qu’il révèle les faits, il déclare que cet accueil lui a été réservé en raison de son engagement à défendre des droits de l’homme en Chine et plus particulièrement pour sa participation annuelle à une veillée à la bougie qui commémore les victimes du massacre de Tiananmen.

Le fait qu’un haut fonctionnaire tel que M. Lee « puisse être harcelé » signifie que, comme il le dit lui-même, « cela peut arriver à n’importe qui ».

Le rapport indique que des événements similaires à ceux au Canada ont lieu « dans toutes les démocraties libérales comptant une importante diaspora chinoise ».

Cibler le Falun Gong

Dans le but d’éradiquer le groupe spirituel du Falun Gong, qui a fait l’objet d’une vaste campagne de persécution de la part du PCC en 1999, Pékin a recruté plus de 1 000 agents au Canada, dont des Canadiens d’origine chinoise, des hommes d’affaires et des étudiants, indique le rapport, qui cite Hao Fengjun, un ancien officier de police du bureau 610 (la Gestapo chinoise), crée spécialement pour persécuter le Falun Gong.

Le régime a mis en place des réseaux d’informateurs ciblant les pratiquants de Falun Gong en Australie et aux États-Unis, selon Chen Yonglin, ancien consul chinois à Sydney, dont le travail consistait à « surveiller et persécuter » le Falun Gong, indique le rapport. Les diplomates recevaient également des directives pour identifier les pratiquants et les inscrire sur une liste noire, empêchant ainsi leur retour en Chine, témoigne Chen Yonglin, qui lui même a fui la Chine pour l’Australie où il a obtenu l’asile en 2005.

L’ancien diplomate chinois Chen Yonglin, lors d’une conférence de presse à Sydney après avoir obtenu un visa de protection, a mis en garde contre le programme communiste chinois visant à influencer les Australiens. (Greg Wood/AFP/Getty Images)

Des réseaux d’informateurs d’une ampleur similaire à celle décrite par Hao Fengjun existent également aux États-Unis et en Australie, a révélé M. Chen.

En 2004, Pan Xinchun, consul général adjoint de Chine à Toronto, a été reconnu coupable de diffamation pour avoir utilisé des mots calomnieux à l’encontre d’un pratiquant de Falun Gong, tandis que deux membres du personnel du consulat chinois à Calgary ont été vus en train de distribuer des tracts haineux contre la pratique dans l’enceinte de l’université d’Alberta.

Réprimer les médias étrangers

Certains journalistes du réseau Epoch Times ont également été victimes de la campagne d’intimidation du régime. En 2010, Tao Wang, journaliste pour la télévision en langue chinoise NTD, un média partenaire d’Epoch Times, a révélé qu’il avait reçu des appels téléphoniques d’agents chinois le menaçant de mort.

Les menaces se sont intensifiées après son refus d’accéder à leurs demandes.

Selon le témoignage de Tao Wang au médias locaux de l’époque, ils lui ont dit : « Tu crois vraiment qu’on ne peut rien te faire parce que tu es au Canada ? » Ils ont ensuite ajouté : « Si tu en parles publiquement, tu cherches la mort. »

Tao Wang, qui avait également une entreprise en Chine, a appris que des agents chinois avaient rendu visite à ses clients, leur disant qu’il « participait à des activités illégales au Canada qui nuisent à la sécurité nationale de la Chine ». Le jour même où il a reçu cet appel téléphonique, les comptes bancaires de son entreprise en Chine ont été gelés.

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