Pourquoi la douleur chronique est générée par le cerveau

Photo: Illustration par Epoch Times, Shutterstock
Les approches standards, comme les antalgiques, les examens d’imagerie ou la chirurgie, échouent souvent, laissant les patients prisonniers d’un cycle de douleur sans véritable solution.
Et si, au lieu de se concentrer uniquement sur la zone blessée, on s’intéressait à l’ensemble de la personne ? Une approche intégrative et centrée sur le patient considère la douleur au-delà de la structure corporelle et offre une vision plus complète, avec potentiellement de meilleurs résultats. Elle prend en compte non seulement la structure, mais aussi le système nerveux, les réponses immunitaires, les antécédents de traumatismes et le mode de vie, ce qui permet d’avoir une vision plus globale et, potentiellement, d’améliorer la prise en charge.
Médicaments contre la douleur
Le Dr Ravindran est certifié dans trois spécialités : la médecine du mode de vie, la médecine musculosquelettique et la médecine de la douleur. Il est reconnu pour son approche pionnière et holistique de la gestion de la douleur.
Il met en garde contre une dépendance excessive aux médicaments en raison de leurs effets secondaires. Les résultats des essais cliniques de ces médicaments ne reflètent pas toujours leur efficacité en conditions réelles, explique-t-il, car les patients dans la vraie vie souffrent souvent aussi de dépression, d’anxiété, de stress post-traumatique ou de diabète — des facteurs rarement représentés dans les essais cliniques. Cette différence peut conduire à surestimer l’efficacité des médicaments ou à sous-estimer leurs risques lorsqu’ils sont utilisés chez des patients ayant des antécédents médicaux plus complexes.
« Les résultats ne se traduisent pas toujours », affirme le Dr Ravindran. Les opioïdes, par exemple, peuvent offrir un soulagement à court terme, mais comportent de graves risques à long terme, notamment une dépendance, des troubles de l’humeur, une perturbation hormonale, une hypersensibilité à la douleur, et même, dans certains cas, un risque accru de démence.
Malgré cela, les médicaments restent souvent l’option par défaut, en grande partie à cause du manque de temps en consultation.
« Quand on dispose de 10 à 15 minutes avec un patient, les antalgiques peuvent sembler la seule solution », explique-t-il.
« Mais s’ils ne fonctionnent pas, il faut être prêt à élargir la perspective et à aller plus en profondeur. »
Types de douleur
Ils sont souvent efficaces dans les cas de douleur nociceptive — douleur causée par une inflammation active ou une blessure — où des signaux chimiques sont libérés sur le site affecté. En revanche, ils sont moins efficaces contre la douleur neuropathique, liée à une atteinte des nerfs eux-mêmes, et encore moins contre la douleur nociplastique, un type de douleur où le système nerveux devient hypersensible ou hyperprotecteur sans cause structurelle claire.
Exemples de douleur nociceptive : blessures aiguës, fractures, inflammation articulaire due à l’arthrite, souvent accompagnées de fièvre ou de marqueurs inflammatoires élevés.
La douleur neuropathique, quant à elle, peut résulter d’un nerf sectionné après une chirurgie ou de maladies comme la sclérose en plaques, la maladie de Parkinson ou la neuropathie diabétique. Le traitement inclut souvent des médicaments plus puissants ciblant les nerfs, la stimulation de la moelle épinière, les blocs nerveux ou des perfusions intraveineuses.
La douleur nociplastique est caractéristique de maladies comme la fibromyalgie, la migraine, le syndrome de l’intestin irritable ou les lombalgies sans modifications structurelles identifiables.
Ce que l’on néglige souvent dans les plans de traitement actuels, ce sont les facteurs liés au mode de vie qui entretiennent la douleur. Une approche efficace devrait être multimodale et personnalisée, en ciblant l’ensemble des influences sur la santé d’une personne, selon une revue de littérature publiée en 2020.
Pour y parvenir, il faut d’abord changer notre manière de concevoir la douleur elle-même.
La décision du cerveau
Or, au cours des vingt dernières années, les neurosciences ont montré que la douleur est bien plus complexe. Elle n’est pas seulement une réaction directe à une lésion des tissus. « C’est une décision du cerveau, basée sur l’expérience passée et le contexte, pour déterminer si une protection est nécessaire. Cette décision crée la perception de la douleur », précise-t-il.
Cette perception explique pourquoi la douleur peut persister longtemps après la guérison d’une blessure ou apparaître en l’absence de tout dommage visible. Pourtant, de nombreux cliniciens continuent de privilégier les explications purement structurelles.
« Si l’on reste bloqué sur la structure, on tourne en rond : plus de scanners, plus de chirurgies, puis des reprises chirurgicales, et les patients continuent de souffrir », souligne-t-il.
L’imagerie est une réponse fréquente mais souvent trompeuse à la douleur. Selon le Dr Ravindran, il existe un décalage manifeste entre les résultats des examens et l’expérience vécue de la douleur. Les IRM révèlent que beaucoup de personnes présentant des anomalies structurelles n’ont en réalité aucune douleur.
Les études montrent que 67 % des personnes asymptomatiques présentaient une déformation de la hanche appelée « conflit pincer », 75 % des seniors asymptomatiques avaient des protrusions discales, et jusqu’à 43 % des personnes asymptomatiques de plus de 40 ans présentaient des signes d’arthrose.
« Les changements structurels surviennent avec l’âge, souvent sans provoquer de douleur », rappelle le Dr Ravindran.
À l’inverse, des patients ayant subi de fausses chirurgies — sans aucune réparation réelle — ont connu les mêmes améliorations que ceux qui avaient bénéficié d’opérations authentiques.
« Le rituel a un sens. La réponse du cerveau aux attentes peut être incroyablement puissante », explique-t-il. Si la douleur est une décision du cerveau visant à protéger, il faut se demander : « Contre quoi essaie-t-il de protéger ? »
S’il n’y a aucun signe de blessure ou d’infection, qu’est-ce qui se passe alors dans la vie de la personne, dans son système nerveux ou son système immunitaire ?
La douleur n’est pas seulement une sensation physique : c’est aussi une expérience émotionnelle, façonnée par la façon dont le cerveau interprète les stimuli qu’il reçoit, souligne le Dr Ravindran. Les entrées sensorielles proviennent à la fois de sources internes et externes.
• En interne, le cerveau reçoit des signaux par l’interoception, notamment des retours des organes internes et de l’intestin, en grande partie via le microbiote, le système immunitaire et le nerf vague.
• En externe, il collecte des données à travers la peau (toucher), les yeux (vue) et le nez (odorat).
Il compare ensuite ces informations avec les expériences passées stockées en mémoire.
La douleur est une réponse à de véritables signaux sensoriels, mais cette réponse est filtrée par un système qui cherche en permanence à évaluer les menaces. Le système immunitaire joue un rôle essentiel dans ce processus : il abrite des cellules capables de garder en mémoire les agents pathogènes et les dangers, aidant ainsi l’organisme à se défendre. Selon ce que le cerveau estime nécessaire pour protéger le corps, des substances pro-inflammatoires peuvent être libérées. Cela peut entraîner des dommages collatéraux sous la forme d’une neuroinflammation de bas grade.
Les systèmes immunitaire, nerveux et endocrinien sont étroitement liés : ils forment une véritable unité de surveillance, de protection et d’adaptation face aux environnements internes et externes dans lesquels nous évoluons, conclut le Dr Ravindran.
La plupart des douleurs chroniques sont souvent générées par le cerveau et enracinées dans des émotions non ressenties plutôt que dans des lésions tissulaires, a expliqué à Epoch Times Patricia Worby. La guérison passe souvent par l’aide apportée à la personne pour qu’elle puisse ressentir et traiter en toute sécurité ces émotions enfouies depuis longtemps, a-t-elle ajouté.
S’appuyant sur ces idées, on reconnaît de plus en plus que pour gérer la douleur efficacement, il faut élargir la boîte à outils.
Traitements alternatifs de la douleur
Les approches suivantes sont particulièrement utiles dans les cas de douleur nociplastique, qui répond généralement mal aux traitements standards.
Nutrition
À l’inverse, une alimentation riche en aliments complets et non transformés peut aider à apaiser le système immunitaire et à réduire les signaux douloureux.
Sommeil réparateur
Enseigner aux patients des stratégies d’hygiène du sommeil — comme instaurer des routines régulières ou s’exposer à la lumière naturelle durant la journée — peut constituer une part importante du traitement.
Même de faibles doses de luminothérapie ont permis d’améliorer à la fois l’humeur et l’intensité de la douleur chez des personnes souffrant de lombalgie chronique non spécifique.
Mouvement
Il a également été démontré qu’un programme de yoga était tout aussi efficace que la kinésithérapie pour la lombalgie chronique non spécifique.
Apaiser les systèmes nerveux et immunitaire
Des pratiques comme la respiration diaphragmatique lente ou la « respiration en boîte » (inspiration, rétention, expiration, rétention, chaque phase durant quelques secondes) peuvent contribuer à réduire la douleur et les tensions.
Prise en charge tenant compte des traumatismes
Aider le système nerveux à retrouver un sentiment de sécurité est donc fondamental. Cela peut inclure des pratiques de respiration, le tapping, les mouvements oculaires, la thérapie par le son ou encore le soutien du nerf vague, a expliqué Patricia Worby.
Plan de gestion holistique de la douleur
Au quotidien, ce plan pourrait inclure :
• Une pratique matinale de mouvement, comme le yoga.
• Un usage approprié des médicaments.
• Des techniques corps-esprit.
• Le suivi d’un régime anti-inflammatoire.
• La réduction ou l’arrêt de la consommation d’alcool après 18 h.
• L’évitement du café au moins six à huit heures avant le coucher.
• L’objectif de six à huit heures de sommeil par nuit.
• L’intégration de pratiques de gestion du stress dans la journée.
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