Poutine, tsar guerrier en quête de grandeur internationale

Par Epoch Times avec AFP
18 mars 2024 09:26 Mis à jour: 18 mars 2024 09:36

Invasion de l’Ukraine, répression en Russie, confrontation avec les Occidentaux : c’est en chef de guerre autoritaire que Vladimir Poutine, au pouvoir depuis un quart de siècle, s’est assuré six années supplémentaires au Kremlin.

Le dirigeant russe caracole à plus de 87% des suffrages, après dépouillement de plus de 99% des bureaux de vote, selon l’agence officielle russe Ria Novosti, à l’issue d’un scrutin dont l’opposition a été privée.

Ce scrutin de trois jours, de vendredi à dimanche, a été marqué par des bombardements ukrainiens meurtriers et des incursions de combattants armés se disant être des Russes pro-Ukraine dans des régions russes frontalières, ainsi que par des actions de protestation dans les bureaux de vote.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé que M. Poutine était un homme « ivre de pouvoir » voulant « régner éternellement » et le chef de la diplomatie britannique David Cameron a déploré l’absence d’élections « libres et équitables » en Russie. Les États-Unis ont critiqué la tenue du scrutin dans les territoires ukrainiens occupés par Moscou.

M. Poutine, qui a fait réviser en 2020 la Constitution pour pouvoir rester aux commandes de son pays jusqu’en 2036, a déjà effectué quatre mandats (deux de quatre ans, deux autres de six ans), entrecoupés par un intermède en tant que Premier ministre.

« Pas de lien avec la réalité »

Au fil des ans, la verticale du pouvoir instaurée par Vladimir Poutine, issu du KGB soviétique et arrivé au Kremlin le 31 décembre 1999, a révélé deux grandes caractéristiques de son régime. La première, celle d’un durcissement constant avec d’abord la mise au pas des oligarques, la deuxième guerre de Tchétchénie, l’étouffement des libertés publiques, des médias et de l’opposition. Son plus célèbre opposant, Alexeï Navalny, est mort mi-février dans des circonstances troubles dans la prison de l’Arctique russe où il purgeait une longue peine pour « extrémisme ».

L’équipe d’Alexeï Navalny a déclaré que le score obtenu par Vladimir Poutine à la présidentielle russe n’avait « pas de lien avec la réalité ».

Pour cette présidentielle, la veuve du détracteur numéro un de Vladimir Poutine, Ioulia Navalnaïa, avait appelé ses partisans à se montrer en nombre en allant tous voter au même moment, à midi dimanche, contre le maître du Kremlin. Elle-même a voté après plusieurs heures d’attente dans une foule immense à l’ambassade de Russie à Berlin. « J’ai écrit (sur le bulletin de vote) le nom Navalny parce qu’il n’est pas possible (…) qu’un mois avant les élections, le principal opposant à Poutine, déjà emprisonné, soit tué », a-t-elle déclaré à la presse après avoir voté.

Deuxième caractéristique : une quête de puissance géopolitique, avec la guerre en Géorgie (2008), l’annexion de la Crimée ukrainienne (2014), l’intervention militaire en Syrie (2015), et l’invasion de l’Ukraine (2022). L’Europe, en particulier l’Allemagne d’Angela Merkel, avait cru pouvoir canaliser ces ambitions, pariant sur l’interdépendance économique via des achats massifs de gaz russe. En vain.

Une question de « vie ou de mort » avec l’Ukraine

À 71 ans, Vladimir Poutine semble plus indéboulonnable que jamais. Le maître du Kremlin est certes empêtré dans la guerre en Ukraine et son armée a subi d’humiliantes défaites mais il persiste, tablant sur une victoire à l’usure grâce à la fatigue des bailleurs occidentaux et de la population ukrainienne.

Et, deux ans après le début de l’assaut, Vladimir Poutine voit des raisons d’y croire. Ses troupes, à l’offensive, se sont emparées de la ville forteresse d’Avdiïvka, dans l’est, et poussent face à une armée ukrainienne en manque de munitions et d’hommes. Fin février, le président russe a juré que ses soldats « ne reculeraient pas » en Ukraine. Pour la Russie, c’est une « question de vie ou de mort », répète-t-il à l’envi. Et, cette semaine, il a jugé « crucial » que les électeurs russes votent comme un seul homme pour rester sur le « chemin » tracé.

Depuis qu’il a déclenché l’offensive, il a accusé l’Ukraine de « nazisme », revendiqué ses territoires et présenté le conflit comme une guerre par procuration ourdie par les Américains. Toute opposition à l’invasion est passible de prison. Des milliers de Russes ont été harcelés, poursuivis, emprisonnés ou poussés à l’exil.

Qu’importe les sanctions occidentales, qu’importe la Cour pénale internationale qui poursuit Vladimir Poutine pour la déportation d’enfants ukrainiens et qu’importe les pertes de l’armée. Car le président russe s’est donné une mission : en finir avec l’hégémonisme occidental.

En octobre, il annonce avoir pour « tâche de bâtir un nouveau monde ». Il faut dire que l’ex-agent du KGB, en poste en Allemagne de l’Est dans les années 1980, reste meurtri par la désintégration de l’Union soviétique et sa défaite dans la Guerre froide. Et Vladimir Poutine peut se targuer de sa proximité avec la Chine, de la soif de l’Asie pour ses hydrocarbures ou encore de voir ces pays africains se tourner vers Moscou et ses groupes paramilitaires pour contrer le « néocolonialisme » occidental. Avec l’échec de la contre-offensive ukrainienne de l’été 2023, Vladimir Poutine se sent les coudées plus franches, les Occidentaux se divisant sur la poursuite de l’aide à l’Ukraine.

Il a opéré un retour sur la scène internationale et l’économie russe a globalement absorbé le choc des sanctions occidentales, malgré l’inflation et la dépendance envers la production militaire.

Le Kremlin ne tolère aucune opposition

Tout puissant qu’il soit, les défis ne manquent pas. Sa guerre en Ukraine est loin d’être gagnée. La capacité des Russes, des élites et de l’économie à supporter ce conflit dans la durée reste un véritable point d’interrogation. La mutinerie en juin 2023 des mercenaires de Wagner, conduite par Evguéni Prigojine, longtemps un de ses fidèles, en a été l’illustration. La mort des chefs rebelles dans un crash d’avion, présenté comme accidentel, a permis au Kremlin de clore ce chapitre.

Sur le front politique intérieur, le Kremlin ne tolère aucune opposition. Certains sont morts, comme Alexeï Navalny et Boris Nemtsov, assassiné en 2015. D’innombrables militants connus et anonymes sont derrière les barreaux pour avoir dénoncé l’invasion de l’Ukraine.

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