La prise en charge de la douleur chez le fœtus, que nous révèle la science?

24 décembre 2016 16:26 Mis à jour: 27 février 2017 10:18

La prise en charge de la douleur chez le fœtus est de plus en plus questionnée dans le monde médical. Aux États-Unis, sept états reconnaissent que le fœtus peut faire l’expérience de la douleur dès vingt semaines de grossesse. En France, l’observation de l’expérience de la douleur chez les grands prématurés a orienté les médecins vers une prise de conscience de cette douleur chez le fœtus.

La gynécologue obstétricienne Véronique Houffin Debarge déclarait notamment à la « Fondation de coopération scientifique sur la grossesse et la prématurité PremUP », lors de la publication du programme des Assises organisées par la Fondation en 2010 sur la douleur du fœtus et du nouveau-né: « Lors des gestes foeticides par exemple, réalisés lors des interruptions médicales de grossesse au troisième trimestre de la grossesse, il est nécessaire d’assurer au préalable une anesthésie du fœtus avant d’injecter le produit qui va arrêter sa vie ».

Ce qu’en dit la science

Cependant le monde scientifique est partagé, la majorité admet que l’embryon peut présenter des mouvements spontanés quelques semaines après la fécondation. En effet, trois semaines après la conception, le cerveau se manifeste sous la forme d’une couche de cellules aplaties appelée plaque neurale qui va émettre les premiers signaux pour induire le développement des motoneurones spinaux (connectés à la moelle épinière). Les premiers battements du cœur se produisent à la fin de la troisième semaine après fécondation. Et à la cinquième semaine de grossesse, les yeux et les oreilles commencent à se former.

À ce stade, la science sait également que l’un des premiers récepteurs sensoriels devient fonctionnel. Il s’agit de la somesthésie qui permet à l’embryon d’avoir une sensibilité cutanée et de manifester une réponse au contact, à la chaleur et au froid ainsi qu’à la douleur. De même sait-on que la zone autour de la bouche est sensible dès cinq semaines et demie après fécondation. Les célèbres travaux du docteur Davenport Hooker  publiés par Yale journal of biology and medecine de l’université de Yale aux États-Unis, en 1960, ont établi que peu après la formation de ces récepteurs, l’embryon présentait des mouvements spontanés dont l’origine est inconnue autour de 9 semaines et demie d’aménorrhée, soit 7 semaines et demie après fécondation.

Ces mouvements spontanés sont considérés par une partie des scientifiques comme étant des réflexes qui ne signifient pas l’expérience consciente de la douleur. C’est le cas du  docteur Mark Rosen de l’université de Californie à San Francisco qui a participé en 2005, avec d’autres spécialistes, à la rédaction d’un rapport sur la douleur fœtale publié par JAMA, le journal de l’association médicale américaine. Ce rapport indique que la conscience de la douleur chez le fœtus dépend des liaisons entre le thalamus et le cortex qui n’apparaissent qu’entre la 23ème et la 30ème semaine après fécondation.

La douleur, mais à combien de semaines?

D’autres scientifiques reconnus comme le docteur K. Anand, pédiatre spécialisé dans le soin des nouveau-nés et des enfants atteints de maladies graves, affirment que l’on ne peut pas  évaluer la douleur chez le fœtus en fonction des liaisons thalamocorticales. En effet, ils s’appuient notamment sur les découvertes reconnues du psychologue Ronald Melzack et de l’anatomiste Patrick Wall publiées par la revue Sciences 1965. Ceux-ci ont démontré que le signal nerveux résultant d’une stimulation douloureuse était traité par la moelle épinière avant d’arriver au cerveau.

Le docteur Anand a également affirmé au cours d’une audience pour le département de Justice des États-Unis en 2004: « Il a été observé sur plusieurs fœtus à partir de seize semaines de gestation, une réponse hormonale suite à une stimulation douloureuse, ce qui nous fournit une preuve supplémentaire sur le fait que le fœtus peut expérimenter la douleur ».

Il précise aussi que le fœtus de 20 à 32 semaines de gestation expérimenterait une douleur plus intense encore que celle des enfants et des adultes. Cependant, en 2000, la Chambre des Lords, au Royaume-Uni, ouvrait une commission d’enquête sur la conscience du fœtus et déclarait notamment: « La plupart des gens sont maintenant d’accord sur le fait que les bébés à naître ont la capacité de sentir la douleur dès 24 semaines après la conception et il y a un ensemble de preuves grandissant et considérables que le fœtus serait capable d’expérimenter la souffrance dès environ 11 semaines de développement. Certains commentateurs pointent le fait que le tout premier mouvement chez le bébé a été observé à 5,5 semaines après conception, et qu’il serait capable de souffrir dès ce stade ».

La nature, quant à elle, nous amène à examiner le cas des  nouveau-nés présentant une hydranencéphalie, maladie qui se traduit par une absence des hémisphères cérébraux, soit une absence du cortex. Ces enfants peuvent survivre dans certains cas jusqu’à un an après la naissance et présentent des signes de conscience.

C’est ce qu’indique un cas rapporté dans le West African Journal of Medecine,Vol.25 NO3 en 2006, par les docteurs J.A. Olowu, I.A. Lagunju, O.O Tongo et M. Atalabi du département de pédiatrie et radiologie de l’University College Hospital d’Ibadan au Nigéria. Selon le rapport, « les caractéristiques faciales étaient normales, l’examen neurologique a révélé que le nouveau-né était conscient et actif ».

Le neurologue suédois Bjorn Merker, spécialisé de l’hydranencéphalie chez l’enfant qui montre des signes de conscience, a déclaré en 2007 dans l’article intitulé Consciousness without a cerebral cortex: A challenge for Neuroscience and Medecine (Ndt. La conscience sans le cortex cérébral, un défi pour la neurologie et la médecine), publié par la revue scientifique Behavorial and Brain sciences, science du cerveau et du comportement: « Le consentement tacite en ce qui concerne le statut du cortex cérébral comme l’organe de la conscience peut avoir été proclamé prématurément et pourrait, en fait, être une sérieuse erreur ».

Autrement dit, La science n’est pas encore capable d’établir le moment exact de l’apparition de la conscience chez le fœtus. Mais les moyens technologiques actuels nous permettent néanmoins de constater une activité chez l’embryon dès cinq semaines et demie de grossesse.

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