Un rapport des services du renseignements tchèques dénonce l’espionnage de la Russie et de la Chine

Par Ella Kietlinska
29 novembre 2019 18:43 Mis à jour: 29 novembre 2019 18:43

Dans son rapport annuel 2018, publié le 26 novembre dernier, le service du renseignement tchèque (BIS) met en garde contre la menace des services du renseignement de la Chine et de la Russie qui cherchent à affaiblir les institutions tchèques et à inciter les politiciens à agir dans l’intérêt de ces puissances étrangères.

Les opérations de ces deux services se concentrent sur l’infiltration des domaines de la politique, de la diplomatie, du renseignement, de l’économie et de l’information de la République tchèque. Les méthodes utilisées par la Chine et la Russie diffèrent en raison de facteurs géographiques et historiques.

Infiltration russe

La Russie a recours à des opérations de renseignement non conventionnelles (dites hybrides) contre ceux qu’elle considère comme ses ennemis. Cela représente une menace beaucoup plus importante pour la Tchéquie que les opérations de renseignement classiques, indique le rapport.

La guerre hybride est un terme général utilisé pour décrire des stratégies militaires combinant diverses activités, telles que la cyberguerre, la désinformation, la manipulation économique, la pression diplomatique, des opérations par procuration et des insurrections. Selon The Conversation, ce type de guerre peut aussi impliquer des actions militaires.

« Le principal objectif de la Russie est de manipuler le processus de prise de décisions et les personnes chargées de prendre des décisions afin d’affaiblir la partie adverse », explique le rapport du BIS.

Il précise que l’agence russe de renseignement – le Service fédéral de sécurité (FSB) qui a remplacé le KGB – a secrètement mis en place en République tchèque une infrastructure de technologies de l’information et des communications (TIC) qui pourrait être utilisée pour les opérations du FSB. Toutefois, ce réseau a été repéré et désactivé par les services du renseignement et la police tchèques.

En 2018, un bon nombre de comptes de courrier électronique des militaires tchèques ont été compromis à la suite des cyber-attaques. En conséquence, les pirates informatiques ont obtenu l’accès à des informations personnelles confidentielles sur les militaires tchèques. La BIS a indiqué dans son rapport que ces attaques avaient très probablement été lancées par le groupe de cyberespionnage russe APT28/Sofacy.

Les activistes pro-russes constituent un groupe cible de l’infiltration des services du renseignement russes. Ces gens ont un large éventail d’opinions politiques allant de gauche à droite et appartiennent à divers partis ou organisations. Alors que beaucoup d’entre eux agissent pour des motifs idéologiques, certains sont sciemment impliqués dans la diffusion de « diverses théories de complot et de la propagande pro-russe » par le biais de différents canaux.

Cyberespionnage (Cat Rooney/Epoch Times)

Infiltration chinoise

Du point de vue de leur complexité, les activités de renseignement chinois en Tchéquie sont comparables à celles de la Russie, souligne le rapport.

Cependant, en raison de l’absence d’antécédents de présence militaire en Europe et de son éloignement géographique, les activités de renseignement chinois en Tchéquie se concentrent sur la recherche de « collaborateurs et agents potentiels parmi les citoyens tchèques ».

Les agents de tous les principaux organes de renseignement chinois opèrent sur le territoire de la République tchèque – y compris du service du renseignement militaire, du département des affaires étrangères du Parti communiste chinois, des ministères de la sécurité d’État et de la sûreté publique ainsi que des diplomates de carrière. Ils essaient d’influencer les cercles universitaires, les forces de sécurité et l’administration tchèques afin de défendre et de promouvoir les intérêts chinois.

L’une des méthodes utilisées par les services du renseignement chinois consiste à inviter les citoyens tchèques travaillant dans ces domaines à suivre des formations, à participer à des séminaires et à des voyages qui sont généralement organisés dans des pays tiers afin de masquer les vrais objectifs de ces invitations. Tous les frais de voyage sont pris en charge par les autorités chinoises, ce qui donne l’impression aux invités qu’ils « doivent quelque chose » à la Chine.

Les services du renseignement chinois utilisent également les médias sociaux professionnels comme LinkedIn pour trouver des collaborateurs potentiels ayant accès à des informations sensibles.

Ces services ne se contentent pas de recueillir des informations, ils se livrent également à des activités subversives. Selon le rapport, en 2018, les représentants chinois ont déployé des efforts pour affaiblir les relations politiques et économiques entre la Tchéquie et Taïwan.

En outre, plusieurs ordinateurs du réseau du ministère tchèque des Affaires étrangères ont été attaqués par des logiciels malveillants au cours des dernières années. Les pirates informatiques ont réussi à obtenir certains documents importants. Selon le rapport, l’attaque provenait probablement d’un groupe de cyberespions chinois.

Protection des intérêts économiques

Le rapport met également en garde contre le risque d’infiltration économique et d’influence des « entités liées à des puissances étrangères », en particulier des pays autoritaires. Les gouvernements autoritaires « sont par nature capables d’influencer plus efficacement les sociétés privées ». Ils peuvent utiliser divers outils pour forcer ces sociétés à « abandonner leurs propres intérêts économiques » en donnant la priorité aux « objectifs politiques, militaires ou de renseignement d’un État étranger ».

Le président tchèque Miloš Zeman a proclamé que la République tchèque deviendrait « la porte d’entrée de la Chine en Europe » et a nommé le PDG d’une société énergétique chinoise CEFC China Energy comme son conseiller honoraire. Selon la radio NPR, cette société, liée à l’armée chinoise, a acquis plusieurs entreprises tchèques, en particulier « une partie d’une compagnie aérienne, un club de football et une brasserie ».

La CEFC a fait faillite quatre ans après sa création. Son PDG a été accusé de corruption et a été arrêté en Chine, tandis qu’un tribunal fédéral américain a condamné le patron de la succursale de la CEFC pour corruption des chefs d’État africains. La NPR a rapporté « qu’une société d’État chinoise a repris les actifs de CEFC en République tchèque ». D’autres entreprises chinoises continuent toujours à opérer en Tchéquie.

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