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Retour du Hamas dans Gaza : une reprise de pouvoir à l’ombre du cessez-le-feu

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Des membres des forces de sécurité internes du Hamas gardent un poste de contrôle dans le camp de réfugiés de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 12 octobre 2025.

Photo: EYAD BABA/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 6 Min.

Depuis l’entrée en vigueur de la trêve vendredi dernier, le Hamas ne perd pas de temps. Quatre jours après la fin des combats qui ont ravagé la bande de Gaza pendant deux ans, le mouvement islamiste palestinien redéploie massivement ses forces de sécurité dans les zones abandonnées par l’armée israélienne.
Des membres de la police du Hamas sont désormais visibles sur les marchés, aux carrefours et dans les principales artères des villes, régulant la circulation et surveillant les activités commerciales. Cette présence accrue intervient alors que le plan de paix américain prévoit explicitement l’exclusion du Hamas de la future gouvernance du territoire. Mais le mouvement semble bien décidé à imposer les faits sur le terrain avant même que les négociations ne progressent.
Affrontements sanglants à Gaza-ville
La reprise de contrôle ne se fait pas sans heurts. Mardi matin, des combats d’une rare intensité ont éclaté dans le quartier de Choujaïya, à l’est de Gaza-ville. Pendant plusieurs heures, la « Force dissuasive », une unité récemment créée par le Hamas, a affronté des membres de la famille Hilles et d’autres groupes armés, dont certains seraient soutenus par Israël.
« Des tirs intenses et des explosions ont résonné pendant des heures », témoigne Mohammed, un habitant du quartier qui préfère taire son nom de famille par sécurité. Ces affrontements rappellent la violente prise de pouvoir du Hamas en 2007, lorsque le mouvement s’était imposé face aux grandes familles traditionnelles de Gaza.
Selon une source sécuritaire palestinienne, ces opérations visent à « neutraliser des personnes recherchées » et à « garantir la sécurité et la stabilité ». Le message est sans équivoque : « Il n’y aura pas de place pour les hors-la-loi ou ceux qui menacent la sécurité des citoyens. »
Un cessez-le-feu déjà fragile
La trêve montre déjà des signes de fragilité. Le Hamas a accusé Israël d’avoir violé le cessez-le-feu en ouvrant le feu mardi. L’armée israélienne se défend en affirmant n’avoir tiré que lorsque des « suspects » ont franchi la ligne de démarcation au-delà de laquelle elle s’est retirée.
Pourtant, l’armée israélienne maintient sa présence sur 53% du territoire gazaoui, poursuivant un retrait progressif dont les modalités restent floues.
Le plan Trump : amnistie ou exil
Le plan de paix porté par Donald Trump dessine un avenir incertain pour les membres du Hamas. Dans une phase ultérieure, il prévoit que le mouvement soit exclu de la gouvernance et que son arsenal militaire soit détruit.
L’article 6 du plan propose une voie de sortie controversée : les combattants du Hamas qui acceptent de rendre leurs armes et de s’engager à une « coexistence pacifique » bénéficieraient d’une amnistie. Pour les autres, l’exil serait la seule option – une proposition qualifiée d' »absurde » par un haut cadre du mouvement.
Lundi, lors d’un sommet organisé au Caire, Trump a cosigné une déclaration visant à consolider le cessez-le-feu obtenu grâce à la médiation des États-Unis, de l’Égypte et du Qatar.
Le soulagement des habitants
Pour la population épuisée, le retour à une forme de normalité est un immense soulagement. « Les paroles de Trump sont importantes. Nous espérons qu’il les mettra en œuvre, car il est le seul à pouvoir empêcher la guerre de reprendre », confie Rima al-Fara, 30 ans, qui vit dans le quartier ravagé d’al-Rimal.
« Nous pouvons à nouveau respirer. La peur est presque partie », dit-elle en évoquant le déploiement massif de la police qui régule désormais la circulation et les marchés. Un changement bienvenu après deux ans où « des vols, des cambriolages et des intimidations armées » étaient devenus monnaie courante.
Depuis vendredi, plus d’un demi-million de personnes ont regagné Gaza-ville en provenance du sud, selon Mohammed al-Moughayir, responsable de la Défense civile. Le mouvement de retour se poursuit chaque jour.
Les dangers du retour
La Défense civile, qui opère sous l’autorité du Hamas, multiplie les mises en garde. La population est instamment priée de ne pas toucher les dépouilles coincées sous les décombres ni de pénétrer dans les bâtiments à la structure fragilisée. Les explosifs non explosés représentent un danger mortel pour les civils qui retrouvent leurs quartiers dévastés.
L’urgence humanitaire persiste
À Genève, l’ONU et le Comité international de la Croix-Rouge ont lancé un appel pressant mardi pour l’ouverture de tous les points de passage. L’objectif : permettre l’acheminement massif d’aide humanitaire vers un territoire dont les infrastructures, notamment le réseau de distribution d’eau, ont été largement détruites.
« Nous avons un besoin urgent de traitements anticancéreux et d’incubateurs pour les soins néonataux », plaide Mohammed Abou Salmiya, directeur de l’hôpital al-Chifa à Gaza. Après l’échange historique de 20 otages contre près de 2 000 prisonniers palestiniens lundi, c’est maintenant la survie quotidienne de deux millions de Gazaouis qui est en jeu.
Avec AFP