Sophie Marceau crève l’écran dans La Taularde

19 septembre 2016 10:24 Mis à jour: 21 septembre 2016 09:16

Après les filles dans les cités – Regarde moi (2007), les sans papiers – Toi, moi, les autres (2009), le viol – Une histoire banale (2013), le quatrième long métrage d’Audrey Estrougo traite un autre aspect du dysfonctionnement social, cette fois-ci la prison des femmes.

 

L’évolution d’une femme

Sophie Marceau, dans l’un de ses meilleurs rôles, entourée d’un casting impressionnant d’actrices, incarne Mathilde, une prof de lettres amoureuse qui rentre en prison pour aider son compagnon à s’évader.

Grâce à un jeu exceptionnel, un éventail de caractères et une ambiance carcérale bien saisie, le film transcende les quelques chutes dans le scénario ainsi que certaines invraisemblances et clichés pour délivrer un résultat final puissant et humain.

La nudité de Sophie Marceau sans maquillage dès la première scène annonce la couleur du film. Un huis-clos qui ne nous épargnera pas la réalité quotidienne de la prison des femmes filmée dans une prison désaffectée à Rennes.

Le film d’Audrey Estrougo suit l’évolution de Mathilde, totalement démunie face à l’univers carcéral qui lui est totalement étranger : les gardiennes d’un côté et les caïds de l’autre.

Mathilde, qui croit être vite libérée, ne cherche pas à trouver sa place parmi les autres codétenues pour lesquelles elle représente l’intello. Dans ce milieu de femmes, le seul homme qu’elle voit brièvement au parloir est son fils, interprété par l’excellent Benjamin Siksou.

Tout pendant qu’elle pense être libérée elle supporte docilement le quotidien : le mépris de la surveillante et le harcèlement de sa partenaire de cellule, interprétée superbement par Eye Heidara.

Mais son cas se complique lorsqu’elle découvre que son mari a tué un homme avec le revolver qu’elle lui a fait passer pour l’aider à se sauver. Sans le vouloir elle se trouve impliquée dans un meurtre. Très sûre d’elle au début, Mathilde se sent dès lors trahie et abandonnée, rongée par l’incertitude. Obsédée par le sort de son mari et par ce qui s’est réellement passé, elle passe d’un sentiment d’impuissance à un impérieux besoin de passer à l’action. Peu à peu, elle se fraye sa place parmi ses codétenues jusqu’à devenir leur héroïne. La femme victime devient une meneuse qui prouve à tous ceux qui la croyaient faible que derrière la délicate intellectuelle se cache une femme rebelle et forte.

Un visage pour les femmes oubliées

À travers l’histoire de Mathilde, la réalisatrice engagée octroie un visage à toutes ces femmes oubliées, condamnées à vivre en dehors de la société.

Criminelles, intellectuelles, droguées ou prostituées, et en majorité, mères, elles se trouvent souvent en prison à cause d’un homme qu’elles ont trop aimé, pour qui elles se sont sacrifiées, ou au contraire, par qui elles étaient maltraitées jusqu’au point où, ne voyant plus d’autre issue, elles se sont senties obligées de le tuer pour se protéger.

C’est le cas d’Anita – interprétée par Suzanne Clément, l’inoubliable Kyla dans Mommy (2014) –, l’ange gardien de Mathilde, trop souvent battue et maltraitée par son mari qui la faisait dormir dehors dans le froid jusqu’au moment où, n’en pouvant plus, elle lui prend sa carabine et le tue.

Le film n’oublie pas non plus les surveillantes. Elles passent des journées entières avec les détenues, partagent les mêmes lieux et parcourent des kilomètres de couloirs par jour, subissant les insultes, le bruit et la violence. Les voilà ces femmes : la dure, la gentille, la complexée, la nouvelle, la compassionnée qui est là par mission, pour donner un peu d’affection.

Ainsi dans une ambiance sombre et violente représentée par ces murs froids et gris, des relations humaines sont tissées. Des amitiés, des moments de solidarité naissent, forçant l’empathie pour les pires des personnages.

Ainsi Audrey Estrougo fait jaillir « du beau dans du laid et de la lumière dans du noir ».

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