Ukraine: les oppositions jugent « irresponsables » les propos d’Emmanuel Macron pour un soutien français sans « aucune limite »

Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky au palais présidentiel de l'Élysée à Paris le 16 février 2024, après la signature d'un accord de sécurité bilatéral.
Photo: THIBAULT CAMUS/POOL/AFP via Getty Images
Le Président Emmanuel Macron a expliqué jeudi aux chefs de partis qu’il n’y avait « aucune limite », « aucune ligne rouge » au soutien de la France à l’Ukraine, en guerre contre la Russie, ont rapporté plusieurs d’entre eux en sortant de l’Élysée. Les oppositions ont unanimement dénoncé les propos « irresponsables » du président sur la possibilité d’envoyer des militaires sur le terrain.
Emmanuel Macron a accueilli jeudi les responsables de parti pour évoquer le conflit en Ukraine en amont d’un vote parlementaire qui s’annonce tumultueux.
« C’est pas une Game Boy, la France »
« On a un président qui malheureusement comme toujours joue », pour « instrumentaliser la guerre » et « aborder les élections européennes avec les habits d’un chef de guerre », a répondu Olivier Faure. « C’est pas une Game Boy, en fait, la France », s’est-il indigné. Le patron des socialistes a accusé le chef de l’État d’avoir réalisé « l’unité de tous » les Occidentaux « contre la France » et offert « une clarté inédite » au Président russe Vladimir Poutine sur le fait « qu’aucun de ces pays n’a envie d’engager de troupes au sol ».
Selon la cheffe des Écologistes Marine Tondelier, le chef de l’État a expliqué que « comme nous avions en face de nous Vladimir Poutine, qui manifestement est sans limite », s’en « fixer nous-mêmes », « intérioriser des limites » serait « lui donner un avantage comparatif ». Elle a jugé « extrêmement inquiétant de voir un président de la République français qui explique, face à quelqu’un qui détient l’arme nucléaire que nous détenons nous-mêmes, qu’il faut montrer que nous sommes sans limite ». « C’est vraiment un problème d’amateurisme à ce stade-là », a-t-elle renchéri, évoquant une « déclaration viriliste ».
Le patron des communistes Fabien Roussel a de son côté regretté en sortant de l’Elysée que deux ans après l’invasion russe de l’Ukraine « la position de la France a changé : il n’y a plus de lignes rouges, il y a plus de limites ». « Il est hors de question de livrer à l’Ukraine des missiles de longue portée qui prendraient le risque que la France, demain, devienne engagée contre la Russie », a dit également le dirigeant communiste.
« Je suis arrivé inquiet et je suis ressorti plus inquiet encore puisque le président de la République, loin de revenir sur les déclarations qui étaient les siennes la semaine dernière, les a confirmé », a relevé de son côté le coordinateur politique de La France insoumise, Manuel Bompard.
Le président du RN, Jordan Bardella, a assuré avoir plaidé lors de cette réunion de près de trois heures pour que « la France n’entre pas elle-même en guerre avec la Russie ». L’envoi éventuel de troupes occidentales au sol ou l’appel à ne pas « être lâches » récemment défendus par Emmanuel Macron sont « des positions de va-t-en-guerre » et suscitent, selon lui, « l’inquiétude dans le pays ». Jordan Bardella a également estimé qu’Emmanuel Macron avait fait « le jeu du Kremlin » en « étalant au grand jour les divisions de l’Europe.
« Une instrumentalisation aux fins de campagne électorale »
Quant au président des LR, Éric Ciotti, il a dénoncé « une instrumentalisation aux fins de campagne électorale pour les élections européennes ».
Le Président doit présenter à huis clos aux responsables des partis les résultats de la conférence internationale pour amplifier le soutien militaire à l’Ukraine organisée la semaine dernière à Paris. La stratégie française fera ensuite l’objet d’un débat, suivi d’un vote, au Parlement – mardi à l’Assemblée nationale, puis mercredi au Sénat.
Or, ce débat s’annonce agité. Non pas tant au sujet de l’accord bilatéral de sécurité signé mi-février par Emmanuel Macron avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, sur lequel porte formellement le vote, mais en raison des récentes déclarations du président, qui a aussi appelé les alliés occidentaux à ne pas « être lâches », renforçant l’ire de l’Allemagne.
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