Au procès de leur attaque par un détenu jihadiste, la «peur» et la rancœur de surveillants

Par Epoch Times avec AFP
15 juin 2023 10:56 Mis à jour: 15 juin 2023 10:57

Il était « déterminé » à « prendre nos vies ». Au procès à Paris de Christian Ganczarski, quatre surveillants pénitentiaires ont fait le récit mercredi de leur violente attaque par ce détenu jihadiste en 2018 à la prison ultra-sécurisée de Vendin-le-Vieil dans le Pas-de-Calais

Serré avec ses collègues sur le banc des parties civiles, Sébastien C. est le premier à s’approcher de la barre de la cour d’assises spéciale. « Tous les jours », dit-il la voix emplie d’émotion, il repense à cette journée du 11 janvier 2018 où il a craint « pour sa vie ».

Il est 15h23 quand les quatre surveillants arrivent devant la cellule de l’Allemand Christian Ganczarski, placé à l’isolement depuis que lui a été notifiée six jours plus tôt une demande d’extradition des États-Unis, qui l’ont inculpé pour une participation active au réseau Al-Qaïda.

Un détail l’a interpellé

Le détenu, qui a demandé aux gardiens de « revenir plus tard » à deux reprises, est cette fois-ci prêt à être conduit à la cabine téléphonique. Sébastien C. effectue « le contrôle œilleton », ouvre la porte de la cellule. Christian Ganczarski est « agenouillé sur son tapis de prière, en survêtement et en baskets », un dernier détail qui a « interpellé » le premier surveillant Saïd A., lui-même « musulman pratiquant ».

Le prisonnier « se lève, je le vois récupérer quelque chose », poursuit Sébastien C. Après s’être avancé « tout doucement », Christian Ganczarski « bondit » hors de la cellule aux cris de « Allah Akbar », et lui assène un coup de couteau, « violent » et « franc », à la gorge. « Dans son regard, j’ai vu de la haine », assure l’agent. Sans le « réflexe » qui le fait reculer, l’issue aurait été tout autre, estime-t-il encore. Le ton change quand lui succède face à la cour Saïd A. Peut-être parce qu’il était le « gradé » de l’équipe, il veut « dire les choses ». Dire déjà qu’il a été « très marqué » que « le soir-même de l’agression », on lui ait « reproché d’avoir mis un coup de pied à Christian Ganczarski ».

Le détenu vient de lui porter un cou à la gorge, son collègue Stéphane D. « se jette sur ses jambes » pour lui faire perdre l’équilibre, se prenant en retour des coups sur le crâne. « Protégé » seulement d’une chemise et d’un « gilet d’hiver », Saïd A. se « bat » pour retirer au prisonnier la paire de ciseaux qu’il tient à la main, alors qu’il est au sol. Il « pulvérise » alors dans ses narines un spray au poivre. À « quatre contre un », ils mettront environ « une minute et quarante secondes » pour maîtriser Christian Ganczarski, une « lutte » qui a paru au premier surveillant « très très longue ».

Démission du directeur

Entré dans la pénitentiaire en 2006, promu major après l’agression, Saïd A. est retourné travailler chaque jour « la boule au ventre » dans la coursive où il a failli perdre la vie il y a cinq ans et demi. Ses collègues également. « Un centimètre plus profond », le coup de ciseaux qu’il a reçu à la gorge touchait sa « carotide », rappelle-t-il. « Aujourd’hui, si on n’est pas morts, c’est pas parce que Christian Ganczarski sait pas faire, c’est parce qu’il n’avait pas les bons outils ! », assène Saïd A, les bras croisés sur son imposante carrure. À Vendin-le-Vieil comme ailleurs en France, la prise en charge des détenus radicalisés n’en était encore qu’à ses balbutiements, les personnels rarement dotés de tenues de maintien de l’ordre.

Il avait été toutefois décidé, quatre jours avant l’attaque, d’équiper les surveillants de casques et plastrons, après l’interception d’une conversation téléphonique dans laquelle Christian Ganczarski évoquait le cas d’un détenu condamné pour l’agression d’un gardien. Mais la mesure avait été levée au bout de 24 heures, les propos d’abord jugés « menaçants » du détenu ayant été, après une réécoute de l’échange, considérés comme peu « probants ». Une décision qui « questionne » encore Saïd A.

C’est plein de rancœur également qu’il reproche à l’ancien directeur de la prison, entendu comme témoin mardi, ne pas avoir eu, dit-il, « un regard pour nous, les quatre victimes ». L’ex-chef d’établissement avait démissionné quatre jours après l’attaque, qui a déclenché un conflit social inédit dans la pénitentiaire. Christian Ganczarski, qui a toujours contesté le caractère terroriste et prémédité de son acte, doit être interrogé jeudi. Le verdict est attendu vendredi.

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