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Piratage informatique

Boîtier espion sur un ferry capable d’en prendre le contrôle à distance : une « très grave » ingérence étrangère possible

L'histoire pourrait figurer dans une production Netflix : un dispositif de piratage informatique capable de prendre le contrôle d'un navire à distance a été mis au jour sur le ferry italien « Fantastic » lors de son escale à Sète. Cette découverte inquiétante révèle une potentielle opération d'ingérence étrangère que le ministre de l'Intérieur Laurent Nuñez qualifie de « très grave ».

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Le logo de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) à son siège à Paris, le 31 août 2020.

Photo: STEPHANE DE SAKUTIN/POOL/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 4 Min.

Depuis dimanche, des magistrats instructeurs parisiens ont ouvert une information judiciaire pour « atteinte à un système de traitement automatisé de données en bande organisée dans le but de servir les intérêts d’une puissance étrangère » et « participation à une association de malfaiteurs ». La Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI), fer de lance du contre-espionnage français, pilote les investigations.

L’alerte lancée par Rome

L’affaire démarre par un signalement des autorités italiennes : le système informatique du « Fantastic », en route vers Sète dans le sud de la France, aurait été « susceptible d’avoir été infecté par un dispositif malveillant permettant d’en prendre le contrôle (« RAT » – remote access tool) », selon le parquet de Paris.
C’est la compagnie maritime GNV, propriétaire du navire, qui a tiré la sonnette d’alarme après avoir « identifié et neutralisé une tentative d’intrusion, sans conséquence sur les systèmes informatiques de l’entreprise, efficacement protégés ».

Deux arrestations et des perquisitions internationales

Le 12 septembre, deux membres d’équipage sont interpellés à Sète : un marin letton et un Bulgare, tous deux identifiés par les autorités italiennes. En parallèle, des perquisitions urgentes sont conduites en Lettonie « avec le soutien très actif d’Eurojust et des autorités lettones », précise le parquet.
Le suspect letton a été mis en examen et placé en détention provisoire, tandis que son compatriote bulgare a été relâché, aucune charge n’ayant été retenue contre lui.

La piste russe fortement suspectée

Laurent Nuñez ne mâche pas ses mots : « les enquêteurs vont manifestement sur la piste de l’ingérence (…), une ingérence étrangère ». Sur franceinfo, le ministre ajoute sans détour : « En ce moment, les ingérences étrangères proviennent très souvent du même pays », pointant implicitement du doigt Moscou.
Cette affaire s’inscrit dans une série d’incidents suspects depuis octobre 2023 : étoiles de David taguées, mains rouges peintes sur des murs, têtes de cochon devant des mosquées, cercueils au pied de la tour Eiffel… Autant de dossiers où plane l’ombre de l’ingérence russe.

Des relations franco-russes au point mort

Les tensions entre Paris et Moscou n’ont cessé de s’aggraver depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022 et les sanctions occidentales qui ont suivi. La Russie reproche notamment à la France son soutien militaire à Kiev.
Dans ces différents dossiers d’ingérence présumée, des exécutants originaires d’Europe de l’Est – Bulgares, Moldaves, Serbes – ont été interpellés.
Toutefois, Thibault Bailly, avocat du suspect letton, estime que « la thèse de l’ingérence russe évoquée dans la presse paraît superfétatoire ».

Les zones d’ombre persistent

Le ministre de l’Intérieur reconnaît l’ignorance des autorités quant aux motivations : « A ce stade, on n’en sait rien. Il y a des enquêtes en cours et ce sont des affaires qui sont couvertes par le secret de la défense nationale ». Il précise néanmoins que « ce type de dispositif a pu être trouvé dans d’autres affaires ».

Le navire remis en service

Initialement immobilisé et placé sous scellés, le « Fantastic » a fait l’objet d’investigations urgentes menées par la DGSI, qui ont permis de saisir plusieurs éléments. Une fois les vérifications techniques effectuées et tout danger écarté pour les 2 000 passagers que peut accueillir ce paquebot de croisière méditerranéenne, le navire a été autorisé à reprendre la mer.
La compagnie GNV assure avoir « collaboré et continue de collaborer dans le cadre de l’enquête », garantissant « sa pleine coopération et sa discrétion, tout en garantissant des mises à jour constantes et une assistance aux passagers » pendant les opérations policières qui ont duré plusieurs heures.
Avec AFP