Chine : oubliez le rééquilibrage économique

4 octobre 2016 11:06 Mis à jour: 5 octobre 2016 10:05

Personne ne croit aux données économiques officielles chinoises, mais elles sont souvent utilisées dans les analyses par manque de bonnes alternatives.

Les données officielles pour 2016 nous annoncent que le secteur immobilier chinois est en pleine expansion, que le crédit progresse à pas de géant, que l’activité manufacturière rebondit et que les entreprises d’État investissent comme s’il n’y avait pas de lendemain, alors que les entreprises privées ont fini de vider leurs portefeuilles.

Cependant, les bénéfices de la plupart des entreprises ont souffert. Face au problème de remboursement de dettes importantes, certaines d’entre elles se sont même retirées des affaires.

Si les données officielles ne sont pas fiables, comment pourrait-on avoir une image réelle ? Heureusement, la China Beige Book (CBB) détient des informations sur ce qui se passe sur le terrain et ses conclusions trimestrielles complètent largement les données officielles.

Les donnés prélevées sur le terrain soutiennent la théorie de stimulation

Chaque trimestre, la CBB collecte des données auprès des milliers d’entreprises chinoises, y compris par voie d’interview approfondies avec les PDG et les banquiers locaux. Bien que la CBB ne donne pas de chiffres de croissance définitifs, elle enregistre, par exemple, le nombre d’entreprises qui avaient augmenté leur chiffre d’affaires, ou avaient licencié leurs employés.

Le rapport de la CBB sur le troisième trimestre 2016 confirme l’information que le régime chinois a recouru à l’ancien stimulus pour éviter l’effondrement de l’emploi, en faisant subir une douche froide aux espoirs d’un rééquilibrage vers une économie de consommation et de services.

« Les moteurs de croissance lors de ce trimestre représentaient uniquement ‘‘l’ancienne économie’’- les secteurs manufacturier, l’immobilier et les matières premières. La ‘‘nouvelle économie’’- les services, le transport et en particulier le commerce de détail – ont montré des résultats beaucoup moins encourageants », explique le rapport.

(China Beige Book)
(China Beige Book)

La CBB montre qu’en parallèle avec les indicateurs officiels de la production dans le secteur manufacturier, 53% d’entreprises de ce secteur ont vu leur bénéfice augmenter – 9 % de plus qu’au trimestre précédent.

Selon les données officielles, le secteur immobilier a fortement bondi en montrant une augmentation à 2 chiffres dans leurs prix et leurs ventes. De son côté, la CBB rapporte que 52% d’entreprises du secteur ont augmenté leur bénéfice – 4 % de plus qu’au trimestre précédent.

La dette augmente

Les secteurs manufacturier et immobilier ont rebondi en raison de l’augmentation de la dette et de l’investissement dans les infrastructures – principalement grâce aux prêts hypothécaires résidentiels et aux investissements des entreprises d’État.

« Le nombre d’entreprises qui s’endettent a décollé du niveau observé pendant les trois derniers trimestres et est monté à son plus haut niveau en trois ans », a indiqué la CBB.

Selon les données officielles, les prêts bancaires ont augmenté de 13 % en août 2016 par rapport au mois d’août de l’an dernier, tandis que le rapport de la CBB montre que 27% des entreprises ont augmenté leurs emprunts, soit 10 % de plus qu’au trimestre précédent.

« Si les ventes et les prix continuent d’augmenter au quatrième trimestre, cela sera dû à encore davantage d’endettement », indique le rapport de la CBB au sujet du secteur immobilier. Selon les données de la Banque populaire de Chine (PBOC), les prêts hypothécaires résidentiels constituaient 71% des nouveaux prêts bancaires en août dernier.

Prêts hypothécaires (en % du total des prêts). (Capital Economics)
Prêts hypothécaires (en % du total des prêts). (Capital Economics)

Le rapport confirme également que les entreprises d’État ont été les plus importants investisseurs et que 60% de ces entreprises ont augmenté leurs dépenses en capital, une hausse de 16% par rapport au deuxième trimestre.

« Étant impatients d’arriver à une croissance plus forte, les décideurs politiques chinois étaient prêts à mettre de côté leurs objectifs de rééquilibrage et à ‘‘doubler’’ la mise sur la croissance tirée par l’investissement », a déclaré Fathom Conseil dans son récent rapport sur la Chine. Les chiffres sur le terrain confirment cette évaluation.

Par contre, les entreprises privées moins grandes n’ont pas beaucoup investi. Les plus petites parmi elles ont augmenté leurs investissements seulement dans 34% des cas, comparé à 44% au trimestre précédent.

« Alors que nous voyons toujours les emprunts bancaires… comme le plus important moteur du développement de l’infrastructure à court et à moyen terme, nous espérons que son développement durable impliquerait davantage de participation des capitaux privés », a écrit dans son rapport la banque d’investissement Goldman Sachs.

Le prix à payer

Toutefois, une telle stratégie planifiée a un prix à payer. « Les chiffres de la CBB montrent que les bénéfices et les flux de trésorerie se sont détériorées, ce qui assombri les données montrant l’augmentation de l’emprunt et de l’investissement », souligne ce rapport en indiquant que seulement 45 % d’entreprises avaient déclaré une augmentation des bénéfices, comparé au 47% au trimestre précédent. La CBB a aussi constaté que le flux de trésorerie s’est détérioré dans son ensemble, ce qui explique la hausse des défauts de paiement d’entreprises cette année.

Selon la CBB, la raison principale du renouvellement de l’ancien stimulus est la crainte du régime chinois de l’augmentation du chômage, qui a commencé à apparaître dans les données du CBB au deuxième trimestre. Le taux de chômage officiel est tristement célèbre pour être non fiable, car il est resté au niveau de 4% pendant les dix dernières années.

Ainsi, après l’augmentation d’investissements, 38% d’entreprises ont déclaré qu’ils avaient embauché davantage de personnel au troisième trimestre. « L’embauche était de nouveau forte et on peut dire que c’est la question la plus importante pour le gouvernement central », a précisé la CBB.

Mais obtenir un peu plus de croissance et de l’emploi avec un peu plus de crédit est un vieux truc, n’est-ce pas ? Où sont passés le rééquilibrage et la réforme tellement vantés par le régime ?

« Une économie plus orientée vers les services permettra d’augmenter la part des revenus du travail dans le PIB, mais une politique budgétaire de redistribution sera nécessaire pour diminuer les inégalités de revenus et donner des opportunités plus égales aux ménages urbains et ruraux », peut-on lire dans le récent rapport du Fond monétaire international (FMI).

Hélas, les données sur le terrain de la CBB ne confirment pas que se soit le cas en Chine. Le moins qu’on puisse dire, c’est que le troisième trimestre a vu s’effectuer un grand pas en arrière.

« Les bénéfices dans les services, le transport et en particulier dans le commerce de détail ont souffert lors du dernier trimestre », a déclaré la CBB. Seulement 53% d’entreprises de services ont signalé une augmentation du bénéfice, comparé à 57 % au trimestre précédent.

Version anglaise : China: Forget About Rebalancing

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