Comment fonctionne la surveillance en France sur les fichiers S ?

Par Emmanuelle Bourdy
16 octobre 2023 19:19 Mis à jour: 16 octobre 2023 19:19

Alors qu’un enseignant a été assassiné par un jihadiste, ce vendredi 13 octobre dans le lycée Gambetta-Carnot à Arras (Pas-de-Calais) – lycée que le maire de la ville Frédéric Leturque propose de renommer Dominique Bernard en hommage au professeur tué – l’établissement vient d’être évacué ce lundi matin en raison d’une alerte à la bombe. Élèves et professeurs ont toutefois pu regagner le collège ce lundi après-midi.

L’attentat qui a été commis au collège d’Arras vendredi dernier a fait un mort, un professeur de français âgé de 57 ans, ainsi que trois blessés. Cet acte barbare a été commis par élève radicalisé de 20 ans, fiché S. Ce dispositif compterait plus de 20.000 personnes dont les profils sont, pour la moitié d’entre eux, des radicalisés, rapporte Capital.

« Un outil facilitant la collecte dudit renseignement »

D’après la définition donnée par un décret du 28 mai 2010, une fiche « S » (pour « sûreté de l’État ») est créée pour toute personne « faisant l’objet de recherches pour prévenir des menaces graves pour la sécurité publique ou la sûreté de l’État, dès lors que des informations ou des indices réels ont été recueillis à leur égard ». Cet outil de renseignement permet néanmoins de collecter ces informations de manière ponctuelle.

Une fiche S est une catégorie appartenant à un fichier général nommé le FPR (Fichier des personnes recherchées), des personnes portées disparues ou sous protection judiciaire pouvant appartenir à ce FPR, qui a été créé dès 1969.

« Souvent présentées, à tort, comme un ‘fichier’ de renseignement recensant l’ensemble des personnes considérées comme dangereuses et faisant l’objet d’une surveillance active par les services de renseignement, les ‘fiches S’ constituent en réalité un outil facilitant la collecte dudit renseignement », explique un rapport d’information du Sénat de décembre 2018, stipulant qu’« au 11 décembre 2018, 29.973 personnes faisaient l’objet d’une fiche S au sein du fichier des personnes recherchées (FPR) ».

État civil, photographies, motifs de la recherche et conduite à tenir

Le fichier S en lui-même regroupe divers profils, comprenant entre autres des islamistes radicaux, des activistes d’extrême droite, des ex-détenus radicalisés ou encore des individus en lien avec des mouvements écologistes radicaux, précisent nos confrères.

Les informations contenues dans une fiche du FPR sont composées de l’état civil (nom, prénoms, date et lieu de naissance, filiation), l’alias, le sexe et la nationalité. Cela comprend également le signalement, des photographies ainsi que les motifs de la recherche (éventuellement les actes administratifs ou judiciaires afférents) et la conduite à tenir en cas de rencontre avec le suspect.

Si l’objectif initial du fichier S était de recenser les personnes pouvant constituer une menace à la sécurité nationale, celui-ci s’est élargi au fil des ans, sans pour autant que « les informations et les indices réels » déclenchant la fiche ne soient précisés, ainsi que l’a pointé l’avocat des libertés fondamentales Samy Djemaoun, dans un article d’Actu.fr. C’est donc au rédacteur de la fiche de faire lui-même son appréciation.

Ils font l’objet d’une surveillance menée par la DGSI et la DGSE

Ce jeudi 12 octobre 2023, lors d’une audition de la commission d’enquête sur les groupuscules violents à l’Assemblée nationale, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a révélé qu’au total, un peu plus de 10.000 personnes étaient suivies pour leur appartenance à « l’ultra-gauche » et parmi elles, 3000 sont fichées S. Il a toutefois spécifié : « je ne dis pas qu’il y a 3000 personnes d’ultra-gauche qui peuvent passer à l’action. Je dis qu’il y a 3000 personnes qui sont suivies par la DGSI au nom de l’ultra-gauche ».

En effet, ces fichiers S font l’objet d’une surveillance minutieuse menée par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). Ces organismes peuvent donc placer sous écoutes téléphoniques les fichés S, ou les surveiller physiquement. Dans certains cas, les forces de l’ordre peuvent également s’introduire dans leur domicile pour installer un mouchard dans leurs appareils électroniques, précise Capital.

À noter toutefois que tant qu’un individu n’est pas passé à l’acte, il ne peut pas être arrêté, même s’il est fiché S. Par ailleurs, une personne ne sait pas si elle est fichée S ou non, ce qui représente « tout l’intérêt », a encore indiqué Samy Djemaoun à Actu.fr. « La personne ne doit pas savoir qu’elle l’est sinon c’est contre productif, elle adopterait ses modes de comportement en fonction », a-t-il conclu.

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