Une étude révèle les partenariats risqués des universités de Toronto avec la Chine en matière d’IA et d’armement de haute technologie

Un ancien agent du renseignement critique les politiques du Canada, qu'il qualifie de « solution de fortune », en citant les lacunes en matière d'incitation à freiner les collaborations de recherche avec les institutions militaires chinoises.

Par Andrew Chen
21 novembre 2023 20:31 Mis à jour: 21 novembre 2023 20:31

Une étude récente révèle que des centaines de publications d’universités torontoises collaborent avec des institutions universitaires chinoises liées à l’armée dans le cadre de recherches de nature sensible. Selon un ancien agent du renseignement, les partenariats en cours sont le signe d’un manque de volonté à lutter contre de telles pratiques.

L’étude, publiée en octobre par la Frontier Assessments Unit (FAU), a identifié un total de 371 publications provenant d’une collaboration entre des universités canadiennes et sept académies chinoises connues sous le nom de « Sept fils de la défense nationale » en raison de leurs liens étroits avec l’Armée populaire de libération, la principale force militaire de la Chine communiste.

Le rapport note que si les collaborations avec ces institutions militaires chinoises peuvent déboucher sur des avancées technologiques, elles présentent également des risques importants pour la sécurité des institutions canadiennes et pour la sécurité nationale dans son ensemble. Ces risques comprennent le vol potentiel de la propriété intellectuelle, les implications du « double usage » du transfert de technologies civiles à des fins militaires, ainsi que les risques pour la réputation et l’indépendance universitaire.

LJ Eads, ancien officier de renseignement de l’armée de l’air américaine et coauteur de l’étude, a déclaré que le Canada et les États-Unis sont de plus en plus conscients de la nécessité de se dissocier de la Chine.

« Tout ce dont nous parlons, c’est de l’ère de la concurrence entre grandes puissances. Comment débuter à se déconnecter [de la Chine] lorsqu’il y a des implications en matière de technologie à double usage ou de technologie militaire ? » a déclaré M. Eads à Epoch Times.

Sa remarque fait écho aux récents avertissements du directeur du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), David Vigneault. Lors d’une rare apparition publique le mois dernier avec ses homologues des Cinq Yeux, M. Vigneault a fait remarquer que Pékin mettait l’accent sur le développement de la fusion militaire-civile dans le cadre d’une stratégie nationale agressive visant à se doter de l’armée la plus avancée au monde sur le plan technologique.

« Tout ce qu’ils font dans nos universités et dans les nouvelles technologies est réinjecté dans un système très organisé pour créer des applications à double usage pour l’armée », a-t-il déclaré.

La FAU souligne l’implication importante de l’université de Toronto, mentionnée près de 400 fois dans l’étude, dans des collaborations de recherche avec des institutions militaires chinoises. L’université métropolitaine de Toronto, anciennement connue sous le nom d’université Ryerson, est également très impliquée dans des collaborations similaires, selon l’étude.

Epoch Times a contacté l’université de Toronto et l’université métropolitaine de Toronto pour obtenir des commentaires, mais n’a pas reçu de réponse avant la publication de cet article.

Le rapport de la FAU est coécrit par Ryan Clarke, un vétéran du renseignement stratégique multidomaine, et Hans Ulrich Käser, un ancien officier de renseignement qui a servi dans des missions combinées de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord. Cette étude a été rapportée pour la première fois par le bulletin d’information The Bureau de Substack.

Une solution de fortune

Au début de l’année, le gouvernement fédéral a introduit des politiques plus strictes en matière de financement de la recherche impliquant des entités étrangères. Il a été annoncé que les conseils fédéraux de subvention de la recherche du Canada refuseraient de financer des projets associés à des institutions qui ont des liens avec des gouvernements étrangers, ce qui constitue un risque pour la sécurité nationale.

Cette décision fait suite à un rapport publié en janvier par le Globe and Mail, qui révélait des collaborations de recherche entre une cinquantaine d’universités canadiennes et une institution militaire chinoise, axées sur des technologies avancées et de nature sensible, notamment celles liées aux missiles guidés et à l’écoute électronique.

En outre, le 12 juillet, le cabinet fédéral a présenté les nouvelles lignes directrices de sécurité nationale pour les partenariats de recherche avec des institutions étrangères, qui visent à renforcer la protection contre l’ingérence étrangère, l’espionnage et le vol. Ces lignes directrices énumèrent les domaines de recherche considérés comme sensibles ou à double usage. Ces domaines comprennent notamment les armes de pointe, l’intelligence artificielle, la biotechnologie et la science quantique.

Cependant, l’étude de la FAU, qui a compilé les publications de recherche canadiennes d’août 2019 à août 2023, indique des collaborations de recherche persistante dans ces domaines entre les institutions canadiennes et chinoises.

M. Eads a également qualifié ces mesures introduites par le gouvernement canadien de « solution de fortune », soulignant l’absence d’incitations financières ou de pénalités pour les chercheurs canadiens afin qu’ils cessent leurs partenariats avec la Chine.

« Si vous ne pouvez pas recevoir de financement canadien, l’université vous paiera quand même. C’est juste que vous ne pouvez pas travailler sur des programmes de recherche canadiens. Vous pouvez travailler sur des programmes de recherche chinois et continuer à travailler pour l’université », a-t-il déclaré.

Recrutement de talents

Selon M. Eads, les efforts déployés par Pékin pour recruter des talents à l’échelle mondiale constituent un autre facteur clé contribuant à la collaboration permanente entre les institutions canadiennes et chinoises. Les vastes programmes de recrutement de talents de la Chine ont suscité de plus en plus d’inquiétudes de la part du gouvernement américain, le FBI mettant en garde contre les incitations potentielles à « voler des secrets commerciaux, à enfreindre les lois sur le contrôle des exportations ou à violer les politiques en matière de conflits d’intérêts ».

M. Eads a mis l’accent sur un rapport du Washington Times dévoilant un programme de recrutement de talents appelé « Kunpeng Action Plan », récemment lancé par l’Eastern Institute for Advanced Study. Ce plan, décrit sur son site web chinois comme le précurseur de l’Eastern Institute of Technology (EIT) prévu à Ningbo, en Chine, vise à attirer des experts scientifiques de premier plan du monde entier, y compris d’Australie. L’accent est mis sur des chercheurs estimés qui ont reçu des récompenses prestigieuses telles que le prix Nobel et la médaille Fields.

M. Eads a déclaré qu’en offrant des incitations financières « scandaleuses » pour attirer les talents internationaux, la Chine poursuit une stratégie géopolitique à long terme. En revanche, les autorités du Canada et des États-Unis se concentrent davantage sur le renforcement militaire à court terme, ce qui, selon lui, pourrait conduire l’Occident à prendre du retard à l’avenir.

« Ils pensent au long terme en matière de recrutement de talents, de guerres futures et de domination future. Nous pensons au plan à six mois : voici le nombre de chasseurs dont nous avons besoin, l’entreprise de défense a besoin de ce financement. Nous ne pensons pas aux talents et à l’expertise comme le fait actuellement la Chine », a-t-il déclaré.

« Je pense que le talent dans un avenir proche, et ces experts, seront plus importants qu’un nouveau [chasseur de nouvelle génération]. Et si vous deviez dire cela au Pentagone en ce moment, je pense qu’il y aurait des désaccords massifs parce que nous sommes encore à l’ère des missiles, des bombes et des chasseurs plutôt que d’embrasser l’idée d’une guerre stratégique hybride, dans laquelle le talent et l’expertise sont des facteurs importants. »

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