En Europe, les initiatives se multiplient pour en finir avec le tout jetable

31 décembre 2016 08:46 Mis à jour: 30 décembre 2016 17:52

Serait-on en train d’assister à la fin de l’ère du tout jetable ? Ces cinquante dernières années nous ont donné des grilles-pain irréparables à la moindre petite panne, des T-shirts qui rétrécissent et se délavent en un clin d’œil, des aspirateurs qu’il faut changer après quelques années d’utilisation seulement.

Une « obsolescence programmée » dont les smartphones sont les témoins privilégiés : qui n’a jamais constaté le fonctionnement altéré de son ancien appareil après l’installation d’une mise à jour « essentielle » ? Cette réalité concerne en fait tout un tas de produits, des vêtements aux lunettes, pour lesquels on propose sans arrêt de nouvelles collections visant à encourager la consommation.

Des actions récentes

On peut cependant se réjouir d’une décision récente du gouvernement suédois qui a décidé de faire passer la TVA de 25 % à 12 % sur les réparations. Il s’agit du dernier signe d’une remise en cause en Europe de la culture consumériste (« extraire, fabriquer, consommer, jeter ») qui se trouve au cœur de nos économies industrialisées.

En France, l’obsolescence programmée est depuis 2015 passible de deux ans d’emprisonnement et d’une amende qui peut aller jusqu’à 300 000 euros. Et l’Espagne est récemment devenue le premier pays a instaurer un objectif visant à accroître la réutilisation des produits. Pendant ce temps, l’Agence fédérale de l’environnement a commandé une étude sur la durée de vie des produits électriques dans le but de développer des stratégies anti-obsolescence.

L’Europe passe à l’action

Il faut replacer ces décisions dans le cadre d’initiatives européennes pour soutenir le développement durable, notamment sur les fronts des déchets et de l’économie circulaire, qui promeut l’utilisation des objets et leur recyclage aussi longtemps que possible.

La directive relative aux déchets adoptée en 2013 attend ainsi de chaque membre de l’Union qu’il mette au point un programme de prévention en ce domaine. Les autorités britanniques ont d’ailleurs été les premières à s’engager dans cette voie. Dan Rogerson, l’ex-ministre alors en charge de ces questions, a été jusqu’à déclarer : « Les objets devraient être conçus pour avoir des durées de vie longues, incluant la possibilité de la réparation et de la réutilisation. »

Un plan d’action de l’Union européenne a été ajouté à ce texte en 2015, afin que la Commission s’engage à examiner l’ampleur du phénomène de l’obsolescence programmée et agisse en conséquence.

La directive EcoDesign de 2009 qui visait dans un premier temps à mettre en œuvre l’efficacité énergétique, s’applique désormais aux cycles de vie des produits. Ce texte exige déjà que les aspirateurs qui seront mis en vente dans l’Union à partir de septembre 2017 soient équipés de moteurs conçus pour durer au moins 500 heures. D’autres produits devraient être prochainement soumis aux mêmes impératifs.

Les principes de l’économie circulaire (Fondation Ellen MacArthur, 2013).

Des habitudes de consommation bien ancrées

Le coup de pouce suédois à l’allégement de la fiscalité sur les réparations représente toutefois un succès modeste pour les militants écologistes, compte tenu de la forte pression qui pèse sur les États de l’Union pour pratiquer les mêmes taux de TVA. Et, malheureusement, cela n’aura certainement qu’un effet modéré sur la demande de réparation.

Une étude suggère en effet que la réduction de taxes ne serait en mesure de faire une grosse différence sur le prix au point d’amener les consommateurs à opter pour cette option : les habitudes de consommation sont très profondément ancrées et, dans la durée, remplacer l’appareil défectueux demeure souvent la solution la moins coûteuse.

Mais cette initiative est un signal positif : les gouvernements européens commencent à réagir favorablement aux actions menées à Bruxelles par des ONG de défense de l’environnement. D’autres évolutions peuvent être attendues, en particulier de la délivrance de manuels d’entretien comportant des informations techniques pour aider les réparateurs indépendants et les usagers à faire durer les produits.

Réparer, une pièce du puzzle

L’initiative de l’UE dans le domaine de l’économie circulaire est très significative. Ceci étant dit, une économie authentiquement durable ne pourra se contenter seulement d’accroître le recyclage, du fait que les procédés nécessaires à la collecte, au démontage et à la réutilisation des produits usagés sont énergivores – et consomment la plupart du temps des énergies fossiles.

De plus, les métaux, plastiques et textiles recyclés présentent souvent certaines limitations qui menacent la qualité de la production. Dans bien des cas, il faudra ajouter des matériaux neufs… Le produit composé à 100 % de matériaux recyclés n’existe pas encore.

Le véritable changement nécessitera d’allonger la durée de vie des produits de sorte que moins de nouveaux objets soient fabriqués. Réparer et réutiliser font partie de ce processus, mais il semble tout aussi essentiel que les objets soient conçus dès le départ pour durer plus longtemps.

Un tel programme réclame de profonds changements au niveau culturel et systémique : les entreprises devront apprendre à survivre en vendant moins et en misant sur des produits durables que les consommateurs choisiront d’acheter et de conserver.

Après tout, aucun bénéfice ne peut être tiré d’un appareil qui serait fabriqué pour durer et dont on se débarrasserait prématurément

The Conversation

Tim Cooper, Professor, Head of Sustainable Consumption Research Group, Nottingham Trent University

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

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