Héroïne de la résistance, Madeleine Riffaud, escroquée pendant 10 ans par son aide à domicile

Par Sarita Modmesaïb
26 décembre 2023 10:58 Mis à jour: 26 décembre 2023 10:58

Madeleine Riffaud, alias « Rainer », pendant la Seconde Guerre mondiale doit, à 99 ans, faire face à un nouveau conflit, personnel, cette fois : un procès contre son ancienne aide à domicile qui aurait abusé de sa confiance pour lui soutirer de l’argent pendant de nombreuses années.

«  »Je ne suis pas une victime, je suis un résistant. Alors certes, je vais résister, mais je dois bien m’avouer que pour la première fois, je suis une victime », confie Madeleine Riffaud, 99 ans, dans un long message publié sur son compte Facebook le 23 novembre dernier.

Celle qui fut résistante dès ses 18 ans pendant l’Occupation nazie en France, a dû porter plainte pour abus de confiance contre son ancienne aide à domicile, engagée auprès de la nonagénaire depuis 2011.

« Un symbole de la résistance devenu le symbole de la protection des personnes vulnérables »

Myriam B., aujourd’hui 67 ans, aurait utilisé la carte bancaire de Madeleine afin de financer des sorties au restaurant, des dépenses alimentaires ou des séances en institut de beauté. « La lecture d’un relevé de compte ayant révélé des dépenses injustifiées et incohérentes avec le mode de vie de la victime, une enquête a été diligentée sur l’ensemble de la période. Il en est ressorti un préjudice de plus de 140.000 euros », précise le parquet de Paris, relayé par TV5 Monde. 

En effet, l’ancienne reporter est depuis de nombreuses années, atteinte de cécité et ne sort guère de son appartement du 3e arrondissement de Paris.

C’est une amie et confidente de l’ancienne résistante, Éloïse de La Maison, qui a repéré des incohérences dans les relevés de compte de Mme Riffaud et a porté plainte en février 2023.

« Le procès, je m’en fiche. C’est une amie qui m’a trompée… Tout ce que je souhaite, c’est qu’elle ne puisse plus exercer », confie Madeleine Riffaud dans les colonnes du Courrier Picard.

Dans son message publié sur Facebook, la nonagénaire dénonce sa situation actuelle : « Il ne me reste que quelques mois de réserves pour payer les personnes qui s’occupent de moi quotidiennement, car suite à mon passage aux urgences de septembre 2022, je suis devenue plus dépendante. Je dois notamment faire appel à une personne qui reste auprès de moi chaque nuit. Ça coûte fort cher et figurez-vous que l’Urssaf a un fonctionnement pour le moins surprenant : une personne dépendante n’est exonérée de charges pour les auxiliaires qu’elle emploie que jusqu’à un certain nombre d’heures de travail. Une personne très dépendante n’y a plus droit et doit donc payer cher. Très cher. Sachez-le : plus vous perdez votre autonomie, plus on vous taxe. »

Le procès a débuté ce mardi 19 décembre, la prévenue niant en bloc cette escroquerie tout en mettant en avant ses relations initiales de confiance avec Madeleine Riffaud, qu’elle qualifie d' »exigeante » et amatrice de cigares, de vêtements et de produits de beauté de luxe.

L’accusation réfute ces affirmations, rappelant que « ces achats ne peuvent pas s’expliquer pour une personne qui ne marche pas, qui ne sort pas » et précisant que les enquêteurs n’ont pas trouvé trace de ces produits chez Mme Riffaud.

Pour la procureure Anne Proust, Madeleine Riffaud est « un symbole de la résistance devenu le symbole de la protection des personnes vulnérables ».

Myriam B. s’est vue requérir la peine de trois ans de prison dont deux avec sursis. Le verdict est prévu pour le 18 janvier 2024.

Résistante et héroïne de bande dessinée

Née en 1924 à Arvillers dans la Somme, Madeleine est fille unique d’instituteurs. Elle s’engagera en 1942 comme résistante chez les Francs-Tireurs-Partisans (FTP). Son nom de code, Rainer, rend hommage à un poète allemand, signifiant qu’elle « n’est pas en guerre contre le peuple allemand mais contre les nazis ».

La jeune résistante connaîtra ensuite la mise aux arrêts et la torture avant d’être libérée et assister à l’âge de 20 ans, à la liesse de la Libération en juin 1944. Elle sera décorée de la Croix de Guerre en 1945.

Son histoire de résistante est retracée dans une série de bandes dessinées réalisées par Jean-David Morvan sous le coup de crayon de Dominique Bertail.

Soucieux de la situation financière préoccupante de la nonagénaire, les deux hommes ont participé à la mise en place d’une cagnotte en ligne, destinée à soutenir Madeleine Riffaud. « Il lui reste six mois de vie et son assurance-vie sera épuisée », déplore Jean-David Morvan au Courrier Picard. « Les frais médicaux, sa prise en charge à domicile et les cotisations Urssaf, si c’est normal c’est encore pire, représentent trois fois sa pension de retraite ».

Avec cette cagnotte, plus de 45.000 euros ont déjà pu être récoltés.

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