Jean-Baptiste Huet, le plaisir de la nature

12 mars 2016 09:08 Mis à jour: 11 mars 2016 22:32

Jusqu’au 5 juin, le musée Cognacq-Jay consacre une exposition monographique à l’artiste Jean-Baptiste Huet, l’un des plus grands talents naturalistes de l’art français du XVIIIe siècle.

L’exposition tend à rendre au peintre, oublié peu après sa disparition, la place qu’il mérite.

72 gravures, peintures, objets décoratifs et cartons pour les manufactures de tapisserie mettent en lumière la richesse de Jean-Baptiste Huet.

Une carrière prolifique

Jean Baptiste Huet est né en 1725. Son père Nicolas Huet est le peintre du garde-meuble du roi. Il commence son apprentissage dans son milieu familial puis auprès de Charles Dagommer (1700-1768), membre de l’Académie de Saint-Luc, chez qui naîtra sûrement son goût pour les animaux et pour la gravure. Ses rencontres avec Jean-Baptiste Le Prince, élève de Boucher, encouragent son penchant pour le style rococo.

Le graveur Gilles Demarteau diffuse ses gravures comme il le fait d’ailleurs pour d’autres artistes en vogue.

Il puisera ses inspirations dans les scènes de chasse d’Oudry mais aussi dans les œuvres des Hollandais du Siècle d’or et de l’Antiquité.

Reçu à l’Académie royale en 1769 comme peintre animalier, Jean-Baptiste Huet excelle dans les représentations de la nature, mais aussi dans une gamme variée de techniques : la sanguine, le pastel, l’encre ou la pierre noire.

L’oubli de Jean-Baptiste est dû sûrement à un ensemble de facteurs : peu de commandes royales au profit des collectionneurs privés, quelques commentaires peu favorables des critiques entre autres de la part de Diderot, le changement des goûts : le passage du rocaille au néo-classicisme. Ce changement imposait le genre historique repoussant les autres genres considérés alors comme mineurs. Hélas c’est dans le genre animalier, dans le dessin de la faune et de la flore que Jean-Baptiste Huet exprime toute sa subtilité.

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Considéré longtemps comme un genre mineur, le genre animalier ne fait une percée qu’au XVIIIe siècle et la peinture des animaux est de plus en plus appréciée par les collectionneurs, mais cela ne durera pas.

Toutefois on se souviendra de Jean-Baptiste Huet grâce à sa vaste contribution à la manufacture de Jouy.

L’amour pour la nature

Influencé par les idées des Lumières, Jean-Baptiste Huet applique « l’observation d’après nature » et peint les animaux sur le vif, de préférence ceux de son domaine à Villiers-sur-Orge.

Moutons, chevaux, poules et coqs, lions, éléphants, chiens et loups sont peints avec la touche particulière du peintre qui leur octroie à tous une âme témoignant de leur vie intérieure, de leur souffrance comme de leur vigueur.

L’un des tableaux les plus impressionnants est Un loup percé d’une lance, exposé au salon de 1771. Dans ce tableau, Huet attire l’attention sur l’aspect tragique de la scène, l’expression intense de la tête de l’animal blessé, son poil hérissé de douleur. Huet peint la souffrance du loup. Le tableau est inspiré d’un autre loup blessé de Jean-Baptiste Oudry mais la grande intensité avec laquelle Huet peint la souffrance de l’animal rend ce tableau de 1771 très particulier.

Un dogue se jetant sur des oies (vers 1768-1769) – un couple d’oies se dresse face à un chien pour protéger ses petits, fut le tableau d’admission à l’Académie royale. Le tableau fut apprécié de ses contemporains pour sa vitalité et ses coloris.

Si les animaux de son domaine occupent la plupart de ses tableaux, vers la fin de sa vie il tente aussi de représenter des animaux plus exotiques comme cette lionne avec ses petits qu’il prend comme modèle à la ménagerie du Museum (Lionne avec ses petits, 1802).

Huet s’intéresse également aux plantes, aux « herbes sauvages ». Ses études de plantes, dont certaines remontent au début de sa carrière, sont également caractéristiques de sa patte. Ce sont des plantes communes qu’il peint avec le même brio et la même authenticité. Huet s’acharne sur la précision du dessin comme sur les jeux de lumière sur les feuilles et les fleurs des vignes et des sous-bois.

Coq et poules dans une basse-cour, vers 1790, huile sur toile.(© Musée des Beaux-arts de Quimper, France)
Coq et poules dans une basse-cour, vers 1790, huile sur toile.(© Musée des Beaux-arts de Quimper, France)

Les pastorales

Sous l’influence du siècle des Lumières, la campagne est perçue comme un lieu de sérénité et d’innocence loin du tumulte et de la corruption de la ville – un lieu d’amour sain et doux, lieu de contemplation et d’épanouissement. Le genre de la pastorale, déjà présent dans l’Antiquité, revient au XVIIIe siècle dans toute sa splendeur. Boucher relance le genre avec ses premières scènes champêtres, les critiques encouragent et d’autres peintres suivent.

Mais c’est surtout l’intérêt des collectionneurs – et celui du roi – pour les pastorales italiennes et nordiques du XVIIe siècle qui encouragent les peintres à réaliser des scènes dans une campagne idyllique.

C’est dans ce contexte que Jean-Baptiste Huet peint ses bergères raffinées jouant avec des enfants et des chiens, place une mère et son enfant regardant un paysage qui s’étend à perte de vue (Paysage avec une femme et un enfant, vers 1780) ou encore un homme solitaire à cheval.

Dans ces paysages, il intègre des scènes bibliques, de la mythologie grecque ou de la littérature contemporaine.

Les tapisseries

Huet est certes un maître en matière de tapisserie. Inventif et prolifique, sa contribution aux toiles de Jouy est indéniable. Il s’intéresse à l’ornement tout au long de sa carrière. Ses dessins intimistes et séduisants constituent souvent le prétexte à un équilibre harmonieux des formes et des couleurs.

La production décorative lui permettait d’exprimer au mieux son imagination fertile, capable d’allier une sensibilité des plus personnelles aux tendances du moment, l’art rocaille avec l’art antique et de puiser aussi bien dans les pastorales que dans la mythologie classique ou la littérature moderne, il s’aventurera même à peindre des sujets politiques.

L’exposition de ce peintre longtemps méconnu incarne parfaitement l’élégance et l’insouciance du XVIIIe siècle et c’est l’hôtel de Donon, rare exemple d’une maison de ville construite à la fin du XVIe siècle au cœur du quartier du Marais, qui accueille le musée depuis 1990 – une raison de plus pour aller découvrir Le plaisir de la nature.

 

INFOS PRATIQUES

Musée Cognacq-Jay

8, rue Elzévir – 75003 Paris

Tél. : 01 40 27 07 21

De 10h à 18h

Du mardi au dimanche.

Fermeture les lundis et certains jours fériés.

Plein tarif : 6€ – Tarif réduit : 4,50€

museecognacqjay.paris.fr

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