La légende de l’athlétisme français, Michel Jazy, est décédée

Par Vincent Solacroup
1 février 2024 17:15 Mis à jour: 1 février 2024 17:21

Auteur de neuf records du monde, 18 d’Europe et 49 de France, l’éclectique Michel Jazy, brillant du 800 au 5000 m, n’est jamais parvenu à toucher l’or olympique mais reste l’une des premières stars de l’athlétisme tricolore.

Michel Jazy, dont le décès à l’âge de 87 ans a été annoncé jeudi par le journal L’Équipe dont il avait été salarié. Il avait été pris sous l’aile de Gaston Meyer, patron de l’Équipe, et avait ainsi pu concilier un emploi aménagé et un entraînement spécifique.

« L’ange de la piste s’est envolé… » a tweeté sur X la Fédération Française d’Athlétisme.

Il nait en 1936 dans une famille de mineurs polonais d’Oignies, non loin de Lille, et grandit dans la même rue où, quelques années plus tard, un autre champion d’athlétisme, Guy Drut, fera ses premiers pas. Le premier vivra ses déceptions olympiques en 1960, à Rome, puis en 1964 à Tokyo, deux éditions où il était parmi les favoris, quand le second triomphera du 110 m haies en 1976, à Montréal.

« Oui… J’aurais aimé être champion olympique. Mais ce n’est pas grave : j’ai eu la reconnaissance du public français » avait déclaré Michel Jazy à FranceInfo en 2019.

Mauvais élève mais redoutable sportif, Jazy enfant excelle en football et court pieds nus, excepté lors de sa première course officielle qu’à dix ans, il accomplit en… sabots, au milieu des adultes, pour terminer avec les honneurs.

Après la mort de son père, vaincu en 1948 par la silicose, et l’obtention à l’arraché de son certificat d’études, Jazy rejoint sa mère à Paris où il continue de s’adonner au foot et à la course tout en enchaînant les petits boulots, notamment un emploi de typographe à L’Équipe.

Licencié au CO Billancourt, le jeune homme devient à 17 ans champion de France cadet du 1000 m, un titre non reconnu car il ne possède toujours pas la nationalité française.

En 1956, il décroche son premier titre national sur 1500 m, officiel celui là, devançant pour la première fois de sa carrière son rival de toujours Michel Bernard. Retenu pour les Jeux de Melbourne, il y noue une relation filiale avec Alain Mimoun qui deviendra en Australie champion olympique du marathon à 36 ans.

En 1960 aux Jeux Olympiques à Rome, l’Australien Herb Elliott devance le Hongrois Istvan Rozsavolgyi, le Français Michel Jazy et le Roumain Zoltan Vamos dans la finale du 1500 mètres (Crédit : Allsport UK /Allsport)

Aux Jeux de Rome en 1960, sur 1500 m, il est dominé par l’invincible australien Herb Elliott dans une course folle lancée par Michel Bernard. Mais sa médaille d’argent et son record de France provoquent un véritable engouement populaire dont il profite allègrement pendant quelques semaines.

Champion d’Europe du 1500 m en 1962, il établit le premier de ses neuf records du monde sur 2000 m, puis enchaîne par le 3000 et arrive en favori du 5000 m aux Jeux de Tokyo, dont il a fait son objectif. Gourmand, trop rapide pour engager le sprint, Jazy doit céder dans les derniers mètres et, quatrième, laisser les médailles à l’Américain Bob Schul, suivi de l’Allemand Harald Norpoth et de l’Américain Bill Dellinger.

1965, l’année de tous les records

Frustré, il passe son année 1965 à battre des records, dont quatre du monde, cinq d’Europe et neuf de France durant le seul mois de juin, dans un fabuleux mano a mano avec l’Australien Ron Clarke. Autant de courses qui eurent droit à leur retransmission télévisée, fait unique à l’époque.

Champion d’Europe du 5000 m et médaillé d’argent sur 1500 mètres en 1966 à Budapest, il quitte les pistes en octobre de la même année, à Saint-Maur, en améliorant le record du monde du 2000 m.

Commence alors une reconversion commerciale réussie, chez Perrier, Adidas puis à la direction de la Société du Parc des Princes, si intense qu’elle lui vaut une alerte cardiaque dans les années 80.

Toujours au fait des choses du demi-fond français, il n’avait cessé de suivre, depuis sa résidence dans les Landes, le parcours des Français dans les grands championnats.

« Le zèbre des corons »

Ses amis le surnommaient « le zèbre des corons » en raison de sa rapidité mais aussi pour les marques de baguette laissées par son instituteur. « La plus belle époque que j’ai vécue, c’est dans les années 60, où il y avait la gloire du maillot et la fierté de battre des records du monde » témoignait-il à Franceinfo en 2019.

« Je suis atterré », a indiqué à l’AFP le président de la Fédération française d’athlétisme André Giraud. « Pour le monde de l’athlétisme et pour la FFA, c’est une perte énorme pour tout ce qu’il représentait, notamment en cette année des Jeux olympiques à Paris », a-t-il ajouté.

« Jazy a marqué notre sport par ses résultats et ses records du monde, c’était une grande figure du sport français », a réagi auprès de l’AFP Pierre Weiss, ancien directeur à la FFA et intime de la famille. « Avec (le patineur artistique) Alain Calmat, il déplaçait les foules dans les bistrots, là où il y avait des écrans de télé, c’était quelque chose », a-t-il ajouté.

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