L’ingérence russe ressemble à une campagne de désinformation selon un expert

18 août 2017 21:06 Mis à jour: 18 août 2017 22:49

L’allégation selon laquelle Donald Trump aurait comploté avec la Russie pour influencer les résultats des élections américaines de 2016, et tout ce qui en découle, a toutes les caractéristiques d’une campagne russe classique de désinformation, affirme un expert.

« Cela semble correspondre à certaines idées folles provenant du haut niveau du gouvernement russe », a déclaré Ronald Rychlak, professeur de droit et co-auteur du livre Désinformation qu’il a écrit avec Ion Mihai Pacepa, transfuge roumain et ancien général des services d’espionnage de l’ex-bloc soviétique. Toutefois, il n’exclut pas l’hypothèse qu’il pourrait s’agir d’un « projet insensé » lancé par quelques responsables russes sans scrupules.

La théorie du complot Trump-Russie repose largement sur un dossier non fiable préparé par Fusion GPS, une société de recherche d’information engagée par les opposants de Trump.

« C’était une belle façon de semer le trouble dans le système américain – pour faire douter les Américains et pour discréditer l’ensemble du système. »

Ronald Rychlak, professeur de droit et écrivain

Il a été révélé que Fusion GPS avait publié dans son dossier des affirmations non vérifiées, provenant principalement d’une personne qui avait touché des fonds de sources proches du Kremlin. En outre, cette société recevait également de l’argent d’un responsable du gouvernement russe et faisait du lobbying pour la Russie.

Selon Ronald Rychlak, les services de désinformation russes tirent parti des situations qui leur permettent de créer des doutes. Cela correspond à leur objectif « d’amener les Américains à remettre en question les résultats des élections » et de semer le trouble.

« C’était une belle façon de semer le trouble dans le système américain – de faire douter les Américains et de discréditer l’ensemble du système », a-t-il martelé.

Les campagnes de désinformation de ce genre se fondent sur la concurrence entre les gouvernements afin d’accroître leur influence sur la scène mondiale, ainsi que sur la perception par les populations de leurs systèmes gouvernementaux. Les États-Unis, par exemple, défendent les droits individuels, la démocratie et leur propre vision de l’État de droit.

À cause de cette concurrence, les pays comme la Russie, la Chine et l’Iran considèrent les États-Unis et leur système gouvernemental comme idéologiquement opposés à leurs propres systèmes. C’est pourquoi ils cherchent généralement à discréditer l’image et la validité du système américain, ou d’un autre système semblable, en ayant recours aux moyens tels que la propagande et la désinformation.

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Ronald Rychlak souligne que cette concurrence a été plus visible pendant la Guerre froide. Il  explique aussi comment les campagnes soviétiques de désinformation profitaient souvent d’événements particuliers pour modifier la perception des gens et servir les intérêts soviétiques.

Par exemple, juste après l’assassinat de John Kennedy, la désinformation soviétique a parlé d’une opération secrète de la CIA ; et pendant la guerre du Vietnam, les Soviétiques ont également utilisé la désinformation pour faire douter davantage les Américains du coté moral de la participation dans ce conflit. Ces deux opérations, a commenté Rychlak, visaient à faire en sorte que les Américains remettent en question la crédibilité de leurs décideurs politiques.

La désinformation est différente d’autres formes de propagande. Rychlak la dépeint comme « une fausse information, inventée, mais semblant provenir d’une source fiable. Elle est conçue pour donner l’impression d’être crédible ou d’être fabriquée autour d’une once de vérité. Cependant, elle vise à servir un agenda politique ».

Ronald Rychlak ajoute que la désinformation ne doit pas être confondue avec un parti-pris gouvernemental ou journalistique – lorsque les auteurs peuvent effectivement croire l’information qu’ils présentent. Dans le cadre d’une campagne de désinformation, indique-t-il, les agents tâchent activement d’arriver à leur but.

« Lorsqu’on a un organisme comme l’ancien KGB et qu’on voit ce qui entoure l’équipe dirigeante de la Russie d’aujourd’hui, on doit envisager la possibilité que les faits vont être intentionnellement déformés afin d’arriver à un but politique », a-t-il poursuivi.

Des agents russes derrière le dossier

Fusion GPS a fait circuler son dossier de 35 pages sur Trump dans l’ensemble du gouvernement, des médias et des services de renseignement américains. Le magazine Mother Jones a été le premier à publier l’information sur ce dossier en octobre 2016. Toutefois, le contenu du dossier est resté largement inconnu jusqu’à ce qu’il soit entièrement publié par BuzzFeed News le 10 janvier dernier.

Malgré que ses affirmations ont été reconnues comme non fiables peu de temps après, le dossier avait déjà semé le doute dans la crédibilité du système électoral américain. Le Comité national démocrate des États-Unis a utilisé ce rapport non vérifié pour accuser Trump de coopérer avec la Russie afin de diffuser de mauvaises informations sur Hillary Clinton, sa rivale dans la course à la présidence américaine.

Le quartier général à Moscou du Service fédéral de sécurité (FSB), l’ancien KGB. (MAXIM MARMUR / AFP / Getty Images)

La théorie du complot Trump-Russie est devenue un argument important de la campagne électorale d’Hillary Clinton et le dossier de Fusion GPS a été cité comme la preuve principale dans le rapport du FBI sur l’ingérence russe dans les élections de 2016. Et cela malgré le fait que le FBI n’avait pas pu vérifier l’exactitude des affirmations figurant dans ce dossier.

Il a également été révélé que Christopher Steele, un ancien espion britannique engagé par Fusion GPS pour recueillir des données figurant dans le dossier, avait tiré, par le biais des intermédiaires, la plupart de ses conclusions à partir d’informations reçues de deux contacts russes. L’un de ces contacts était un haut fonctionnaire du ministère russe des Affaires étrangères et l’autre, un ancien agent de haut niveau des services de renseignement russes qui travaille toujours pour le Kremlin.

Le fait que le dossier de Fusion GPS porte toutes les caractéristiques d’une campagne de désinformation russe est devenu largement connu le 27 juillet dernier, lorsque William Browder, PDG et fondateur de la société Hermitage Capital Management, a témoigné devant le comité judiciaire du Sénat américain.

William Browder a déclaré, qu’au printemps et en été 2016, Fusion GPS recevait indirectement de l’argent d’un haut responsable du gouvernement russe. Il a également fait entendre que Fusion GPS et le gouvernement russe avaient conjointement fait du lobbying contre la loi Magnitsky de 2012.

Cette loi a été adoptée par le Congrès américain suite au décès en prison de l’avocat russe Sergueï Magnitski, symbole de la lutte contre la corruption du système politique. La loi sanctionne les responsables des meurtres et des tortures extrajudiciaires en Russie, ainsi que les responsables du mauvais traitement des militants des droits de l’homme ou des personnes qui dénoncent les activités illégales du gouvernement russe.

Selon Ronald Rychlak, le contenu du dossier de Fusion GPS, les liens cachés de cette société, ainsi que les effets de la campagne qu’elle a provoquée aux États-Unis sont les signes d’une opération de désinformation provenant de la Russie et visant à « discréditer l’ensemble du système » américain.

Ronald Rychlak souligne que même s’il est « disposé à accepter que cela aurait pu être une action individuelle », les affirmations figurant dans le dossier anti-Trump s’accordent avec les affirmations souvent répandues par la désinformation russe.

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Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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