L’origine du Covid-19 : un laboratoire de virologie de Wuhan ?

Édito

Par Aurelien Girard
12 avril 2020 18:43 Mis à jour: 2 mai 2021 10:16

Les hypothèses les plus diverses circulent sur Internet depuis des semaines. La dangerosité du virus de Wuhan serait « amplifiée » par les réseaux 5G, il serait une arme de guerre biologique chinoise sciemment diffusée, se baserait sur un travail commencé à l’Institut Pasteur et breveté il y a 15 ans… L’ensemble de ces théories non-étayées – ou simplement fantaisistes – a empêché de s’intéresser à ce qui est aujourd’hui l’explication la plus documentée de l’émergence du virus : l’absence de mesures de sécurité dans les laboratoires de virologie de Wuhan.

Cet éditorial ne plaira malheureusement pas à ceux qui veulent croire à un complot mondial, et peut-être moins encore à ceux pour qui le virus est nécessairement un hasard génétique.  Car d’après les données aujourd’hui disponibles, la vérité de l’émergence du coronavirus de Wuhan se situe probablement quelque part entre les deux.

Pour le réaliser, il est en premier lieu important de savoir comment fonctionne la recherche en virologie, telle qu’elle se mène dans le monde entier : Pour comprendre les nouveaux virus et les risques qu’ils peuvent poser, ceux-ci sont collectés dans des laboratoires spécialisés et leur génome (leur code génétique, qui livre toutes leurs propriétés) analysé et comparé. C’est ainsi que leur évolution  peut être comprise, ce qui a par exemple permis d’établir le lien entre le Covid-19 et le SRAS de 2003. Ces virus sont manipulés, fonction de leur niveau de danger, dans des laboratoires de sécurité BSL-3 (« P3 », adapté aux coronavirus) ou BSL-4(« P4 », pour des souches comme Ebola.)

À Wuhan, un laboratoire de type P4 a été co-construit avec la France, malgré les inquiétudes internationales sur l’utilisation militaire cachée qu’en ferait le régime communiste pour produire des armes biologiques. C’est probablement pour cette raison que les premières rumeurs  ont lié le Covid-19 à des activités « secrètes » du laboratoire P4. Mais rien ne permet aujourd’hui de prouver que celui-ci soit à l’origine de l’épidémie. En particulier, l’analyse de la séquence génétique du Covid-19 ne montre aucune manipulation qui serait révélatrice flagrante de la création d’une arme biologique. C’est ce qu’ont récemment rappelé des groupes de scientifiques internationaux dans les journaux The Lancet et Nature : Le COVID-19 est un virus qui contient essentiellement (mais pas forcément seulement) du matériel génétique dit naturel.

Détaillons le « pas forcément seulement »: le laboratoire P4 de Wuhan, inauguré en 2017 par le Premier ministre français, sa ministre de la Santé et le Directeur Général de l’Inserm, appartient à un campus de recherche plus large, le Wuhan Institute of Virology. Celui-ci inclut un laboratoire de premier plan mondial que travaille spécifiquement sur les différentes souches de coronavirus. Il est dirigé par le Pr. Shi Zhengli, une référence internationale du domaine, formée à l’Université de Montpellier et dont les travaux sont publiés dans les meilleures journaux scientifiques. C’est vers son laboratoire que se tournent aujourd’hui tous les soupçons.

Les bidouillages génétiques d’un laboratoire de Wuhan

Il faut d’abord savoir comment fonctionne un laboratoire de virologie tel que celui de Shi Zhengli. Par des outils d’ingénierie (les « ciseaux » moléculaires du CrispR-Cas9 par exemple), on peut modifier certaines des protéines-clés des virus afin de comprendre leurs propriétés, connaître leurs ruses, la façon dont ils évoluent et dont ils pourraient infecter des cellules humaines ; l’objectif, en le connaissant mieux, est ainsi d’avoir plus rapidement des moyens de le combattre. Les laboratoires de virologie du monde entier abondent de ces virus modifiés, « disséqués » par les chercheurs, dans des conditions de sécurité très strictes pour éviter la catastrophe potentielle d’un virus en cavale. La différence, en Chine, est qu’on est forcé d’avoir le soupçon permanent d’une utilisation militaire des découvertes, et la crainte d’un non-respect des mesures de sécurité. Car les exemples de contaminations liées à la revente d’animaux de laboratoire, voire même les fuites de virus ou bactéries à cause des formations insuffisantes du personnel, se sont multipliés ces dernières années.

Richard Ebright, professeur à l’Institut de Microbiologie de la prestigieuse Rutgers University, écrit dans le Bulletin of the Atomic Scientists que beaucoup des scientifiques de Wuhan travaillent avec « un minimum de protections » pour les protéger des infections : « La collection, la culture de virus, l’infection d’animaux à des niveaux BSL2 [faible sécurité] avec un virus de ce type crée des risques réels d’infection du personnel de laboratoire, et à partir de là, du public, » indique-t-il.

Faisceau d’éléments concordants

Dans le Washington Post du 2 avril, un éditorial très remarqué est allé dans ce sens : « Les services secrets américains ne pensent pas que la pandémie était intentionnelle » écrit Ignatius, un éditorialiste connu pour ses réseaux dans l’appareil de la sécurité nationale. « Mais les scientifiques n’excluent pas le fait qu’un accident dans un laboratoire de recherche à Wuhan puisse avoir laissé s’échapper un virus de chauve-souris mortel qui y était étudié…  à moins de 300 mètres du marché aux fruits de mer de Wuhan il y a un laboratoire du CDC de Wuhan. Les chercheurs du site et ceux de l’Institut de virologie de Wuhan ont posté des articles sur la collecte de coronavirus dans toute la Chine. L’un d’entre eux s’est-il échappé, ou des déchets ont-ils été jetés à un endroit qui a permis la diffusion ? »

Ignatius cite également un article scientifique chinois du 6 février, « curieusement retiré » et dans lequel il était indiqué : « Le coronavirus tueur vient probablement d’un laboratoire de Wuhan. Les niveaux de sécurité doivent être renforcés dans ces laboratoires à haut risque biologique. »  Les auteurs de cet article sont depuis totalement injoignables.

Ce qui aurait pu être une piste pour identifier le réel foyer de l’épidémie a été délibérément laissé de côté par le régime chinois qui a imposé que les recherches se concentrent sur le marché des fruits de mer de Wuhan, et a verrouillé le site du CDC et l »Institut de Virologie. Dans le quotidien britannique Daily Mail, Gao Yu, un journaliste chinois libéré après 76 jours d’incarcération à Wuhan, explique avoir parlé au Dr Shi Zhengli : « Elle m’a appris que son Institut avait fini le séquençage du virus le 2 janvier mais a été empêché de le diffuser. »

Le même jour, le directeur de l’Institut de Virologie de Wuhan, Wang Yanyi, a demandé par email à tout le personnel de l’Institut de ne divulguer aucune information sur la maladie, évoquant des instructions venant de la Commission Nationale de la Santé chinoise.

Au même moment, le personnel de l’Institut parlait d’une étudiante, Huang Yanling, soudainement tombée malade en 2019 après avoir travaillé sur le coronavirus et dont l’Institut a rapidement supprimé le profil de son site Internet.

Em plus de cette visible volonté d’empêcher la sortie d’informations sensibles de l’Institut de virologie, plusieurs autre éléments frappants laissent penser que l’hypothèse – de loin – la plus probable est une diffusion du virus depuis le laboratoire. Le premier est que le virus « naturel » dont dérive le Covid-19 est connu pour avoir infecté des chauve-souris à plus de 600 km de Wuhan, ce qui laisse penser que c’est très loin de Wuhan qu’il est apparu, et qu’il y a été rapporté par les chercheurs qui voulaient l’étudier.  Le second, ce sont les publications scientifiques de l’équipe de Shi Zhengli montrant des efforts ciblés pour modifier des coronavirus et les rendre capables d’infecter des cellules humaines. Le derniers, ce sont les surprenants petits morceaux d’ADN présents dans une protéine essentielle du virus, et qui lui permettent aujourd’hui de s’accrocher très efficacement les cellules humaines : Ces quatre petits fragments sont présents à quatre endroits stratégiques de la protéine et sont étrangement exactement identiques à des fragments du virus HIV. Qu’un d’entre eux se trouve là par le hasard des mutations naturelles des virus est recevable. Mais quatre ? Cependant, les chercheurs indiens qui ont publié ces résultats fin janvier ont depuis rétracté leur article pour y « réfléchir. »

Il est, en conclusion, aujourd’hui aussi improbable de supposer une origine totalement naturelle à ce coronavirus absent des zones naturelles autour de Wuhan que de penser à une fabrication militaire. Il est par contre établi que le régime communiste chinois est actif pour empêcher toute hypothèse non-conforme au message officiel. Le site de l’Institut de Virologie de Wuhan est totalement verrouillé et la communauté scientifique internationale priée de partir à la recherche de tous les pangolins qu’elle voudra.  Celle-ci n’a, de toute façon, pas naturellement tendance à privilégier une hypothèse qui la décrédibiliserait totalement et conduirait, une fois l’épidémie passée, à davantage de contrôles, moins de liberté et moins de budget pour la recherche. Les chercheurs en lien avec les services secrets semblent voir les choses différemment : comme l’indique le Daily Mail, les membres de Cobra, le comité d’experts scientifiques britanniques travaillant avec les services secrets du pays étudient très sérieusement la piste de cette  » alternative crédible [à la théorie d’un virus naturel], sur la base de la nature du virus. Ce n’est peut-être pas un hasard qu’il y ait ce laboratoire à Wuhan. »

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