« Je suis plus que ce à quoi je ressemble » : un grand brûlé passe de la solitude à l’ouverture d’une boulangerie

Par Anna Mason
9 mars 2022 01:48 Mis à jour: 9 mars 2022 01:57

« C’est mon rêve maintenant d’aider les autres. C’est en donnant en retour qu’on peut faire une différence dans la société. »

Endroit lumineux et joyeux, la boutique de café et de gâteaux de Hai affiche beaucoup des meilleures choses du Vietnam. Mais derrière la lumière, l’atmosphère colorée et l’hospitalité chaleureuse se cache une immense histoire de lutte et de bravoure.

Le propriétaire de Sunhouse Coffee, Ngo Quy Hai, 27 ans, est un grand brûlé, il a surmonté tous les obstacles pour ouvrir sa propre boulangerie dans sa ville natale, Kon Tum. Son inscription à KOTO, une école de formation à l’hôtellerie à Hanoï qui lui a permis d’apprendre à écrire après des années d’intimidation pendant l’enfance, a été son tremplin.

Avant cela, Hai allait devoir relever de très nombreux défis.

« Je suis plus que mon apparence », explique Hai à Epoch Times. « Ne me jugez avec des mots durs. Je suis un survivant. »

Ngo Quy Hai, 27 ans, propriétaire du Sunhouse Coffee dans la ville de Kon Tum, au Vietnam. (Avec l’aimable autorisation de Ngo Quy Hai )

Hai n’était qu’un bambin lorsque s’est produit l’accident qui allait changer sa vie à jamais. En poussant un trotteur dans la cuisine, il est tombé dans le poêle à bois, ce qui a entraîné des brûlures sur une grande partie de son corps.

« Les trotteurs étaient courants à l’époque et on ne savait pas à quel point ils pouvaient être dangereux. »

Après l’accident, Hai a été transporté à l’hôpital pour enfants de Saigon, où il est resté pendant deux ans à recevoir des soins intensifs et des traitements de survie. De nombreux traitements de reconstruction ont suivi, mais il a gardé d’importantes cicatrices.

Il a dû braver des traumatismes émotionnels et des brimades pour se faire une place.

Photo d’enfance de Hai avec sa famille. (Avec l’aimable autorisation de Ngo Quy Hai)

« Je me sentais seul en grandissant et je n’avais pas beaucoup d’amis », se souvient Hai. « Je me sentais mis de côté par la société. Lorsque j’essayais de trouver du travail, on se moquait de moi et on me ridiculisait. À un moment donné, je n’ai plus quitté la maison pendant près de deux ans. »

Hai était trop malmené pour aller à l’école, une situation qui lui a fait prendre beaucoup de retard sur le plan scolaire. Il dit qu’il a eu la chance de trouver un bon ami, lui-même handicapé, et qu’ils se sont liés.

« Parfois, je pense que c’est le destin qui nous a réunis », déclare Hai à propos de son ami. « Nous jouons ensemble depuis que nous sommes très jeunes et avons connu beaucoup de joies et de peines, car nous partagions tous les deux la même tristesse que personne ne voulait jouer avec nous. »

Se souvenant d’un incident d’enfance qui a nourri son rêve d’ouvrir sa propre boulangerie, Hai raconté que, vers l’âge de 10 ans, il était sorti avec son ami lorsqu’ils sont passés devant de grands magasins qu’ils n’avaient jamais vus auparavant. Les deux garçons ont été fascinés par l’un d’entre eux, une magnifique boulangerie.

La boulangerie de Hai, Sunhouse Coffee. (Avec l’aimable autorisation de Ngo Quy Hai)

Ils ont décidé d’économiser leur argent et d’entrer un jour fièrement dans le magasin pour acheter un gâteau. Il leur a fallu des mois pour économiser suffisamment. « Le prix était assez élevé pour nous, enfants de la campagne, mais dès que nous l’avons eu, nous sommes retournés à la boulangerie », raconte Hai. « C’était l’anniversaire de mon ami et j’étais tellement excité à l’idée que nous allions manger du gâteau le jour de son anniversaire. »

Les jeunes garçons ont couru aussi vite qu’ils le pouvaient. Mais dès qu’ils ont franchi la porte, l’agent de sécurité et le personnel les ont mis dehors. « Nous étions très pauvres donc nos vêtements n’étaient pas aussi chics que ceux de certaines personnes et ils n’ont pas non plus écouté nos explications. Ils nous ont chassés. »

Hai a déclaré que son ami a beaucoup pleuré alors qu’ils essayaient d’expliquer qu’ils avaient l’argent, en vain.

« C’était humiliant », se souvient Hai, « mais c’est une expérience qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. J’ai su au fond de moi ce que je voulais faire. J’allais ouvrir ma propre boulangerie pour pouvoir préparer de beaux et délicieux gâteaux et servir de la bonne nourriture à tout le monde, qu’ils soient riches ou pauvres. Je ne ferais aucune discrimination ; tout le monde serait le bienvenu. »

Hai dit que, malgré toutes les difficultés, il a également connu beaucoup d’amour et de soutien en cours de route.

En 2016, parrainé par l’organisation caritative Interplast, il s’est envolé pour l’Allemagne afin de subir une opération chirurgicale visant à séparer la peau sous son menton qui était attachée à la peau de sa poitrine. L’opération a réussi mais il est resté dans le coma pendant 21 jours et avait « vraiment le mal du pays. »

« Les infirmières et les médecins de l’hôpital ont été si gentils avec moi », se souvient-il. « Ils ont joué de la musique de ma ville natale et ont même appris les salutations vietnamiennes de base. Le travail des chirurgiens a changé ma vie. Pour la première fois, j’ai eu confiance en moi et en mon avenir. Je leur en suis éternellement reconnaissant. »

(Avec l’aimable autorisation de Ngo Quy Hai)
Hai jouant de la guitare dans sa boulangerie. (Avec l’aimable autorisation de Ngo Quy Hai)

L’intégration de l’école hôtelière KOTO a permis à Hai de réaliser qu’il était parmi d’autres personnes qui avaient connu des difficultés et se sentaient seules dans la vie. Il dit qu’au début, il était en retard parce qu’il ne pouvait pas écrire aussi bien que ses camarades de classe. Au bout de deux mois environ, après avoir passé tout son temps libre à écrire et à s’entraîner, il était à l’aise.

« J’ai rencontré tellement de gens et mes camarades de classe m’ont toujours inclus. Pour la première fois, des gens m’ont pris dans leurs bras sur des photos. »

« Tout le monde à l’école a sa propre histoire. Nous nous voyions comme des frères et sœurs et il n’y a pas de différence entre nous. »

Étonnamment, compte tenu de tout ce qu’il a traversé, Hai se considère chanceux.

« C’est drôle, plusieurs fois que j’ai été à l’hôpital, j’ai vu des gens arriver avec des brûlures plus graves, mais ils sont toujours optimistes. »

« Je me vois maintenant comme étant une personne chanceuse. Je suis ici maintenant pour aider les autres. »

« Les gens sont peut-être meilleurs que moi en matière de chance, mais je suis peut-être meilleur en matière d’effort. »

Hai (à droite) et son équipe, servant des boissons et des gâteaux gratuits dans sa boulangerie. (Avec l’aimable autorisation de Ngo Quy Hai)

Hai affirme que les membres de sa famille sont ses « premiers, les principaux », mais aussi ses « plus grands soutiens. »

« Ils sont une source d’énergie positive pour moi pour m’aider à surmonter les difficultés de la société que je continuerai à rencontrer en raison de mon apparence. »

« Je demande aux gens de regarder au-delà de ça. Il y a plus en moi. »

Après avoir prouvé sa puissance en tant qu’homme d’affaires prospère, passionné de pâtisserie et de musique, Hai a désormais pour objectif de collecter des fonds pour aider les enfants en situation difficile et apporter de la joie aux enfants défavorisés de sa ville natale. Il a récemment organisé une collecte de fonds au cours de laquelle il a distribué du thé au lait, des gâteaux et joué de la musique.

« C’était agréable de voir tant de visages souriants. »

« Je vois beaucoup d’enfants dans les rues qui vendent des billets de loterie et je les invite toujours à entrer pour manger un morceau de gâteau. Nous ne connaissons pas les difficultés que les autres ont dû affronter. Soyez toujours gentils. »

« Je rêve maintenant d’aider les autres à traverser des épreuves similaires à celles que j’ai traversées. C’est en donnant en retour que l’on peut faire une différence dans la société. »

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.