Budget 2026 : le double ultimatum du Parti socialiste
À peine une semaine après avoir épargné Sébastien Lecornu d'une motion de censure, les socialistes changent de braquet. Boris Vallaud, patron des députés PS à l'Assemblée, a sonné l'alarme jeudi soir dans les colonnes du Parisien : sans avancées concrètes sur la fiscalité des plus fortunés, les discussions budgétaires tourneront court.

Boris Vallaud, président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, avec la députée socialiste Mélanie Thomin, le 21 octobre 2025.
Photo: DANIEL PERRON/Hans Lucas/AFP via Getty Images
Le message est sans équivoque. Si le camp présidentiel refuse de voter la taxe Zucman ou l’ISF pour les milliardaires, le PS ne voit aucune raison de poursuivre les négociations. La menace plane désormais sur le gouvernement Lecornu : accepter ces mesures de redistribution ou affronter une nouvelle censure.
La menace de voter la censure
Vendredi matin, Olivier Faure a enfoncé le clou sur BFMTV. Le premier secrétaire du PS a fixé une échéance précise : lundi. Sans évolution majeure sur les budgets de l’État et de la Sécurité sociale d’ici là, son parti votera la censure et fera tomber le gouvernement.
Cette escalade intervient alors que les socialistes se retrouvent dans une position délicate. Leur choix de ne pas renverser Lecornu la semaine dernière leur a valu l’isolement au sein du Nouveau Front populaire. La France insoumise ne décolère pas et multiplie les attaques contre ses alliés supposés.
LFI accuse, les macronistes dénoncent
Manuel Bompard, coordinateur de LFI, ne mâche pas ses mots. Pour lui, les socialistes découvrent avec stupéfaction qu’en épargnant le ministre, ils ont aussi validé son budget. Entre naïveté, amateurisme et cynisme, le député insoumis peine à qualifier l’attitude du PS.
Du côté macroniste, on dénonce des « menaces » et des « coups de pression médiatiques ». Mais les socialistes réfutent tout revirement stratégique. « Nous ne durcissons pas le ton, nous haussons la voix parce que notre message n’a pas été entendu », précise la députée Ayda Hadizadeh.
Le deal initial qui vire au fiasco
Rappelons les termes de l’accord : en échange de leur abstention lors de la censure, les socialistes avaient obtenu trois garanties majeures. La suspension de la réforme des retraites d’abord, l’abandon du recours au 49.3 ensuite, et enfin l’assouplissement de l’objectif de réduction du déficit.
Le PS comptait profiter de l’ouverture parlementaire pour faire voter ses propositions phares, notamment la fameuse taxe Zucman. Problème : en commission cette semaine, les députés macronistes ont systématiquement rejeté ces amendements.
La colère monte à gauche du PS
« Lecornu n’est pas un simple arbitre, c’est le chef de la majorité. Il doit donner des instructions claires à ses troupes », martèle Ayda Hadizadeh. Pour Pierre Jouvet, secrétaire général du parti, la suspension des retraites n’était qu’une partie de l’accord. « Le vrai sujet maintenant, c’est la capacité des macronistes à évoluer sur la fiscalité. »
Mais cette sortie musclée ne convainc pas les Insoumis. Manuel Bompard ironise : les socialistes réalisent enfin que l’alliance objective entre le RN et la majorité présidentielle bloque toute avancée sur la justice fiscale.
Le piège de la réforme des retraites
Autre sujet de tension : le financement de la suspension promise. Les propositions gouvernementales présentées cette semaine semblent impossibles à accepter pour l’opposition de gauche. Et la question épineuse des carrières longues reste sans réponse satisfaisante.
« Ils ne peuvent pas faire un geste d’une main et reprendre de l’autre ce qu’ils ont donné », s’insurge Pierre Jouvet. Manuel Bompard y voit plutôt une tentative désespérée du PS de « gonfler les muscles » après avoir compris qu’il s’est fait piéger sur les retraites.
Le pari risqué de la dissolution
Une réunion de crise s’est tenue vendredi matin entre représentants de gauche et du camp présidentiel pour tenter de désamorcer la crise. L’objectif : trouver un compromis sur la justice fiscale avant l’ultimatum de lundi.
Les socialistes n’ignorent pas les conséquences de leur menace. Faire tomber le gouvernement Lecornu déclencherait automatiquement une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale. Mais au PS, on fait le pari que les macronistes ont plus à perdre qu’eux dans cette épreuve de force. Le compte à rebours est lancé.
Avec AFP

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