Dailymotion reste sous pavillon français

7 avril 2015 02:26 Mis à jour: 17 octobre 2015 23:27

Emmanuel Macron en s’opposant la semaine dernière au rachat de Dailymotion par le groupe chinois PCCW a fait d’une pierre deux coups. D’une part, il a assuré les fondamentaux de la construction d’une force européenne dans le domaine du numérique, et par cela favorisé la perspective d’une rentabilité sur le long terme. D’autre part, il a protégé le groupe du conglomérat chinois médiatique et télécom PCCW, lequel, malgré sa santé financière, voit ses options sérieusement plombées par l’évolution de la scène politique chinoise. La décision du ministre, trop rapidement taxée de protectionniste par une presse économique un peu trop friande de rentabilité à court terme, est en réalité porteuse d’une vision intégrée de la construction européenne.

«Pas de négociations exclusives»

Emmanuel Macron s’est opposé mercredi dernier aux négociations en cours entre PCCW et Orange pour le rachat de 49% de sa filiale Dailymotion. L’État possédant 24,9% de la solution de vidéo en ligne, le ministre de l’Économie a eu le poids suffisant pour empêcher des négociations exclusives avec le groupe chinois et privilégier la recherche un éventuel partenaire européen. «Il est nécessaire que toutes les options puissent être examinées en prenant en compte l’enjeu de souveraineté européenne», affirmait une source du ministère.

Avec 128 millions de visiteurs uniques par mois, la plateforme française de partage de vidéos est une des grandes réussites françaises sur le web – mais pour affronter le leader Youtube et développer son marché à l’étranger, de nouveaux investisseurs sont indispensables. Il y a deux ans, l’offre du géant américain Yahoo avait, déjà, été bruyamment rejetée par Arnaud Montebourg, là encore par crainte de perdre la souveraineté sur cette «pépite du web».

Dailymotion et l’option d’un marché numérique européen

Virtuellement – car en ordre dispersé – première puissance économique mondiale, l’Europe pourrait en effet, en jouant collectif, se donner les moyens de peser sur le marché mondial du numérique et concurrencer les géants américains que sont Youtube, Google, Facebook, Amazon, etc., et chinois (Alibaba, Baidu, etc.), qui se partagent actuellement le marché mondial du web. Lors d’une rencontre le 31 mars avec son homologue allemand Sigmar Gabriel, Emmanuel Macron déclarait que «l’Europe a besoin d’une stratégie numérique ambitieuse dans les prochaines années, fondée sur un marché européen plus intégré».

Le message a-t-il été reçu? D’après Le Monde, Orange privilégierait à présent des partenariats français (Fimalac, Vivendi) ou européens (Axel Springer et Bertelsmann) pour développer Dailymotion.

Les dessous des cartes des investisseurs chinois

Le choix du ministre de l’Économie met également Dailymotion à l’abri du futur incertain que lui aurait réservé le groupe chinois PCCW. En effet, ce puissant conglomérat média et télécom hongkongais est dirigé par Richard Li, fils cadet de Li Ka-shing première fortune d’Asie et proche de l’ancien président chinois Jiang Zemin.

En Chine, depuis 2012, une purge politique sans précédent n’épargne aucun des soutiens politiques et financiers de l’ancien président chinois. Tout le réseau d’influence de Jiang Zemin, depuis les «tigres» politiques jusqu’aux entreprises chinoises et internationales proches du clan dit «de Shanghai», est attaqué de manière systématique dans le cadre de la lutte anticorruption menée par Xi Jinping. À titre d’exemple, le 3 avril 2015, Zhou Yongkang, ex numéro 2 du régime et ancien patron d’un puissant groupe chinois de télécom, a été inculpé de «corruption, abus de pouvoir et divulgation de secrets d’État». Selon les sources d’Epoch Times, il aurait également participé activement aux prélèvements forcés d’organes sur les prisonniers du mouvement bouddhiste Falun Gong. En se préservant de PCCW, Dailymotion pourrait bien s’être évité de devenir victime collatérale de la chute de Jiang Zemin et de ses anciens alliés.

 

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